Merok

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17/20
Nom du groupe Alukta
Nom de l'album Merok
Type Album
Date de parution 02 Mai 2025
Labels Transcendance
Enregistré à Opus Magnum Studios
Style MusicalBlack Doom
Membres possèdant cet album4

Tracklist

1.
 Matampu'
 04:45
2.
 Laissez Entrer Ceux Qui Pleurent
 07:09
3.
 Des Teintes d’Eternité
 08:43
4.
 Kombengi
 05:58
5.
 Aluk To Dolo
 07:56
6.
 Exuvia
 08:25

Durée totale : 42:56

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Alukta


Chronique @ Icare

22 Mai 2025

Un blackened ritual doom à l'aura sacrée, superbe, intemporel et universel. Indispensable, tout simplement.

Parfois, on a des amis un peu taquins qui aiment nous titiller et nous lancer des défis a priori un peu improbables ; et ces défis, lorsqu’on est joueur et qu’on accepte de les relever, peuvent donner des résultats surprenants, parfois même au-delà des espérances de départ.
Pourquoi une introduction de la sorte sur la chronique d’un album de metal vous demanderez-vous peut-être ? C’est qu’elle résume bien l’émergence de l’entité Alukta, née sous l’impulsion d’une Marie (Brouillard, Vertige, Sphere, Transcending Rites) poussée dans ses retranchements par un Déhà qui l’exhorte à créer un album de doom, sachant pertinemment qu’elle n’a aucune attirance pour le style. Deux ans et un deuil difficile à digérer plus tard pour Marie, voilà que sort Merok, premier-né d’Alukta qui voit le jour dans la clinique sonore de Brouillard, Transcendance. Sur cet enregistrement, Marie s’éloigne donc volontairement de sa zone de confort, explorant pour la première fois les terres moroses d’un doom blackisant et ritualiste, et Olmo Lipani de son vrai nom vient lui prêter main forte en s’occupant de l’enregistrement et du mix, appuyant les parties de guitare et de batterie et ajoutant quelques vocaux titanesques et antédiluviens histoire de donner plus de relief à l’ensemble.

C’est un fait, le mariage des univers musicaux de ces deux-là sonne comme une évidence, accouchant d’un hybride blackened doom poignant d’une tristesse et d’une beauté abyssales à la personnalité déjà bien affirmée nous happant dès le morceau d’ouverture Matampu’. Si Marie a presque exclusivement composé ce premier album (on retrouve l’aspect ambiant, décharné et dépressif planant sur plusieurs passages des derniers Brouillard ou la discographie de J’Ai Si Froid), on reconnaît malgré tout la patte de Déhà dans le traitement sonore, notamment sur un morceau comme Des Teintes d’Eternité qui nous immerge dès les premières mesures dans cet univers de deuil aussi solennel que majestueux rappelant le doom de Silence Lives Out/Over Whirlpool. Quoi qu’il en soit, les styles black et doom fusionnent en un équilibre parfait, révélant une véritable osmose musicale entre les deux artistes.

Merok se compose de six titres qui s’écoulent comme un seul pendant presque 43 minutes, d’une manière extrêmement fluide et cohérente. Entièrement inspiré par les rites funéraires, en particulier ceux des Torajas, une ethnie d'Indonésie, ce doom lent, lourd et inexorable, d’une beauté à coller des frissons, est ainsi parfaitement incarné par les hurlements arrachés et vibrants de Marie, qui lui insufflent un aspect encore plus déchirant et viscéral. La musique, presque religieuse, invite au recueillement, à une sorte de deuil paisible tandis que le chant s’enfle encore de la souffrance et de la révolte typiques de celui qui vient de perdre un proche et ne peut pas accepter la mort et son caractère inrrémédiable. Le contraste est saisissant et anime la musique d’une profondeur peu commune, illustrant finalement l’ironie ultime dans toute sa cruelle absurdité : ce sont les défunts qui ont trouvé la paix, et il n’y a finalement que ceux qui restent, les vivants, pour souffrir de leur disparition !

En tout état de cause, Merok résonne comme une sorte de quête spirituelle, une fascination pour l’au-delà plus métaphysique que morbide qui vient nuer ces compositions d’une teinte d’éternité (la fin de ce même titre, avec le chant clair de Marie plus apaisé qui semble vouloir accompagner l’âme défunte comme un ultime adieu). Les mélodies de guitare sont superbes, à nous tirer des larmes, et évoqueront à tout un chacun la cohorte des fantômes de son propre passé, ressuscitant de vieux visages et des souvenirs enfouis que l’on croyait ensevelis dans les tréfonds d’un subconscient meurtri (la mélodie finale de Kombengi qui aurait méritée d’être prolongée d’au moins deux minutes tellement elle est hypnotique, le superbe break central de Aluk To Dolo avec ce jeu de cordes feutrées accompagnant comme une mélopée funèbre entêtante ces chants cérémoniels, la fin poignante d’Exuvia où des guitares en état de grâce fusionnent avec les vocalises shamaniques de Brouillard, venant clore en douceur ce chant du cygne musical).
Si le terme de doom funéraire semblerait prendre ici tout son sens, il faut tout de même souligner qu’on est quand même assez loin des univers malsains et complètement torturés des Therogthon et autres Skepticism : malgré ces saccades grasses et ces coups de grosses caisse catatoniques aux lugubres résonnances de sépulcre, il ressort de ces compostions un aspect très mélodique, une lueur fragile qui nous enveloppe et un sentiment de paix intérieure, un peu à l’instar de groupes comme SLOW (assez logiquement…) ou Shape of Despair.
Le terme de blackened ritual doom décrit bien la musique et retranscrit l’aura sacrée qui se dégage de ces six titres, la musique parvenant à rester organique et éthérée en même temps, comme si Alukta se faisait un héraut de l’au-delà, réalisant l’exploit improbable de dresser une passerelle sonore entre monde terrestre et contrées célestes impalpables.

Pour conclure, ce premier album d’Alukta est une réussite totale, une confrontation avec le monde aussi fascinant et terrifiant de l’au-delà qui agit comme une catharsis salvatrice pour nous autres, les vivants. En explorant les traditions funéraires des Torajas, c’est en réalité chacun d’entre nous que Marie et Déhà invitent à se questionner sur son rapport à la mort, et par extension à la vie, faisant de ce Merok une œuvre superbe, intemporelle et universelle. Indispensable, tout simplement.

1 Commentaire

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Chab - 22 Mai 2025:

Commandé rapidement à sa sortie tant je l'attendais, au vu du titre écouté sur bandcamp il y a quelques mois. Carton plein me concernant tant cet album risque de finir dans mon top de l'année. Tout ce que touche Marie/Brouillard devient de l'or en barre, elle a un talent fou et ce même en dehors de sa zone de confort comme tu le stipules très justement.

J'en ai d'ailleurs profité pour me commander le Vertige en même temps, bien saigné sur bandcamp mais qui méritait une petite acquisition en physique, surtout au vu de la qualité du digipack en A5 s'il vous plaît.

Un grand merci pour la chronique Icare !

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