Nouvel entrant dans l'espace metal symphonique, Eterea se présente tel un duo italien au parcours singulier, unissant les claires empreintes vocales de Monica Marozzi et de Steffano Corradini : séduit par plusieurs de leurs prestations, Giacomo Voli, l'actuel chanteur de
Rhapsody Of Fire, contactera nos deux acolytes en 2018, avec une proposition de performance chorale à la clé. De fil en aiguille, aux fins d'un minutieux travail en studio et avec le concours d'artistes de renom, le combo réalisera, quelque cinq années plus tard, son premier album studio, «
Legend », une auto-production totalisant 10 pistes égrainées sur un ruban auditif de 44 optimales minutes. Quelles seraient alors les atouts esthétiques et techniques de cette fraîche rondelle pour espérer voir nos acolytes se frayer un passage dans le foisonnant environnement metal symphonique à chant mixte ? Un nouvel espoir de ce registre serait-il en train de naître à l'aune de cette introductive livraison ?
Ce faisant, nos compères évoluent dans un rock'n'metal mélodico-symphonique aux colorations cinématique, progressif, power et folk, dans la veine coalisée de
Nightwish,
Visions Of Atlantis,
Xandria,
Leaves' Eyes,
Sleeping Romance.
Stream Of Passion et
Therion. Dans ce dessein, et comme précisé ci-dessus, le duo a requis les précieux apports de musiciens et vocalistes aguerris, dont : Giacomo Voli aux choeurs ; Gianmarco Bambini (
Winterage,
Altair,
Rising Dark) et Michele ''Dr. Viossy'' Vioni (Mister
Pig, membre live chez
Vivaldi Metal Project, guest chez Embrace Of Souls...) aux guitares ; Davide Scuteri (Embrace Of Souls, Ravenword, Choirs Of Veritas...) aux claviers ; Cesare Ferrari (Ravenword, Choirs Of Veritas, ex-Cyrax) à la basse ; Michele Olmi (Chronosfear, Ravenword...) à la batterie ; Gabriele Boschi (
Winterage) au violon. Un prestigieux parterre d'invités, s'il en est, qui a pour corolaire une production d'ensemble de bonne facture doublée d'un artwork finement esquissé.
En effet, co-mixé et mastérisé par les pluri-instrumentistes et vocalistes Simone Mularoni (
DGM) – au
Domination Studio – et Alessandro Del Vecchio (
Edge Of Forever,
Jorn,
Sunstorm...) – au Ivorytears Music Works Studio – et par le guitariste Roberto Priori (
Danger Zone) – au Pri Studio –, ce set de compositions n'accuse pas l'once d'une sonorité résiduelle tout en octroyant une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation. Pour mettre les petits plats dans les grands, le groupe a confié l'artwork de la jaquette d'inspiration néo-romantique et au trait affiné à Roberta Cavalleri, prolifique graphiste digitale italienne (Chronosfear,
Aevum, Embrace Of Souls, Constraint,
Spellblast...). Mais embarquons plutôt à bord du vaisseau amiral, en quête de quelques terres d'abondance...
C'est sur une mer d'huile que démarre notre traversée, à l'instar du titre éponyme de l'opus. Ainsi, «
Legend » se pose telle une pièce instrumentale symphonico-cinématique et progressive aux arrangements ''nightwishiens'', digne d'un générique d'une grande production hollywoodienne ; sous-tendue par d'ondoyantes rampes synthétiques, jalonnée par de puissants roulements de tambour et de "siréniennes" incantations, et couronnée d'une saisissante montée en régime du corps orchestral, elle-même surmontée d'un flamboyant solo de guitare, cette entame, au demeurant, classique, n'en est pas moins annonciatrice de la couleur des intentions de nos acolytes...
