Deuxième album pour
Grieving Age, groupe originaire d'Arabie Saoudite qui nous propose chez le label russe
Solitude Productions ce
Merely the Fleshless We and the Awed Obsequy, qui disons le tout de suite ne s'adressera pas à tous les types de public.
Car en effet tout au long de ses cent cinq minutes la formule employée par les musiciens saoudiens ne varie guère, les cinq morceaux composant l'album étant constitués d'un même alliage: un
Doom Death crade, lourd, aussi primaire que jouissif. Il n'est clairement pas question ici de pleurs ou de deuil, encore moins d'amour perdu, les guitares étant là pour écraser l'auditeur et non pour fournir une catharsis à sa peine. La principale variation qu'elles ont d'ailleurs à nous offrir tient aux changements de rythme disposés ça et là au fil des morceaux, et même ceux-ci restent modérés de manière à éviter tout écarts trop importants qui auraient pu briser l'homogénéité de l'ensemble. Deux CD remplis à ras bord de martellements lourdingues et répétitifs: il est clair que ce Merely the
Fleshless... n'est pas pour tout le monde, et que les personnes préférant la dimension plus mélodique des groupes qu'a l'habitude de signer
Solitude Productions feraient bien d'écouter des extraits avant tout éventuel achat.
Mais cette orgie de dévastation ne serait rien sans la prestation d'Ahmed, chanteur de la formation. Celle-ci est en effet à saluer tout particulièrement, tant le rôle qu'elle joue dans l'atmosphère (et par conséquent dans l'attrait) de l'album est important. Très mis en avant au sein des morceaux, les charismatiques beuglements que pousse le musicien arabe donnent l'impression à l'auditeur de se retrouver face à un prophète fou déclamant un prêche grotesque, un sermon flirtant avec le blasphème et l'insanité. Cette ambiance est encore renforcé par les textes, dont l'aspect très particulier se reflète dans les noms de morceaux et dans le titre de l'album. Très excessifs de par leur dimension biblique exagérée (ou peut-être coranique dans le cas présent), atteignant même souvent les limites du ridicule (we are the irredeemable gerbilles ! nous clame Ahmed sur "O,
Elegiac Purulent Purtenance, O
Sepulchral Longevous Billows" - j'avoue avoir bien ri en lisant ça), ils correspondent tant à l'identité même de l'album qu'à titre personnel ils ne me posent guère de problème, bien que le vocabulaire utilisé ne facilite guère leur compréhension.
Parlons enfin de l’élément le plus inattendu de l'album, j'ai nommé la présence en guest d'une violoncelliste intervenant régulièrement au sein de l'album. Celle-ci apporte une certaine subtilité à la musique de
Grieving Age: il ne s'agit bien évidemment pas ici d'adoucir cette dernière, ni de lui apporter une dimension mélodique, mais bien d'enrichir et d'approfondir son ambiance à travers des interventions simples mais aux résultats bien réels. De fait, il m'est difficile de cerner exactement les sentiments qu'elles évoquent, mais il s'agit de quelque chose situé entre angoisse, solennité empreinte de grotesque et grandeur.. quoi qu'il en soit, cette touche d'originalité est franchement appréciable, et apporte beaucoup à l'album sans compromettre sa radicalité.
Concluons en se posant la question de la longueur de l'album, légèrement évoquée plus haut. Disons le franchement, d'un point de vue strictement musical le second CD n'est en soi pas indispensable car, si il n'est en aucun cas marqué par une baisse d'intensité ou de qualité, il n'apporte pas réellement quelque chose en plus à l'enregistrement. Et pourtant, l'aspect démesuré et excessif de la démarche a son charme, et cadre parfaitement avec tous les élèments évoqués plus haut. Un album cohérent jusqu'au bout donc, mais surtout un album qui, à défaut d'être un chef d’œuvre, sait combiner efficacité, ambiance et personnalité, à recommander donc..
Tu m'as intriguée avec la présence de violoncelle, les groupes arabes ont une façon toute particulière de l'employer dans leur musique (je pense à Kimaera ou Chalice Of Doom).
D'ailleurs, y'a-t-il des éléments arabisants dans l'album? au niveau du chant, des mélodies, du clavier ou autre?
Après cette démarche cadre bien avec l'identité générale de l'album (d'où l'aspect cohérent de mon point de vue), mais c'est pas pour autant qu'elle est indispensable à cette dernière.
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