Liste des groupes Electro Metal Shoot The Girl First Follow the Clouds

Il y a de ça deux ans les Niçois de Shoot the Girl First, évoluant sous la houlette metalcore, avaient réalisé une entrée pour le moins peu convaincante dans le milieu, au terme de leur premier EP “They Have Clocks, We Have Time”, découlant peut-être d'une volonté de bien faire, mais s'enfonçant dans des compositions très (trop) mimétiques dans le genre pour pleinement convaincre.
C'est aujourd'hui le moment pour les frenchies de lancer leur premier full-lenght, intitulé “Follow the Clouds” chez les Américains de Artery Recordings, spécialisés dans la mouvance -core 2.0 (A Bullet For Pretty Boy, For The Fallen Dreams, Attila...).

Difficile d'aborder ce nouvel album sans quelques a priori. En effet, les Shoot the Girl First ont bâti leur musique, et leur identité, sur un mouvement spécifique nommé l'électro-core, mouvement que l'on aurait pu croire informel mais dont le succès dépasse le simple statut de genre bâtard: Asking Alexandria, Crossfaith ou encore Enter Shikari sont les exemples de l'ascension du genre. Mais comme dans toute subdivision de style, on finit par très vite tourner en rond et on lorgne tout aussi rapidement vers la parodie lourdingue, propice à rassasier l'appétit gargantuesque des puristes en quête de nouveaux boucs émissaires. Des groupes ridicules comme Skip The Foreplay ou Make Me Famous ne sont en fait que les dégâts collatéraux engendrés par le génie de certains, et les dérives effectuées laissent place à des inventions toujours plus loufoques (nintendocore, crunkcore...).

Où se placent alors Shoot the Girl First? Du côté des génies ou du côté des boulets? La simplification est un brin manichéenne si bien que la vérité se trouve ailleurs, plus précisément entre ces deux extrêmes caricaturaux. Auparavant, Shoot the Girl First échouaient à convaincre de par un manque de recul vis-à-vis de la scène qui les inspirait; aujourd'hui le problème est globalement le même, bien qu'il soit moins important.
Tout comme en 2011, les Shoot the Girl First puisent leurs inspirations du côté de Asking Alexandria ou encore Abandon All Ships (pour ne citer qu'eux) en délivrant de l'electro metalcore aux velléités de post-hardcore. Le single “Give and Take” est évocateur, laissant toujours planer en arrière-plan les résonances électroniques imperturbables, souvent proches de la monotonie des riffs; impossible de ne pas citer également “A Party On Your Mother's Grave” et son intro techno vampirique, assez détonante mais qui malheureusement peine à surpasser l'effet d'annonce.

“Follow the Clouds” est l'album qui met en exergue le hiatus qui existe entre inspirations et assimilation de ces dernières. On dénote un nombre important de titres qui, sans être misérables, sont incapables de communiquer la moindre once d'émotion: le titre éponyme, derrière ses distillations atmosphériques et son ton que l'on pourrait penser élégiaque, est vide, traînant d'ailleurs lourdement sur ses trente dernières secondes. “Last Lesson, Be A Hero” emprunte énormément à Asking Alexandria mais se morfond finalement dans un déferlement furax inutile, une déferlante qui sévit mais n'impressionne pas. Le chant joue d'ailleurs en défaveur de la plupart des morceaux; pas tant le chant guttural, qui reste d'un niveau acceptable mais le chant clair, trop mièvre mais aussi trop lisse, ne gagnant pas plus en puissance lorsqu'il est intégré dans des chœurs. Le riffing n'apporte pas grande consolation, étant très distendu lorsqu'il n'est pas ultra basique. Pas de soli à l'horizon, des breaks très mous.

Néanmoins, une condamnation radicale de ce premier album des Shoot the Girl First serait une injustice. Comme évoqué précédemment, le problème d'identité (car en définitive le problème vient de là) est moins béant qu'auparavant. Au milieu d'une musique assez aseptisée se profilent quelques efforts louables. Ainsi, si les agencements électroniques sont souvent éclopés, les Niçois parviennent à mettre en avant quelques trouvailles ornementales, au moyen d'arrangements plus ambiants (“Jaggerbomb”) ou alors plus feutrés et subtils mais à l'efficacité néanmoins redoutable (“We'll Never Fall” et “Rest In Pieces”, les deux meilleures pistes de l'album). Paradoxal d'ailleurs de constater que Shoot the Girl First impressionnent le plus lorsqu'ils s'éloignent radicalement de leur genre de prédilection, pour s'orienter vers une veine metalcore sans ambiguïté. Et à “Autumn Skies” de montrer que même avec quelques fleurons électro le résultat peut-être concluant.

Ce qui nous amène à l'observation suivante: Shoot the Girl First patinent pour une seule et bonne raison, celle d'assimiler leur musique à une mouvance plutôt qu'à une création singulière et authentique. “Follow the Clouds” est porteur d'un tel malaise, n'étant qu'une hybridation imparfaite et schizophrénique, les velléités artistiques se retrouvant prisonnières d'une fidélité aveugle envers un genre en auto-suffisance qui court à sa perte s'il continue à vivre par nombrilisme. Une chose est certaine, Shoot the Girl First ne pourront se différencier en mimant les recettes qui ont fait le succès de la scène car les mauvais parangons finissent toujours par être oubliés: il va falloir, au contraire, se construire une identité musicale propre, dont quelques bases pourraient déjà se trouver dans ce premier opus. Briser le cadenas du sérail pour mieux en savourer les ressources. La route sera longue mais la mission n'est pas impossible, loin de là.