Quand la mer se fait plus houleuse, c'est sans encombre que nos flibustiers parviennent à maintenir le cap, nous entraînant alors bien souvent dans leur sillage. Ce qu'atteste, tout d'abord, « Oraion », effort power symphonique bien cadencé et au martelant tapping, à la croisée des chemins entre de
Stream Of Passion et
Therion. Voguant sur une sente mélodique éminemment enivrante qu'emprunte un duo bien habité, conservant parallèlement de saillants coups d'olives, et agrémenté d'un coup d'archet libertaire et des plus liants, ce ''tubesque'' mouvement générera à n'en pas douter un headbang bien senti et quasi ininterrompu. Dans cette dynamique, on retiendra non moins les ''xandriens'' up tempi « The Last
Dragon » et «
Waterland », tant pour leur énergie aisément communicative et leurs sémillantes séries d'accords que pour leur pont techniciste bien amené et investi d'enveloppantes nappes de claviers doublées, dans les deux cas, d'un bref mais seyant solo de guitare, signé Michele Vioni. Enfin, non sans rappeler
Visions Of Atlantis, le pulsionnel et engageant « The Valley of the
King » happera le pavillon du chaland par son entêtant refrain magnifié par les poignantes envolées lyriques de la sirène. Mais le magicien aurait encore d'autres tours dans sa manche, et des meilleurs...
Variant parfois ses phases rythmiques à l'envi, la troupe trouve à nouveau les clés pour nous retenir plus que de raison. Ce à quoi nous sensibilise, en premier lieu, « Calypso
Lullaby », mid/up tempo symphonique à la coloration celtique, au carrefour entre
Visions Of Atlantis et
Leaves' Eyes ; infiltré par les stridulations d'un flutiau gracile, pourvu d'un refrain immersif à souhait, et mis en exergue par un duo en parfaite symbiose auquel s'adjoint en arrière-fond la chatoyante empreinte vocale de Giacomo Voli, ce rayonnant et jovial élan ne se quittera qu'à regret. Dans une même énergie, on pourra non moins opter pour « Elation and
Glory », mid/up tempo syncopé à la confluence de
Nightwish et
Visions Of Atlantis. Disséminant d'insoupçonnées mais opportunes accélérations, le solaire effort se fait tour à tour langoureux et étourdissant ; essaimant un truculent riffing sur lequel se calent les troublantes inflexions des deux vocalistes patentés, ce hit en puissance poussera assurément le chaland à une remise en selle sitôt l'ultime mesure envolée. Mais là n'est pas l'argument ultime de nos acolytes pour nous faire plier l'échine...
Lorsque les lumières se font plus tamisées, toute tension s'évanouira d'un coup d'un seul, nos compères en profitant alors pour nous adresser leurs mots bleus les plus sensibles. Ce qu'illustre, d'une part, « You Are My
Angel », ballade romantique jusqu'au bout des ongles et aux airs d'un slow qui emballe, que n'auraient sans doute reniée ni
Visions Of Atlantis ni
Xandria. Sous-tendu par des arpèges pianistiques d'une confondante délicatesse, glissant le long d'une radieuse rivière mélodique sur laquelle se greffent les cristallines patines de la déesse, et se chargeant graduellement en émotion au fil de sa progression, l'instant privilégié ne saurait être éludé par l'aficionado de moments intimistes. Difficile également de contenir la petite larme au coin de l'oeil sous l'impact des vibes enchanteresses exhalant des entrailles des deux ballades atmosphériques « I Wanna
Cry All My Tears » et « You Came
Home » ; toutes deux magnifiées, là encore, par les angéliques volutes de la maîtresse de cérémonie, couplets finement ciselés et refrains catchy glisseront avec célérité dans nos tympans alanguis.
Au final, le duo italien nous immerge au sein d'un propos à la fois enjoué, solaire, romanesque et d'une redoutable efficacité mélodique. Bénéficiant d'une ingénierie du son coulée dans le bronze, diversifiant son message musical sur les plans atmosphérique et rythmique, et jouissant de l'apport d'artistes aguerris, ce premier élan offre une traversée des plus agréables et sans escale précipitée. Afin de retenir plus sûrement encore le féru du genre, il conviendrait encore que nos acolytes inscrivent l'une ou l'autre fresque ainsi que quelques prises de risques dans le cahier des charges. De relatives carences qu'une technicité instrumentale et vocale parfaitement maîtrisée et des d'arrangements aux petits oignons peuvent partiellement compenser. Quoi qu'il en soit, le combo transalpin détiendrait le sésame pour espérer dès lors rejoindre les sérieux espoirs de cet espace metal. Bref, une ogive à longue portée aux effets dévastateurs en guise de message de bienvenue...
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