L'année 1988 est folle:
Candlemass révèle davantage son énorme potentiel,
Bathory amorce son virage viking metal avec son "
Blood Fire Death", Europe squatte toutes les télés et
Helloween éclaire son speed metal de grandioses mélodies que l'on appellera bientôt power metal "à l'européen". Dans ce contexte, difficile pour un obscur groupe de metal chrétien du Kentucky de venir s'imposer sur ces scènes en ébullition. Le speed/thrash est roi, le death se prépare à exploser et le black est encore "true". La scène britannique s'essouffle un peu et leurs cousins d'outre-Atlantique imposent encore pour peu de temps leur brushing sur la bande FM. Bref, c'est une époque de transition et justement
Bride se cherche aussi.
Evidemment, la scène white metal de l'époque est assez réduite, sortie de la tornade jaune et noire nommée
Stryper. La tendance est d'autant plus portée sur un heavy metal traditionnel (
Bloodgood,
Sacred Warrior,
Barren Cross). Pourtant, après le très bon opus "
Show No Mercy" nous ayant livré un heavy metal US de bonne facture,
Bride cherche à se renouveler en renforçant son potentiel puissance. Et c'est avec l'album "
Live to Die" que les p'tits gars du Kentucky vont exploser dans le milieu white metal au point de devenir une référence encore aujourd'hui. Le groupe nous distille une sauvagerie loin du "hair metal" dans l'air du temps. Le quintet aura plus en commun avec le
Savatage du début de carrière que du
Def Leppard arrivé à son top. Clairement, "
Live to Die" se démarque par sa rapidité, son impact et son esprit épique. Le son est chaleureux, lourd et puissant tout en nous communicant son énergie fougueuse. Il est évident que "
Live to Die" a un son plus ample que leur premier album et les revues spécialisées de l'époque soulignent que "
Bride Rocks very, very hard". Le groupe va ainsi muter vers un speed metal mélodique et très lourd, du "true" power metal en quelque sorte.
Toujours affilié au modeste et regretté label Pur
Metal (qui a lancé
Whitecross,
Messiah Prophet ou
Light Force en son temps),
Bride lui restera fidèle jusqu'à "
Snakes in the Playground". Fatalement, les moyens restent limités, proposant une production certes très chaleureuse mais dans le prolongement d'un "
Show No Mercy" brouillon.
Pourtant le niveau des musiciens est monté d'un cran. Chanteur et surtout leader du groupe, Dale
Thompson réalise ici ce qui restera sa meilleure prestation.
Intense, agressive, voire malsaine, sa voix rocailleuse sait varier les registres tout en révélant une puissance que l'on ne lui retrouvera plus par la suite. Souvent haut perchée, elle se maintient à des niveaux incroyablement aigus pour le timbre de Dale
Thompson ("Heroes", "Here comes
The Bride"). Bien que ce brailleur nous en mette plein les oreilles, il est capable de proposer des performances plus posées comme sur "In The
Dark".
Les guitares certes typiques de l'époque demeurent affûtées, précises et l'énergie qui s'en dégage est contagieuse. Les solos sont bien cinglants et ils fortifient ce sentiment d'exaltation animant cette cadence infernale. Les deux guitares assurent le même jeu excepté pour les solos, certes trop rares à mon goût mais toujours bien réalisés dans la tradition néoclassique "Malmsteenienne".
Dès le premier morceau "
Metal Might", on sait que ça va cogner dur. Adepte de la grosse caisse en masse, Stephan Rolland montre derrière ses fûts qu'il sait s'en servir. Son collègue bassiste Franck Partipillo et lui vont donner de leur personne pour une coordination parfaite donnant corps à la musique du groupe. Au final, la batterie semble bien plus lourde que rapide même si sa transcription reste un peu trop claire pour moi. La basse, très présente tout au long de la galette, se fait remarquer pour sa grande technicité. L'opus démarre réellement avec le fameux hymne "
Hell No", heavy à souhait, très entraînant, qui en concert s'exprime pleinement ("En Enfer, nous n'irons pas!"), un morceau qui fleure bon les années 80. Même si la vitesse s'est donc accentuée, le heavy traditionnel n'est pas oublié ("In The
Dark", "
707 Of
Blood", "Whiskey Seed"), morceaux aux racines très bluezy où la basse peut s'épanouir. Mais les grands moments de l'album restent à venir. Comme si ça ne suffisait pas,
Bride continue de nous en mettre plein les oreilles. A commencer par le titre éponyme très speed metal "
Live to Die", délicieux délire métallique tout comme "
Fire And Brimstone" au solo de guitare typique et surtout l'implacable "Here Comes
The Bride" au débit syncopé, à la batterie infernale, à la basse assommante mais aussi ultra technique comme plus tard sur "Heroes". Et
Bride ne nous laisse pas respirer en nous offrant pour finir magistralement cette seconde offrande, leur chef d'oeuvre épique, "Heroes". Et là le combo taquine le divin. Une voix sombre associée aux seuls claviers perceptibles sur cet album, débouchent sur des percussions lourdes. Les guitares galopent telle une chevauchée fantastique sur fond du couple grosse caisse/basse. Et que dire de la voix suraiguë de Dale
Thompson sur la fin ? Un morceau monumental qui donne envie de partir brutaliser de l'orque.
"
Live to Die" est certainement l'un des meilleurs albums de l'année 1988 et pourtant si méconnu. Avec seulement 35 minutes,
Bride va nous pondre un grand classique du white metal, le hissant tout en haut de l'affiche. Cet album marque aussi une transition salutaire vers un heavy speed très musclé, qui va franchement révéler tout le potentiel de ce groupe. Attachant, infiniment dynamique, le concept se poursuivra avec "
Silence Is Madness" mais en moins viscéral.
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