Mine de rien, malgré cette pochette au talent artistique discutable et un taux de popularité qui frise le zéro absolu, vous voici devant l'un des fleurons de la scène thrash australienne et l'un des dignes représentants de ce que le thrash technique peut proposer de plus riche. Si après cette alléchante mise en bouche, vous désirez en savoir plus sur ce groupe, il vous faudra étancher votre curiosité autrement, car l'anonymat dans lequel baigne les thrashers d'Adelaide est profond au point qu'aucune voie d'information n'a atteint ces abysses...
Doté d'un son atypique et d'un Peter Cummins au chant si caractéristique, voix claire mélodieuse plus proche de la puissance heavy que des hauteurs du power (bien que les premières secondes de "Take All" puissent laisser penser le contraire) tout en gardant une impressionnante marge de manœuvre pour varier les tonalités, "
Lost" est un album difficilement comparable. La seule analogie qui souffrirait de moins de contestation possible le ferait à mon sens converger vers les suédois d'
Hexenhaus, à préciser vers la période du très envolé "
Awakening"concernant le chant mais plus orienté "A Tribute to
Insanity" concernant la teneur des riffs. Le problème est que, si vous n'êtes pas intrinsèquement amateur de thrash technique, pas sûr que vous soyez plus avancés avec ces références pourtant mémorables.
Bezerker, c'est donc du thrash technique mélodique qui ne se préoccupe pas de lorgner avec les extrêmes, quelles qu'elles soient. Malgré de très rares maladresses (plus que d'erreurs) comme dans certains plans trop appuyés de "I
Lost", les australiens ne se perdent pas en chemin. Cette modestie et ainsi cette accessibilité en font un album audible par toute personne familière avec les particularités "frappantes" du thrash.
Bezerker travaille avec un nombre de séquences plus ou moins différentes entre-elles et sur ce, les variations par titre de l'une à l'autre de ces séquences sont présentes de manière plus conséquente que la moyenne, sans pour autant que ces enchaînements ne soient réalisés subrepticement. La transition, souvent plus mid-tempo (bien que pas toujours), limite ballade même quand passent les interludes de "The Finest Cut" ou bien de "
Fall", nous tenant en haleine avant la prochaine vague comme le démontre un titre comme "
Halloween", est de rigueur et fait partie intégrante de la structure des morceaux. Cela pourrait faire penser à une démarche progressiste, mais au vu de l'intensité condensée dans ces titres assez courts, une telle affirmation reste quand même à relativiser, bien que la longue montée en puissance phare de "
Dawn Of
The Dead" par degrés d'intensité successifs puisse servir de jurisprudence.
L'album semble aller progressivement vers de plus en plus de technique car là où au début, les refrains composés de répétitions de messages simples et courts comme dans "Yours Subliminally" gardaient un aspect encore très direct; le batteur Shaun Whitelum assurant presque à lui seul l'aspect purement technique (cf le solo final de "Take All" ou encore les rythmiques complexes de "Against The
Grain"); cela vient au fur et à mesure par s'estomper. Alors des vagues de séquences tout aussi déconstruites que réglées comme du papier à musique à l'efficacité ainsi que de paroles plus spontanés, telles les complaintes hurlées de "
Fall" ou les faux refrains du finish "
The Kill", prennent le relais.
Malgré son indéniable qualité, la production aurait gagné à intégrer plus de profondeur, bien que je comprenne et ne peut blâmer le sacrifice consenti pour conserver intact l'impact mélodique de l'opus, tout autant que je regrette le compromis idéal qui aurait pu définitivement faire rentrer ce "
Lost" dans une sphère d'excellence.
Pourtant pas si inabordable que cela même pour des oreilles profanes au thrash technique, Bezerker reste une perle perdue noyée dans la richesse metallique de la transition stratégique entre les 80's et 90's. Cet album qui au final ne portera jamais aussi bien son nom n'en reste pas moins un album très agréable à écouter et même enrichissant à décortiquer sous tous les angles, qu'il convient de mettre entre toutes les mains!
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