Avec son nom qui fait craindre un instant le Rn’B, Ö-Nirik pourrait créer un malentendu. Le metalhead un minimum cultivé relèvera quand même le tréma sur le « O »... Oui, rassurez-vous bonnes gens, ce groupe fait bien dans le metal. Formé sur les cendres d’un groupe picard splitté en 2006, Ö-Nirik joue du death metal à tendance mélodique. Après une première démo, le groupe enchaîne directement sur un premier album enregistré durant l’été 2007.
Signés par Great Dane Records, nos amis se voient ainsi l’opportunité de sortir leur première galette dès le milieu de 2008.
Si l’on est en droit de rester circonspect devant un parcours aussi rectiligne, je vous avoue sans ambages que, malgré ma réticence initiale, la première écoute m’a bluffé.
Comment ça de la réticence ?
Et oui, de nos jours, l’appellation death mélodique peut laisser augurer du pire. Il n’y a qu’à voir la palanquée de clones melodic-deatheux aux arômes synthétiques de Suède qui n’en finissent plus de nous ressortir la même rengaine insipide à coup de gros son hyper-produit. Je vous fais grâce de la nouvelle scène deathcore à tendance mélodique pour adolescents pré pubères. J'en rajoute un peu, o, est d'accord, mais tout cela pour dire qu’avec moi à la plume, Ö-Nirik ne partait sans doute pas avec le bon cheval.
Oui, les Amiénois m’ont bluffé. La raison principale est imparable : comment croire que ces jeunes gens en sont à leur premier disque ? En effet, le gros death metal bien épais qui jalonne les compos est exécuté avec une aisance étonnante. Du riff bien gras et proprement asséné, un couple rythmique basse/batterie plutôt copieux, qui n’a vraiment pas le souffle court ni la technique laborieuse, enfin un growleur plus que respectable. On peut dire la même chose de la production, avec une puissance étonnante et un remarquable équilibre du mixage, même si le rendu peut apparaître assez clinique.
Vous aurez compris d’ores et déjà qu’il ne s’agit pas de death mélodique type scandinave. De deathcore point non plus, même si par moments l’on se dit que la frontière est déjà plus proche.
En effet, dès
Carnage Of Apostates, et malgré des couplets en béton armé, la petite mauvaise surprise du refrain à la mélodie alléchante et au chant clair de circonstance vient faire craindre le pire. Heureusement, Ö-Nirik n’en fait pas trop et évite le travers irrévocable du refrain emocore à tendance mélodique, responsable de centaines de cas d’urticaires géants chez les deatheux trentenaires.
Non seulement le groupe évite –en général- ce piège trop tentant, mais il parvient avec beaucoup de finesse à insuffler ses inspirations mélodiques au sein de ses structures musclées. Le mérite en revient pour beaucoup aux gratteux, des gens fort bien élevés : on sent dans leur doigté une éducation heavy metal de bon aloi qui leur permet de négocier avec autant d’aisance le riffing agressif des parties massives et quelques envolées lyriques très élégantes pour les passages les plus mélodiques, jusqu’au feeling notoire qui se dégage des soli.
Alors bien entendu, quand au milieu d’un morceau qui me ravit par son approche melodic-brutal-death très enlevée (Dreamkeeper), reviennent ces refrains chantés, là je grogne fortement. Et oui quoi, quand on sait que des tonnes de jeunes combos plein de bonne volonté se lancent éperdument dans le brutal death sans pouvoir espérer ne serait-ce qu’un jour jouer à ce niveau, je ne peux penser qu’au gâchis. Mais c’est le parti pris du groupe, et visiblement sa couleur mélodique lui tient à cœur. Il serait assez malhonnête de ma part de leur faire un procès à ce niveau, d’autant plus que sorti de ces passages discutables, le lyrisme des compositions et l’inspiration des riffs mélodiques ne laissent pas de marbre.
Et quand l’album se finit par une prière à notre musique passionnelle à tous, Mighty Mother Music, au rythme emballant et cumulant impact et finesse, on pardonne bien vite les quelques erreurs de jeunesse qui jalonnent cet album au rendu final agréable. J'entends par là quelques constructions pas assez directes, quelques enchaînements un peu éculés et une atmosphère manquant globalement de noirceur dans les passages les plus brutaux (mais là encore c'est inhérent au genre), alors qu'elle n'est jamais dénuée d'émotion dans ses parties mélodiques.
Reste désormais pour Ö-Nirik à trouver son public. La voie choisie du death mélodique n’est sans doute pas la plus dégagée, et regorge de groupes à l’approche technique parfaite et à l’esthétique musicale irréprochable, contentant une masse de fans pas toujours très concernés par l’identité insipide de ceux-ci. Cependant, les Picards, dès leur premier rejeton, montrent déjà une personnalité plus profonde que nombre de leurs congénères, et on ne peut que recommander
Incoherence aux amateurs de death mélo moderne.
Après le chant clair dans le death metal est à manipuler avec beaucoup de prudence je trouve.
Personnellement j'apprécie tous ces passages en chant clair, mais au moins, tu ne dénigres pas leur utilisation, tu nous explique juste ne pas forcément apprécier leur utilisation. Au moins ça change des chroniqueurs qui jettent tout de suite la pierre à l'écoute de chant clair, parce que pour eux c'est pas 'true'.
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