Liste des groupes Rock Sudiste Blackfoot Highway Song Live

Il est 20h30 ce soir à Londres, et ça fait déjà une bonne heure que le public attend un groupe pas vraiment dans l'ère du temps, qui a traversé l'Atlantique depuis sa Floride natale dont on raconte qu'il est plus agressif qu'une colonie de serpents à sonnette, tels des Indiens échappés de leur réserve qui ont juré de ramener des scalps ; on va bien voir ce qu'ils ont dans le bide, ces Blackfoot !

Soudain le souffle d'une locomotive à vapeur accompagné de plusieurs sifflements sonnent la fin de l'attente en gare...tandis qu'un pied fébrile appuie sur la pédale de la grosse caisse en résonance avec le réveil des guitares, une voix hargneuse interpelle "OK London , let me hear you", et c'est parti pour une plongée dans le chaudron bouillant du hard rock made in Southern USA ; la motrice est lancée et rien ni personne ne peut se mettre en travers, le rouleau compresseur va tout laminer !

C'est "Gimme Gimme Gimme "qui démarre les hostilités et Rick Medlocke sort le bottleneck pour sa première intervention de slide (mais pas la dernière !) sur sa Gibson Explorer pour ce pur morceau de Rock Sudiste...le public ignore, quand Rick lance un "Good evening" à la fin du titre, qu'il va vivre sans doute le concert de sa vie ! Mais les reptiles sont sournois, ils vous jaugent, vous harcèlent avant de vous asséner le coup fatal en vous mordant à la gorge...

Dans la perfide Albion de 1982 on n'est pas trop familier avec le Rock Sudiste (en France non plus d'ailleurs !), et Blackfoot va mettre tout le monde d'accord : tu veux du hard rock jeune rosbif ? On va te montrer comment on remue une foule à Jacksonville !
Le deuxième morceau démarre par un petit solo de guitare décoché par un Rick qui harangue le public en lui promettant des sensations aux effluves de whisky et ce "Every Man Should Know", malgré un mid-tempo très appuyé, emporte l'adhésion de la foule.... avant que le brûlot "Good Morning " fasse chavirer les headbangers qui commencent à scander ce refrain avec la tête retournée par ces sorciers d'indiens, mais qu'est-ce qu'ils mettent dans leurs céréales au petit dej ? Deux mots de bienvenue ("bonjour") suffisent à faire monter la température qui jamais ne va redescendre (j'aime bien dans ce sens !) et c'est pas "Dry Country" avec le chant survolté de Rick qui va calmer le jeu..
En showman averti, il évoque son grand père et prend encore une fois le public à partie sur cette super reprise de "Rollin' and Tumblin''", mais c'est pour mieux te cueillir mon enfant : l'enchaînement avec l'arpège de" Fly Away" et j'ai les poils qui se hérissent direct, première émotion instantanée, c'est l'un de mes morceaux favoris !
On finit la reprise pour attaquer la "Road Fever" et rappeler à tous que dans le Sud, on sait aussi faire du hard rock et que les guitares sont chargées à bloc, prêtes à faire fumer les amplis...on sent que c'est la fête, on est là pour oublier ce putain de chômage, cette misère ordinaire et ces mauvais hivers ; ce "Trouble in my Mind" résonne comme une escapade dans l'Angleterre morose des 80's et le bottleneck est de retour pour une séquence de slide dantesque..

On était monté dans la locomotive dès le départ pour ce voyage infernal et soudain c'est l'entrée en gare de "Train Train" sur le rythme lancinant d'un harmonica aussitôt propulsé par une rythmique chauffée à blanc et one two three four, c'est parti !!! Dans cette motrice lancée sur les rails, j'ai l'impression d'être balloté au gré des traverses de la voie ferrée tandis que le public chante et chante encore jusqu'au final complètement jouissif, mais le terminus n'est pas encore arrivé car on sait tous que c'est pour la prochaine station...
À cet instant Rick demande au public quelle chanson il veut entendre et c'est le début de la communion, une incantation de 8'45, "Highway Song", qui démarre par sa première partie en arpège mélancolique et son premier magnifique solo joué en duo, à la tierce... là on sait qu'on se dirige tout droit vers l'enfer ..
"Are you out there?" insiste Rick et le public qui bien sûr est toujours là est prêt pour la montée en puissance, la chevauchée fantastique et 4'50 après le début du morceau, c'est l'avalanche, le raz-de-marée, le tsunami, tous les cataclysmes du monde vont déferler sur la scène dans un incroyable duel de guitares, se répondant, jouant ensemble, accélérant comme dans une vitale urgence, le Rock ça n'attend pas.... le batteur rallume infatigablement la chaudière qui menace à chaque mesure d'exploser les peaux de sa caisse claire car il est urgent de mettre le feu et dans un ultime galop où l'on pensait en avoir fini, c'est reparti pour une dernière joute à deux Gibson dans un feu d'artifice de décibels pour le bouquet final....
À ce moment précis, le public est à genoux , il vient de prendre la foudre sur le crâne et dans un dernier soubresaut Blackfoot entonne "Howay the Lads", l'hymne des supporters de Newcastle en guise de cadeau d'adieu repris en chœur par le public...

Il est 21h30 ce soir à Londres, un peu sonnés, un peu abasourdis, la sueur collée au t-shirt, les spectateurs ne sont pas près d'oublier ces cousins Indiens d'Amérique qui ont incendié la scène et retourné tout l'auditoire, dans un déluge sublime de hard rock comme on sait en faire, là bas, dans le Sud ...ici, dans votre salon, même si vous êtes si loin de cette salle de concert, vous venez d'arriver à la fin de ce Live et les "rattlesnakes rockers" vous ont bien mordu mais vous ne voulez surtout pas qu'on vous donne l'antidote....