Au 12ème et 13ème siècle, les goliards étaient des clercs itinérants dont la spécialité était l'écriture de chansons à boire et de textes satiriques (souvent licencieux). Pour la plupart originaires des grandes universités européennes, ils étaient connus pour leur manie de s'élever ouvertement contre les contradictions grandissantes au sein de l' Église à cette période.
Pas étonnant qu'un tel concept ait fini par intéresser des groupes de Black
Metal : un ukrainien vers 2004, et un colombien qui nous occupe aujourd'hui.
La scène sud-américaine n'en est plus à un paradoxe près en ce qui concerne le Black
Metal. Même si les différents groupes du cru nous ont habitués à jouer plutôt sur le côté bestial de la chose, il en existe toutefois suffisamment qui préfèrent une approche plus traditionnelle du style : on peut citer notamment les chiliens de
Horns et
Hetroertzen, ou les panaméens de
Equinoxio. Goliard est donc un groupe dont la vision musicale est toute nordique : très mélodique, avec un fort recours aux arpèges, et froide. Au travers des 8 chansons que comporte ce premier album, on trouvera des références suédoises (les murs de guitares aux riffs tranchants comme des rasoirs rappelant des groupes comme
Thy Primordial), norvégiennes (notamment les débuts de
Emperor pour le chant et l'aspect technique) et finlandaises (pour le sens de la mélodie qui fait mouche). Autre aspect qui rapproche le groupe d'un sens de la composition typiquement européen : un recours à une certaine forme de Romantisme dans les textes, qu'il s'agisse de compositions personnelles autant que dans le choix de mise en musique de poèmes d'époque (du Keats et du Rilke).
Le résultat n'apporte rien de neuf au genre, mais ne cherche en aucune manière à le faire. Le seul but ici est d'exprimer une dévotion à une certaine époque révolue du genre, et de le faire avec ses tripes. Car le point très positif de ce disque est que l'on sent à chaque instant la motivation du groupe. Goliard aurait pu n'être qu'un groupe de plus parmi des milliers qui se contentent de simplement répéter ce qui a été fait auparavant, et pourtant il s'échappe de sa musique un amour sincère du genre. Le tout renforcé par plein de petits détails qui visent juste (comme les solo de «
Iconoclast » et «
Requiem For Our Soul »), une production aux petits oignons (malgré le mur de guitares, on entend l'ensemble des instruments et du chant) et une bonne maitrise de l'anglais (chose rare chez les groupes sud-américains).
Pour un premier album, «
Iconoclastic Hymns » est une franche réussite qui rivalise sans problèmes avec bon nombre de formations européennes de la fin des années 90. Amateurs de Black
Metal froid et mélodique, je ne peux que vous conseiller de leur apporter votre soutien.
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