Habile chasseur nocturne, le hibou Grand Duc est capable de fondre sur sa proie avec un effet de surprise totale. C'est ainsi que je fus moi-même saisi dans les serres du spécimen qui orne le bel artwork orangé qui illustre ce premier album de Gypsybyrd.
La découverte de ce groupe s'est faite par le biais recherches menées sur Sun of
Grey et son bassiste-chanteur Freddy Allen. Dans Gyspsybyrd, il officie uniquement en tant que bassiste, tous les autres postes étant occupés par Jake W. Lewis (guitare, batterie, chant et claviers) Tête pensante de la formation doom texane
Burn Ritual (2 albums au compteur), ce projet presque solo lui permet de présenter d'autres facettes de son univers musical et de proposer de manière indépendante "
Eye of the Sun" en début d'année 2020.
Imprimant d'emblée son identité musicale et sonore, "
Prisoner" déploie ses ailes avec une basse bien ronde, une guitare fuzzy et tranchante, une batterie efficacement discrète et des vocaux plein d'écho, donnant à l'ensemble une légèreté séduisante. Si elle apparaît classique d'un premier abord, la construction du morceau surprend avec cette cassure en plein milieu qui laisse place à un petit motif d'orgue, évoquant par sa sonorité les travaux de Ray Manzarek. La guitare se fait alors plus menaçante et nous gratifie d'un solo gorgé d'un bon feeling.
Battant la mesure tant qu'elle est chaude comme le désert, "Gotta Get Away" continue dans la voie d'un stoner bluesy de grande qualité. Le riff principal aurait pu très bien se retrouver dans un album de
Brant Bjork, empli de ce groove qui fait doucement mais sûrement dodeliner de la tête. Le surprenant petit motif de flûte traversière apporte également une touche originale. Les autres instruments sont tous au diapason, laissant à la voix d'explorer un registre un poil plus aigue et entêtant. Cette même voix qui hulule dans "The
Mountain", titre final qui surprend par sa batterie martiale, le fuzz de la guitare bien plus prononcé qu'auparavant, conférant ainsi une signature heavy en diable à ce morceau qui, même s'il reste relativement calme, n'en est pas moins énergique pour autant.
Gypsybyrd se met aussi à planer bien haut sur "The Quest of the
Enlightened One" qui s'apparente à un très joli décalque de l'immense "Planet Caravan" de
Black Sabbath, partageant cette connexion cosmique qui invite à la méditation.
Mais, loin d'être un triste ersatz sans talent, Jake Lewis, unique compositeur, pousse alors le curseur du heavy psych plus loin sur les géniales "Cosmic
Eyes" et "
Eye of the Sun". Portés par des lignes de basse splendides, Jake dispose du champs libre pour peindre de très beaux paysages sonores où se reflètent aussi bien les brumes de chaleur que les glaciations nocturnes des espaces arides. De la belle ouvrage que cet agencement sonore, tel le plumage chamarré des rapaces.
À noter que, tel un nid bien ordonné, Jake Lewis se charge aussi ici du mixage et du mastering, avec un rendu propre et précis. Décidemment, le bonhomme est talentueux car il est aussi à l'origine de l'artwork.
Gypsybyrd livre donc un premier album qui n'a finalement qu'un seul petit défaut, sa durée trop courte (on pourrait même le qualifier de EP d'ailleurs). Le reste n'est que plaisir auditif de la part d'un groupe dont j'attends avec impatience les nouvelles sorties. Et d'un artiste dont je vais m'empresser de découvrir les autres groupes.
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