Certains aiment brouiller les cartes, il semble que ce soit largement le cas de
Saurus, mystérieux combo emmené par Ecclésiaste Devletian, en effet il est difficile voire impossible de catégoriser ce quatuor dans une case précise, même pour moi qui aime bien couper les cheveux en quatre et tout définir précisément au quart de poil prêt… Rien que le titre de l’album
Gisant sur les Os de Leurs Aïeux (2014) attise la curiosité, en revanche la pochette se montre carrément hideuse, mais à ce point là, ceci ne peut être que volontaire.
Les groupes d’inspiration
Death Metal exprimant des textes en français ne sont pas majoritaires et pour cause, l’exercice n’est pas sans risque, mais les risques n’ont pas l’air de faire peur à
Saurus, et sur ce coup là, on peut dire que c’est une réussite, le vocaliste
Brutal BU vocifère des lyrics travaillées, qui oscillent entre plusieurs ascendances, notamment la poésie crade de
Peste Noire, les constats pessimistes sur la nature humaine, l’évocation de personnages mythologiques, et même un côté romantisme obscène à la
Misanthrope (Une expression comme catin satanique pourrait très bien sortir de la bande à
SAS et
Moréac).
La galette sur la platine, une évidence s’impose : voici un groupe dont la musique n’est assurément pas facile à assimiler, Mamifère
Supremacy (faute d’orthographe volontaire ?) évolue d’abord dans un
Death Metal chaotique qu’on peut rapprocher en partie d’un
Kataklysm époque
Sorcery /
Temple of Knowledge, avant d’enchaîner sur un riff lancinant Black
Metal puis sur des plans saccadés plus modernes, le tout soutenu par un growl puissant (alterné avec quelques screams tout aussi efficaces). Histoire d’embrouiller un peu plus l’auditeur hésitant,
Apophis Victorieux propose des plans plus mélodiques, et aussi des passages rampants proches du
Doom, un titre qui me semble relativement narratif, ce qui n’est pas pour me déplaire : faire coller la musique aux paroles est un acte bien trop rare dans le domaine du
Metal extrême.
Pour la petite histoire, la première fois que j’ai écouté le disque, sur le passage « C’est la même guerre, une guerre sans fin », j’avais compris : « C’est l’abbé Pierre, il est sympa. », désolé…
Si on en juge par les remerciements du groupe dans le livret,
Golem est certainement un clin d’œil à une personne comptant beaucoup pour le principal compositeur Ecclésiaste, en effet ce morceau rappelle furieusement le côté « égyptien atmosphérique » de la musique de
Karl Sanders, preuve que
Saurus se nourrit d’une multitude d’influences. Je me demande d’ailleurs si ce pseudonyme de
Saurus n’a pas quelque chose à voir avec le fameux maître d’œuvre de
Nile (
Saurus / Saurian Entombment), mais ceci est une simple hypothèse.
Si je devais me hasarder à faire une comparaison avec un groupe connu concernant le titre Dieu de Souffrance, je dirais une fois de plus
Kataklysm, mais cette fois davantage époque
The Prophecy avec un côté furieux et mélodique mêlé, qui rappelle aussi
Desultory notamment.
Le Foutre Noir est à mon sens l’un des meilleurs titres de l’album, peut-être parce que c’est celui qui va le plus droit au but et sur laquelle les guitares sont le plus intenses.
Hélas, comme beaucoup de groupes ne disposant pas de moyens conséquents pour mettre en valeur leur musique, la production n’est pas à la hauteur.
Seul le chant plutôt en avant tire bien son épingle du jeu, la guitare et la basse auraient mérité une meilleure exposition, la batterie manque également de puissance à mon sens, par exemple lors des plans violents, les instruments ont tendance à se confondre et on ne distingue pas toujours ce qui se passe. D’un autre côté pour une musique aussi étrange et chaotique, ce n’est pas si choquant, je vous laisse juge.
Ce qu’on ne peut enlever à
Saurus, c’est une approche vraiment particulière au niveau musical dans cette veine
Death / Black atmosphérique et chaotique, bien malin celui qui pourra me trouver leur background musical. Si on réussi à passer outre le côté rachitique et la production,
Gisant sur les Os de Leurs Aïeux est un voyage initiatique intéressant et mouvementé, il sent la crasse de ce bas monde et n’est pas là pour vendre du rêve.
BG
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