Depuis deux décennies déjà, et en dépit d'une évolution en dents de scie, nombre de formations étant prématurément sorties du circuit, la scène metal symphonique à chant féminin mexicaine s'est chaque année enrichie de nouveaux talents. Ainsi, après
Anabantha,
Fortaleza,
Nostra Morte, Elitania, il est des combos souhaitant à leur tour s'illustrer dans ce si concurrentiel espace metal, dont ce jeune quintet issu de la capitale mexicaine. Pour ce faire, le compositeur et claviériste Ray Zap et ses acolytes – la frontwoman Claudia Pearl (Lacrimacorpus Dissolvent, ex-
Dark And Poetry), les guitaristes Jorge Romero et Luis Huerta, et le bassiste Erik Martinez – nous octroient tout de go un premier album full length répondant au nom de « Melodies of
Darkness » ; auto-production modeste de ses 32 minutes où ne s'enchaînent guère plus de 9 pistes mais s'écartant souvent des sentiers battus...
Témoignant d'un persistant sur-mixage de l'instrumentation et de finitions encore lacunaires, cette rondelle recèle cependant une prégnante dynamique rythmique, une technicité doublée d'une cohésion instrumentale de bonne facture, ainsi qu'une chatoyante touche latina. Faisant la part belle aux parties orchestrales et aux choeurs samplés au détriment des lignes de chant, s'éloignant par là-même des standards de ce registre metal, le collectif sud-américain nous projette au cœur d'un rock'n'metal symphonico-progressif aux relents opératiques à la fois complexe, énigmatique et enivrant. Aussi, une heureuse conjugaison de sources d'influence imprègne la plupart des compositions de l'opus, des arrangements et cheminements mélodiques typiquement nightwishiens cohabitant avec une architecture instrumentale et des chapelets d'harmoniques calqués sur
Dream Theater,
Symphony X et consorts. Mais entrons sans plus attendre dans la petite goélette...
Si le bal s'ouvre classiquement sur un laconique instrumental rock'n'metal symphonique dans le sillage de
Nightwish, à l'image de « Into the Unknown », bien d'autres pistes de même nature ne sauraient s'y réduire exclusivement. D'une part, l'échevelant « March of the Souls » tout comme le vitaminé «
Dark Assembly » se nourrissent, quant à eux, d'amples ponts technicistes où de sémillants gimmicks guitaristiques sont au corps à corps avec d'inaliénables rampes synthétiques, et ce, pour un résultat soufflant de brio. Bref, deux efforts power symphonico-progressif en l'âme susceptibles de nous retenir plus que de raison, et que n'aurait nullement reniés
Symphony X. Dans cette lignée, on retiendra également l'inaltérable tonicité percussive et les fines variations rythmiques exhalant des offensifs « Melody of
Darkness » et « Smashing Strings », ou encore le bref mais puissant et charismatique up tempo «
Heart Catharsis » pour son vibrant solo aux claviers corroboré par une enveloppante muraille de choeurs. Si l'oeuvre semble essentiellement s'orienter vers d'orchestraux rivages, elle nous réserve néanmoins de grisantes pièces oralisées.
Dans une visée metal symphonique plus conventionnelle, nos gladiateurs nous livrent également de truculents instants, aptes à aspirer le tympan sans avoir à forcer le trait. Ainsi, on restera suspendu aux lèvres de la belle sur l'opératique et fringant up tempo «
Fight Forever (Instrumental
War) » dont la filiation avec un
Nightwish des premiers émois ne saurait être démentie. Calé sur une ligne mélodique des plus immersives, ce magmatique effort se dote parallèlement d'un fin legato à la lead guitare, de délicats arpèges au clavecin et de choeurs judicieusement positionnés sur notre parcours. Dans cette mouvance s'inscrit le ''xandrien'' « Towards
Destiny » qui, sous l'impact de ses riffs en tirs en rafale et ses vibrants soli au synthé, ne ratera pas davantage sa cible. Moins enfiévré et dans l'ombre de
Dream Theater, « The Phrygian », pour sa part, n'en recèle pas moins moult effets de contrastes rythmiques doublés de sémillantes rampes synthétiques. Corroboré par d'hispanisantes gammes au piano, dans la veine de
Fortaleza, le convoi orchestral tend à s'épaissir, et parfois se plaît à nous bringuebaler, comme pour mieux nous retenir, in fine.
Evoluant à contre-courant de nombre de ses pairs, et conscient d'avoir pris quelques risques en s'y engageant, le groupe mexicain a affûté sa technicité instrumentale tout comme ses séries d'accords, témoignant par là-même d'un réel potentiel et d'un zeste d'originalité. Si l'on regrettera une ingénierie du son encore flottante et une succession de titres qui, peu ou prou, tendraient à être calqués sur un même modus operandi, force est d'observer que tant la chatoyante atmosphère que la fluidité des sentes mélodiques qui s'y dégagent confèrent à ce premier effort tout son caractère et une identité artistique déjà affirmée. Néanmoins, on aurait souhaité des exercices de style plus variés, des joutes oratoires plus diversifiées, et des sources d'influence un poil moins infiltrées que ce n'est le cas. Mais le combo mexicain a bien le temps de rectifier le tir pour nous livrer, espérons-le, un second méfait plus abouti et surtout moins emprunté. A bon entendeur...
Note : 13,5/20
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