Ah, les joies du split, ce support audio qui, alternativement, offre à de nombreuses formations underground une certaine visibilité lorsqu’elles ont la chance de partager la rondelle avec un combo plus reconnu, ou bien permet à des groupes obscurs et inconnus de sortir quelques titres au compte-goutte pour maintenir leur actualité tous les 4 mois, et ainsi contenter les 17 fans acharnés qui attendant impatiemment du neuf sur leur page Facebook…
Trêve de plaisanteries, aujourd’hui, les deux formations qui nous intéressent surgissent des méandres les plus obscures de l’underground (même si
Sourvein est bien connu des amateurs) et officient toutes deux dans le doom, avec néanmoins un style bien distinct.
Graves At Sea d’abord. Les présentations seront brèves, le groupe étant plutôt discret et peu productif. Groupe d’Arizona formé en 2002, les Ricains sortent leur premier full length en 2004 et voici leur deuxième split avec les compatriotes de
Sourvein. Voilà, il faudra se contenter de ça. Et de leur musique, si vous parvenez à vous l’encaisser. Car
Graves At Sea, c’est lourd, très très lourd.
Mariant sludge vomitif et écorché à la
Eyehategod et doom bien gras et poisseux pour deux titres de plus de 7 minutes,
Graves At Sea fout vraiment mal à l’aise, en partie à cause des vocaux vraiment dégueulasses de Nathan Misterek, aigüs et braillards, à la limite du supportable (ils varient heureusement dans des intonations un peu plus graves, ou devrais-dire moins criardes), et de ce son pachydermique qui écrase tout sur son passage. Noir, glauque, urbain, plus insidieux dans certaines décélérations à la limite de la transe tribale qui pourraient presque rappeler
Neurosis (ces guitares plus mélodiques qui se noient dans la réverb’ à partir de 6,18 minutes de Betting on Black),
Graves at Sea reste la plupart du temps vraiment extrême ( le début du second titre,
Confession, avec cette voix vraiment innommable !) avec des riffs lourds et massifs, portés par un grondement de basse en fusion, qui renvoient à Electric Wizzards.
Evidemment, le duo de
Phoenix ne révolutionnera pas grand-chose, vomissant un son mille fois entendu, mais saura séduire sans problème les amateurs du genre, proposant deux titres certes répétitifs mais particulièrement malsains, plombés et intenses.
Au tour de
Sourvein, groupe pour le coup presque culte pour les aficionados du sludge, puisque propageant la mauvaise parole depuis 1991 et ayant vu défiler en ses rangs des membres de formations émérites telles Electric
Wizzard,
Bongzilla,
Eyehategod, ou
Down entre autres.
Paradoxalement, la musique du quatuor de Wilmington est moins sombre et crue que celle de leurs homologues sudistes, le pattern de batterie entamant
Drifter rappelant immédiatement le rock pysché et heavy des 70’s, et effectivement, on nage dans une sorte de hard rock heavy stoner à la fois burné et planant, parfaitement torché, aidé par des guitares lourdes et hypnotiques juste ce qu’il faut et un T-Roy Medlin en état de grâce rappelant parfois
Ozzy Osbourne ou
Robert Plant, mais dans un registre plus granuleux et parfois plus désabusé (Follow the Light, titre de loin le plus sludge et dépressif de la partie de
Sourvein, avec ces vocaux plaintifs et écorchés et ce riff roulant et lourd). Le début d’
Equinox renvoie directement à
Black Sabbath, avec ce riff lancinant à la mélancolie communicative, les influences sont donc plus qu’assumées, mais le tout est parfaitement réalisé, et, même si peu original, fait sacrément du bien après la chape de plomb qui nous est tombée sur la gueule sur la première partie du split. Le solo à la wah wah (?) dès 1,39 minutes, complètement déconnecté du morceau, et déboulant sans crier gare, rappelle plus une expérimentation hasardeuse sous acides qu’une intervention réellement travaillée mais fait sourire et participe à cette ambiance déglinguée et redneck qui règne tout le long des trois titres de
Sourvein. Follow the Light, quant à lui, nous offre en milieu de titre un arpège de basse bien bourdonnant qui sera repris jusqu’à la fin par les gratteux, riff ultra simpliste et efficace qui tournera en boucle sur plus de 2 minutes, et sur lequel la guitare soliste viendra brièvement rugir ses notes enfumées et hallucinées.
En conclusion, on a ici un très bon split, qui, s’il ne fait pas dans l’originalité, a le mérite de nous présenter deux formations à suivre de près et au fort potentiel dans leur style respectif. A déguster de préférence avec une bière chaude ou un whisky frelaté par un bon 40° à l’ombre.
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