Six ans de silence radio envolés déjà depuis son introductif et ensorcelant EP, «
Ethereal Storms »... Une éternité pour la fanbase du combo néerlandais ! Mais ce serait ignorer que, depuis ses balbutiements, ce dernier avait déjà fait montre d'une extrême prudence avant de se lancer dans l'arène : cofondé en 2014 à Hoofddorp, en Hollande-du-Nord, sous l'impulsion commune de l'auteure, interprète principale et bassiste Sascha van der Meer (ex-
Cold Embrace) et du compositeur, lead guitariste et grunter Iwan IJsbrandij (ex-
Cold Embrace, ex-Raiser), alors rapidement rejoints par le batteur Ralf Ijsbrandij, le collectif ne sera au grand complet qu'en 2015, avec l'intronisation de la violoniste Silvana Jirka (ex-Endymæria) et du claviériste Frank Timmerman (ex-
Beyond Existence). De cette étroite collaboration naîtra l'EP sus-cité, et ce, pas moins de deux ans plus tard !
S'ensuivra une longue période de latence que la réalisation de trois singles («
Raven's Call », «
Immeasurable Fog » et «
Grows Then Dies », successivement) interrompra. Trois pistes que l'équipage de la précédente traversée intégrera dans le corpus de son tout premier et présent album full length, sobrement intitulé «
Lunar » ; une auto-production tissée de ses 10 pistes, égrainées sur un ruban auditif généreux de ses quelque 55 minutes. Ce set de partitions constituerait-il une armure suffisamment solide pour permettre au collectif batave de se jouer de l'âpre concurrence dont le registre folk symphonique à chant féminin continue de faire l'objet ? Serait-il en mesure de porter dès lors nos cinq belligérants parmi les valeurs montantes de cet espace metal ?
Pour mieux situer l'univers dans lequel évoluent nos cinq acolytes, un petit tour du propriétaire s'impose. Conformément à ses aspirations premières, son projet s'articule sur un rock'n'metal folk symphonique aux colorations celtiques et pagan, où s'entremêlent des sources d'influence aussi éclectiques que
Xandria (première mouture),
Lyriel,
Eluveitie,
Korpiklaani,
Elane,
Midnattsol,
Savn,
Faun et The Cranberries, la touche personnelle en prime. Une œuvre à la fois délicieusement enivrante, racée, empreinte d'une jovialité communicative et de délicatesse, et témoignant de lignes mélodiques éminemment enveloppantes mais nullement sirupeuses doublées d'une technicité instrumentale affûtée attend celui qui y plongera le pavillon.
C'est désormais une production d'ensemble coulée dans le bronze que nous octroie l'inspiré quintet. A l'instar de
Kingfisher Sky et de
Pandora's Key, l'opulent opus jouit d'un mix parfaitement ajusté, dispensé par la pluri-instrumentiste Fieke van den Hurk (Tvinna, guest chez
Leaves' Eyes et
Kingfisher Sky), au Dearworld Studio. Pour mettre les petits plats dans les grands, le mastering, pour sa part, relève de la patte experte du propriétaire du
Amsterdam Mastering, Darius van Helfteren (
Epica,
Ex Libris,
Mayan,
Scorpions,
The Gathering,
Xandria,
Within Temptation...). En découlent des finitions passées au crible ainsi qu'une belle profondeur de champ acoustique, qui, précisément, manquait au précédent effort. Il ne nous reste plus qu'à lever l'ancre et suivre nos cinq flibustiers dans leurs aventures...
A l'image de son devancier, c'est à la lueur de ses pistes les plus vitaminées que ce méfait marquera ses premiers points, et non des moindres. Ainsi, l'accroche s'effectuera d'un claquement de doigts sous l'impact des grisants arpèges d'accords jaillissant des entrailles de «
Raven's Call », up tempo folk symphonique à la confluence de
Savn,
Xandria et
Eluveitie ; mis en exergue par les magnétiques inflexions de la sirène, recelant un pont techniciste judicieusement positionné et des plus avenants, et assorti d'un virevoltant coup d'archet, le ''tubesque'' manifeste poussera assurément à une remise en selle sitôt l'ultime mesure envolée. Dans cette dynamique, on ne saurait davantage éluder ni l'entraînant « Moonlit Fields », eu égard à son tempérament enjoué et à son refrain immersif qu'encensent les poignantes oscillations de la belle, ni le mid/up tempo syncopé « Moonblind », au regard de ses riffs saccadés, de son fringant solo de guitare et de ses enchaînements intra piste ultra sécurisés. Et comment ne pas se voir transporté au-delà du plancher des vaches sous l'impact des vibes enchanteresses générées par l'énergisant «
Grows Then Dies » ? Assorti de délicats arpèges au piano, corroboré d'un violon satiné et surmonté, à son tour, d'un prégnant solo de guitare, ce rayonnant up tempo à mi-chemin entre
Midnattsol,
Xandria et
Lyriel s'apparenterait, lui, à un véritable hit en puissance, que l'on ne quittera que pour mieux y revenir.
