Nouvel entrant dans le si couru registre metal symphonique à chant féminin, ce duo britannique originaire de Bristol entend à son tour essaimer ses riffs et faire plus largement entendre sa voix. Un pari risqué mais qu'ont tenté de relever tambour battant la mezzo-soprano Cassie Soden et son comparse, l'expérimenté pluri-instrumentiste David Hudd (Windrunner, ex-
Bloodshed, ex-Gai). Les arguments artistiques et techniques développés par nos acolytes plaideront-ils en leur faveur, au point de les voir venir jouer les trouble-fête dans cette arène peuplée de gladiateurs, pour certains solidement armés, prêts à en découdre et à évincer les nouvelles recrues ?
Conscient des risques courus à se lancer tout de go dans la bataille, c'est pas à pas que le duo gravit les marches le séparant de la fosse aux lions. Déjà à la tête de trois singles («
Mortal Tether » et «
Tyrant of the Void », réalisés en 2020, suivis de «
Annihilation », en 2021) et mû par un soudain élan d'inspiration, le combo accouchera de son premier album studio, «
Eye of the Void », quelques mois plus tard. Incluant les trois plages sus-citées, les sept pistes de cette auto-production laissent certes entrevoir un enregistrement et des arrangements instrumentaux de bon aloi mais des finitions encore lacunaires. Ce faisant, le duo nous immerge dans un univers metal symphonique gothique infiltré de touches doom et prog, dans la veine de
Nightwish,
Imperia,
Xandria et consorts. Mais embarquons plutôt à bord du navire pour une traversée en eaux troubles...
Nos compères disposeraient de cette rare capacité à concocter ces séries d'accords qui longtemps vous resteront gravées en mémoire après y avoir plongé le pavillon, à commencer par leurs passages les plus enfiévrés. Ainsi, c'est d'un battement de cils que le refrain catchy exhalant des entrailles du pulsionnel et ''nightwishien'' «
Annihilation » se jouera de toute tentative de résistance à son assimilation. Et ce ne sont ni les insoupçonnée montées en régime de son corps instrumental ni les soufflantes envolées lyriques de la sirène qui nous débouteront de ce hit en puissance, tant s'en faut. Une charismatique et chatoyante mise en bouche nous intimant de poursuivre notre périple.
Un poil moins tubesques mais tout aussi incisifs, d'autres passages pourront non moins nous assigner à résidence. Aussi, eu égard à ses riffs épais adossés à une frondeuse rythmique, mis en exergue par les pénétrantes inflexions de la princesse, et livrant deux breaks judicieusement positionnés, relayés chacun d'une poignante reprise, le tempétueux et ''imperien'' «
Tyrant of the Void » n'aura pas tari d'armes pour asseoir sa défense. Dans cette dynamique, on pourra non moins retenir le ''nightwishien'' «
Apathy » tant pour son énergie aisément communicative qu'au regard de ses enchaînements intra piste ultra sécurisés et de son refrain immersif à souhait. Mais là ne sont pas les dernières cartouches de nos acolytes...
Quand le convoi instrumental ralentit un tantinet sa cadence, l'inspiré duo trouve à nouveau les clés pour nous retenir, un peu malgré nous. Ce qu'attestent, d'une part, « Doomslayer » et « Symptoms of Delusion », mid tempi syncopés à mi-chemin entre
Nightwish et
Imperia. Tortueux, énigmatiques et épiques, parallèlement nourris des déchirantes oscillations de la déesse, ces deux efforts symphonique gothique aux relents doom et progressifs ne se dompteront qu'au fil des écoutes, pour ne plus relâcher leur proie, in fine. D'autre part, c'est au rythme d'un tambour martial et d'une régularité métronomique que se déversent les 6 minutes de l'opératique single «
Mortal Tether ». Aussi, effeuille-t-on un enivrant mid tempo, ''nightwishien'' en l'âme, susceptible d'éveiller d'authentiques plaisirs.
Un bémol s'immisce toutefois dans cette œuvre, contrariant de fait son effet. Ainsi, un poil plus déroutant et empreint de tenaces linéarités mélodiques, et bien que mis en relief par les troublantes patines de la mezzo-soprano, le lascif et torturé « Mythomania » peinera à se voir mis sur un pied d'égalité avec les pistes sus-mentionnées.
Au final, les 38 minutes de la galette nous plongent dans un univers à la fois rayonnant, grandiloquent et intrigant, nous gratifiant des poignantes modulations de la diva, d'une technicité instrumentale maîtrisée et de lignes mélodiques, pour certaines, dores et déjà finement sculptées. D'aucuns auraient sans doute souhaité un propos plus varié sur les plans atmosphérique et vocal, et des exercices moins stéréotypés qu'ils n'apparaissent, ballades, fresques et autres instrumentaux manquant ici cruellement à l'appel. Il faudra encore que nos compères consentent à l'une ou l'autre prise de risque et à une ingénierie du son plus affûtée pour espérer impacter plus largement un tympan déjà familiarisé aux travaux de leurs maîtres inspirateurs. Quoi qu'il en soit, à la lumière d'un premier essai aussi énigmatique qu'épique, un brin tourmenté, le duo détiendrait-là la clé pour fait de lui l'un des espoirs d'un registre metal qui ne l'attendait pas nécessairement. Affaire à suivre...
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