Helheim est entré en 2019 dans le club des groupes ayant atteint le cap symbolique des 10 albums. Concernant nos guerriers à cotte de mailles, je dirais que cela force d'autant plus le respect que ce bel effort de régularité n'est pas récompensé par une grande notoriété, simplement un succès d'estime... Tout le monde connait le flamboyant parcours de
Dimmu Borgir qui a commencé à la même époque, même
Taake, groupe plus récent qu'Helheim, rassemble bien plus de disciples. La faute, je dirais, en partie à des choix de labels assez malheureux à leurs débuts. Les trois labels allemands (par ordre chronologique : Solistitium, Ars Metalli et
Massacre Records), d'après les dires du groupe, n'ont pas brillé par leur travail promotionnel... La deuxième raison est qu'Helheim oeuvre dans un style un peu difficile à identifier clairement, assez changeant, insaisissable, imprévisible au fil des ans... Un groupe qui revendique une certaine liberté artistique...
Je ne me suis penché sur ce groupe que sur le tard, en 2010, en retombant sur une chronique très enthousiaste de l'album
Kaoskult (dans Metallian), sorti en 2008, qui m'a décidé à me procurer le cd, d'où mon choix de parler de ce "disque découverte". En fait, en 1995, j'avais déjà écouté d'une oreille distraite
Jormundgand mais peu apprécié ses vocaux très écorchés et un style ressemblant trop à du sous
Enslaved (à tort, j'aurais dû insister!), et sur les albums suivants, j'avais entendu parler d'une évolution assez bizarre, d'où mon retard à l'allumage, corrigé depuis, toutes mes excuses! Les deux premiers albums sont des disques de pagan black plus que corrects, je ne connais pas les deux suivants, et donc...revenons au cinquième opus,
Kaoskult.
Sur cet album, le côté pagan est sensiblement en retrait, plus suggéré par petites touches, avec quelques vocaux chantés. L'ensemble est plutôt mid tempo, contemplatif ; quelques discrets mais très réussis passages de claviers, comme cet orgue à la fin du premier morceau, "Det Norrone Alter", créent une atmosphère assez surrėaliste, que l'intrigante pochette se charge de symboliser. Le disque dégage un climat étrange, à la fois sombre et mystique, comme ce magnifique passage aérien à la fin du troisième titre, "Om Smerte og Liv". L'instrumental "Helheim 6", lui, délivre une curieuse ambiance martiale.
Rassurez vous, on parle quand même toujours de black metal, à l'image du furieux "Om Tilblivelsen av Ggapende
Tomhet" (ouf!). Fidèles à leurs habitudes, en dehors de fréquentes et envoûtantes parties chantées, nos deux inséparables comparses, V'gandr (basse) et H'grimnir (guitare), alternent de furieux vocaux black avec du chant à la limite du death metal, des cris hystériques et autres hurlements ; on ne risque pas de s'assoupir ; les barbares vikings ne sont jamais loin! Cette grande diversité de vocalises, mais c'est tout le charme d'Helheim, mon ami! L'album finit de belle manière avec "
Svart Seid" et ses très belles voix implorantes qui dégagent une intensité dramatique du meilleur effet.
Comme
Taake, Helheim est désormais fidèle, et depuis un bon moment déjà, au label norvégien
Dark Essence, et aussi et surtout au studio Conclave et à son producteur de plus en plus célèbre, le fantasque B.Nilsen (V. Industries), qui fait du très bon travail pour ces deux groupes. Aussi, les amateurs de
Kaoskult pourront acheter sans hésiter l'album suivant, tout aussi réussi et dans une veine assez proche. Quant aux disques plus récents, ils reprennent une tournure pagan un peu plus nette, à l'image de leurs deux premiers albums mais dans une approche plus subtile, voire apaisante, avec un son contemporain ; sur le dixième, il n'y a d'ailleurs même plus de vocaux black, ce qui, à mon sens, est un peu regrettable ; les premiers effets de la vieillesse sans doute... On en revient à cette identité musicale un peu brouillée d'Helheim, ce côté à la fois pagan et expérimental, difficile à "vendre" au fil des albums, pour un groupe très attaché à ses racines ancestrales, loin du folklore festif et "easy listening" de groupes comme Fintroll,
Ensiferum ou
Eluveitie.
Monter à bord du drakkar Helheim, vous voilà donc prévenus, c'est un voyage spirituel qui se mérite ; la sélection est rude, la traversée pleine d'embûches. La fameuse cotte de mailles finit par peser sur les épaules trop frêles. Frères d'armes, la décision vous appartient...
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