Lorsque la cadence du propos se fait plus mesurée, le combo trouve à nouveau matière à nous retenir plus que de raison. Ce qu'atteste, en premier lieu, « Nature's Blessing », mid tempo folk symphonique au carrefour entre
Lyriel,
Elane et The Cranberries, au regard de l'infiltrant cheminement d'harmoniques qu'il nous invite à suivre ; s'écoulant le long d'une radieuse rivière mélodique qu'empruntent les troublantes impulsions de la déesse et recelant un flamboyant solo de guitare, les quelque
6:33 minutes de la fresque glisseront avec célérité dans nos tympans alanguis. Dans cette mouvance, tant les célestes ondulations d'un violon mélancolique que le seyant paysage de notes au sein duquel il nous plonge nous pousseront à aller au terme des 6:15 minutes de la traversée de l'atmosphérique mid tempo « Bind the
Circle ». Calé sur le schéma oratoire de la Belle et la Bête, et non sans rappeler simultanément
Savn,
Midnattsol et
Xandria, le félin « Rivers of Light » nous gratifie, lui, de couplets finement ciselés, relayés chacun d'un fondant refrain. Et la sauce prend, là encore, sans tarder. Enfin, on sera non moins happé par l'onde vibratoire émanant de l'''eluveitien'' mid tempo syncopé « Wrath of the Sea » ; au sensuel solo échappé d'un violon libertaire à mi-morceau de contribuer à magnifier la truculente offrande.
Sur un même modus operandi, la troupe a, par ailleurs, misé quelques espoirs de l'emporter à l'aune d'un élargissement du champ des possibles stylistiques. Bien lui en a pris. Aussi, évoluant dans une ambiance résolument roots, dans la veine coalisée d'
Elane,
Eluveitie et
Faun, le low/mid tempo «
Ode to the
Forest » interpelle tant par les hypnotiques séries de notes déversées, sur lesquelles se greffent les angéliques volutes de la belle comme les growls ombrageux de son comparse, que par la soudaineté de la montée en régime de son corps orchestral à mi-morceau. Sans doute l'une des pépites de la galette.
Quand les lumières se font plus tamisées, nos compères en viennent à nous adresser leurs mots bleus les plus sensibles, non sans générer la petite larme au coin de l'œil. Ce qu'illustre «
Immeasurable Fog », ballade folk progressive pétrie d'élégance, que n'auraient sans doute reniée ni
Xandria ni
Lyriel. Doté d'une sente mélodique des plus enveloppantes, sur laquelle semblent danser les cristallines modulations de la maîtresse de cérémonie, et jouissant à la fois d'une insoupçonnée et grisante densification du dispositif instrumental et d'un fin legato à la lead guitare, l'instant privilégié pourrait bien faire plier l'échine aux âmes les plus rétives au moment même où les attentes de l'aficionado du genre intimiste se verront comblées.
A l'issue d'un parcours aussi palpitant qu'enivrant au cœur duquel nous plonge cet absorbant propos, un doux sentiment de plénitude nous étreint. Ce faisant, le combo néerlandais confirme à la fois le potentiel technique et l'inspiration mélodique pressentis à l'écoute de «
Ethereal Storms ». Tout comme son devancier, le pléthorique méfait varie à ses phases rythmiques à l'envi ; en revanche, tant l'atmosphère que les lignes de chant apparaissent quelque peu stéréotypées. Quelques prises de risques consenties doublées d'une identité artistique en voie de consolidation, de paroles au trait de plume affiné et d'une ingénierie du son de fort bonne facture font toutefois comprendre que le collectif batave a élevé ses exigences propres d'un cran depuis son dernier arrivage. Aussi, à l'aune de ce , le talentueux quintet aurait une belle carte à jouer pour s'imposer parmi ses alter egos et rejoindre dès lors les valeurs montantes du metal folk symphonique à chant féminin. Pour une première incursion en terre d'abondance...
Merci pour le compliment, Jo! En effet, encore une belle surprise en cette fin d'année que ce magistral album d'un groupe aux multiples talents, qui pourrait bien faire parler de lui d'ici peu! Cela faisait longtemps que je ne m'étais plus plongé dans le folk symphonique, et cette délectable offrande m'a remis le pied à l'étrier, comme on dit.
Il est vrai que le cru 2023 en metal symphonique et assimilés a été particulièrement riche en sorties d'albums de qualité. Mais l'année n'est pas encore terminée... Donc, attention aux finances! Maintenant, Noël n'est plus très loin, l'occasion peut-être de se faire offrir quelques incontournables du genre!
Je dois t'avouer que tu es un peu sorti des sentiers battu avec le Folk, mais pour avoir écouté cet opus, cela reste très stylé symphonique grâce à la voix de la chanteuse et du fond musical!
Au vu de tes futures découvertes annoncées, je compte bien demander une contribution financière pour cette fin d'année afin de réussir à "compléter" ma collection.
En tout cas, encore merci pour la découverte, cet album tourne en boucle dans la voiture!
Tu as raison, on n'a pas trop l'habitude de me voir chroniquer des albums de folk, et pourtant, c'est un style qui me plaît aussi, et depuis longtemps. Maintenant, depuis qu'Alone se fait plus discret sur le site, cela fait pas mal de temps que je ne vois plus d'albums chroniqués dans le genre. Donc, je me suis dit, pourquoi pas, tant que ça reste proche du symphonique. Si tu aimes également le folk et que certains albums de groupes que tu connais t'ont marqué, tu peux aussi essayer d'en dire quelques mots. A bon entendeur...
Oh il y a quelques groupes de Folk que j'aime! C'est un genre que j'écoute mais très limité! Il faut que ça accroche à mes oreilles! Certains groupes de Folk me laissent totalement transparent!
Cest vrai que Alone est aux abonnés absents depuis quelques années! C'est dommage c'était un chroniqueur que j'appréciais! Ses petites piques me faisaient rire!
Je tiendrai compte de ta notation! Il faudrait que je regarde quels albums n'ont pas de chronique dans ce genre! Si c'est un groupe qui me plait et si je peux aider pourquoi pas! Je pense que le dernier que j'ai fais dans ce style c'est Eluveitie!
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