Auteur de seulement deux démos parues en tapinois au milieu des années 90,
Bloodstone fait parti de ces troisièmes couteaux suédois injustement occultés derrière les mastodontes d’une scène death black foisonnante ayant eu tant de succès à partir de l’année 93. Un combo discret à la durée de vie éphémère, qui aujourd’hui encore fait figure de pépite souvent oubliée pour tous les fans d’un style popularisé par
Dissection,
Necrophobic et
Unanimated. Un combo dont on peut de nouveau s’approprier la noirceur depuis les rééditions LP (
Blood Harvest – 2008) et CD (
Dark Symphonies – 2015).
Animé entre autre par Mats Wikberg aux fûts et Michael Samuelsson, son guitariste leader,
Bloodstone se forme en 91 sur les cendres de Keks, et se saigne les veines après quatre années de répétition pour réserver deux petits jours au Sunlight Studios afin d’enregistrer sa première démo composée de trois morceaux.
Branded at the Threshold of the Damned, cassette tirée à un peu plus d’une centaine d’exemplaires, sort en Mai 94, et constitue la seconde partie de la présente compilation.
A l’époque,
Bloodstone évolue encore dans un death metal en partie mélodique, bien que teinté d’une certaine aura sépulcrale. "
Vengeance From the Grave", qui par exemple rappelle un peu le death accrocheur d’un Edge of Sanity : rythmique groovy, passage mélo, accélération blastée, break acoustique et solo vertueux, ou "
Angel of
Fornication" qui possède également cette forme de sophistication primitive et qui tend presque vers le progressif tant le morceau foisonne de breaks et de reliefs, conférés par une architecture riche faite de lignes mélodiques prenantes et de relances ambiancées. Deux morceaux dépassant les sept minutes, que complète l’éponyme, plus court et doté d’un joli solo dans la plus pure tradition suédoise. Un morceau également hanté par le spectre de
Celtic Frost : un riff de guitare lourd et entêtant évoquant furieusement le "
Dethroned Emperor" des Suisses.
Sans pour autant être un échec, la prod du Sunlight pourtant menée par Tomas Skogsberg et Fred Estby (batteur de
Carnage &
Dismember) déçoit le groupe, malgré un son de guitare massif et le chant écorché de Harlotmonger bien mis en valeur. La batterie est en effet un peu noyée en arrière du mix et le tout manque d’agressivité.
L’année suivante
Bloodstone investit de nouveau le Sunlight pour la capture de quatre nouveaux morceaux. Damien
Hess remplace Harlotmonger au chant, l’ancien vocaliste session ayant décidé d’enfourcher sa bécane sans jamais plus donner de nouvelles. Comme la fois précédente, les compos sont écrites par Samuelsson et Wikberg qui ont décidé de durcir considérablement le ton. Terminé les accents mélodeath, le groupe enfonce la pédale et souhaite un son typé Morrisound, ce que Skogsberg s’efforce d’obtenir de bien mauvaise grâce (à chacun de juger).
Hour of the Gate, qui ouvre donc la compile, délivre ainsi un death black enragé à l’aura satanique où des blasts méchants de toute nature prédominent. Bien plus evil et furieuse que la première démo de 94, les guitares sont mieux enregistrées et le son, cru et raw, renforce la noirceur des compos. Cette fois on oscille dans un style à la
Necrophobic (The
Nocturnal Silence) et
Unanimated (In the
Forest of the
Dreaming Dead) qu’aurait phagocyté le black/death/thrash sale et bouillonnant de
Grotesque.
Des bourrins "
Shadow World" et "
Hour of the Gate" au satanique "Wanderer
Beyond the Mists of
Eternity", les morceaux sont souvent charpentés autour d’un riff central solide sur lequel vient se greffer breaks, accélérations blastées en mode rafales, soli frénétiques ainsi que le chant infernal de Damien
Hess, le tout ceint d’une aura noire et malsaine des plus blackisantes.
Hour of the Gate apparait comme une démo brutale, véloce et maléfique, non dénué de certaines parties catchy, mais accusant aussi parfois quelques longueurs ("
Burning Eye of
Infinity").
Une sortie prometteuse que le laxisme du combo priva malheureusement de copies cassette, si ce n’est
Burn Records, qui enthousiasmé par la maquette, proposa au groupe en 96 un CD compilant les deux démos. Une opportunité idéale pour
Bloodstone, qui se croyant chanceux, ignore alors que le tirage en sera extrêmement limité. Tellement limité qu’une poignée d’exemplaires se vendent aujourd’hui sur Discogs à plusieurs centaines d’euros. Une musique qui finalement ne circule donc pas beaucoup, la fragilité du line up empêchant de surcroît des représentations live. Ajouté à quelques déboires - éviction de leur salle de répète (pour en avoir repeint les murs de sang), départ du vocaliste et un mauvais article dans la presse spécialisée - l’affaire
Bloodstone périclite du jour au lendemain.
Aujourd’hui, il est intéressant de se replonger dans la courte discographie de ce groupe méconnu, à travers cette compilation de nouveau disponible qui a tout d’un full length, et dont les deux facettes peuvent aussi bien contenter les amateurs de mélodeath suédois que les fervents défenseurs d’un death black sale et démoniaque.
Super chro' mec ! Un petit bout de temps que je comptais me la chopper cett réédition Dark Symphonies... Ca me fait un bon rappel comme ca !
impatient de découvrir ce skeud en espérant que ça ne soit pas trop mélo death. Mais les références que tu cites ça sent merveilleusement bon. Merci pour la chro
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