Liste des groupes Metal Symphonique Sinners Moon Far Beyond the Stars

Prudence est mère de sûreté, dit-on... Un adage qu'aurait suivi à la lettre le jeune sextet slovaque. En effet, pas moins de deux longues années se sont écoulées depuis leur introductif et prometteur album studio « Atlantis », lui-même réalisé quelque quatre années suite à la création du groupe, en 2011, sous la houlette du guitariste et compositeur Luken (ex-Manyac), avec le concours du growler Derrick et de la choriste Martina. S'il a veillé à ne pas brûler les étapes, le combo n'en a pas moins essuyé de sérieux remaniements au sein de son escadron...

Aussi, après moult changements de line-up, le collectif se stabilisa en 2014, Luken et Derrick se faisant dès lors escorter par : Simona Janovičová (Sirenade), soprano au gracile filet de voix aux faux airs de Simone Simons (Epica) ; Jarthuusen aux claviers ; Viktor Války à la basse et jan Vöröš à la batterie. De cette étroite collaboration émane, cette fois, un EP 6 titres (dans sa version De Luxe) ; une galette modeste de ses 25 minutes sortie chez le label slovaque Slovak Metal Army, dont l'architecture diffère sensiblement de celle de son aînée (présence d'un instrumental d'ouverture, pas une seule fresque inscrite au cahier des charges).

Ce faisant, nos acolytes sont restés fidèles à leurs fondamentaux, leur projet metal symphonique gothique et progressif à la fois frondeur, coloré et romantique, renvoyant encore à Nightwish, Epica, Xandria, Amberian Dawn, Delain et consorts, avec désormais quelques touches personnelles et un brin d'inspiration supplémentaire dans leur escarcelle. Si les moyens mis en œuvre semblent moins ostentatoires qu'auparavant, la qualité de la production d'ensemble s'avère une fois encore difficile à prendre en défaut, à commencer par un enregistrement de bon aloi et des finitions aujourd'hui passées au peigne fin. Message fort serait ainsi lancé à la concurrence, fût-elle galopante, inhérente à ce registre metal...

Comme pour ne pas déroger aux codes du genre, les hostilités démarrent par un laconique instrumental de circonstance de nature symphonico-cinématique. Ainsi, voguant sur d'ondulantes nappes synthétiques, sous couvert d'arrangements ''nightwishiens'' de bonne facture, le bref et néanmoins dispensable instrumental a-rythmique « Awakening (The Suite) » ouvre le bal...

A l'instar de son prédécesseur, c'est sur un tempo vivifiant et le plus souvent sur le schéma de la Belle et la Bête que se positionne le présent opus. Ce qu'atteste, d'une part, « Far Beyond the Stars », entraînant, aérien et ''delainien'' effort, où les graciles volutes de la sirène répondent point pour point aux attaques incessantes de son acolyte de growler. Calé sur une sente mélodique certes convenue mais des plus magnétiques, le tubesque méfait témoigne parallèlement d'enchaînements intra-pistes finement échafaudés et de sémillants gimmicks guitaristiques. Dans cette mouvance, c'est sur des charbons ardents que nous projette « Travelers », ''xandrien'' up tempo syncopé aux refrains d'une redoutable efficacité, disséminant d'insoupçonnées variations rythmiques et réservant un bref mais grisant solo de guitare.

Plus encore, le sextet ira jusqu'à nous immerger au beau milieu d'un volcan en éruption, parvenant à nouveau à nous retenir plus que de raison. Aussi, ne saurait-on esquiver « Skúsime to Cez Vesmír », vibrant up tempo de nature power symphonique dans le sillage d'Ancient Bards au regard de son tapping martelant et de son caractère éminemment offensif, avec un zeste d'Epica quant à la soudaineté de ses accélérations. Glissant sur un sillon mélodique aussi enchanteur qu'exigeant dans sa mise en œuvre tout en ne lâchant pas sa proie d'un iota, ce hit en puissance pourrait bien s'inscrire durablement dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le pavillon. Dans une même énergie mais dans un tout autre climat, nous est livrée en titre bonus la démo de « Dawn of War », réalisée par Luken, préalablement à la création du groupe, en 2009. Aussi effeuille-t-on une ogive symphonique gothique aux relents dark, dans le sillage de Draconian, contrastant de par son atmosphère anxiogène avec ses pimpantes voisines.

Lorsqu'ils en viennent à tempérer leurs ardeurs, nos compères nous octroient leurs mots bleus les plus sensibles, avec pour effet de nous rallier sans jambage à leur cause. Ainsi, une version en piano/voix d'une confondante fluidité de « Far Beyond the Stars » nous est livrée. La voici muée en une mélancolique et touchante ballade a-rythmique que n'auraient reniée ni Epica ni Xandria, laissant entrevoir les cristallines inflexions de la maîtresse de cérémonie parallèlement à de délicats arpèges au maître instrument à touches, sur fond d'enveloppantes nappes synthétiques. Un instant privilégié calé sur une mélodicité toute de nuances vêtue et fortement chargé en émotions, à réserver toutefois à l'aficionado de moments de profonde zénitude.

Au final, force est d'observer que nos acolytes nous embarquent une nouvelle fois pour d'enchanteurs rivages. Sans user d'inutiles artifices ni s'en remettre à une ostentatoire technicité instrumentale, le manifeste joue la carte de l'authenticité et, ce faisant, nous pousse à une remise du couvert aussitôt l'ultime mesure envolée. Tout comme son prédécesseur, le modeste opus s'avère des plus variés sur les plans atmosphérique, rythmique et vocal et l'inspiration mélodique tout comme l'impact émotionnel demeurent les atouts majeurs de l'inspiré sextet slovaque.

Toutefois, au regard de moult séries d'accords et d'enchaînements battus et rebattus, les sources d'influence ne sauraient être totalement éludées et l'on cherche, en vain, un soupçon d'originalité à la lecture d'un set de compositions à l'armature pourtant solide et à l'ingénierie du son des plus propres. Il serait dès lors souhaitable que le combo sorte quelque peu de sa zone de confort, qu'il étoffe son offre d'exercices de style encore absents de son répertoire, tout en consentant à l'une ou l'autre prise de risque, histoire de stimuler l'appétit du chaland déjà sensibilisé aux travaux de ses maîtres inspirateurs. La balle est désormais dans leur camp...