Au cours de cette dernière décennie, force est d'observer que le registre power mélodico-symphonique à chant féminin n'aura eu de cesse de faire des émules parmi les formations italiennes. Après
Temperance,
Ancient Bards,
Kalidia,
Frozen Crown, et autres Elettra Storm et Alterium, c'est au tour de ce combo né en 2022 sous l'impulsion commune de Federico Paolini (cofondateur, compositeur et guitariste de
Kalidia) et de Roberto Donati (bassiste de
Kalidia) – précisément suite au split-up de leur groupe d'origine – de se lancer dans l'arène. Suite à la rapide intronisation de la chanteuse aux chatoyantes et puissantes inflexions, Marianna Iacona, dite ''Maryan'', et de Stefano Livieri derrière les fûts, le quartet ainsi constitué concentrera près de deux années durant ses efforts en studio avant de nous livrer son introductif album full length, «
Eternal Rising », signé chez le puissant label italien Frontiers Records. Indice révélateur d'une sérieuse envie d'en découdre de la part de nos quatre gladiateurs !
C'est au cœur d'un environnement metal power mélodique teinté d'une coloration ''symphonisante'' et progressive que nous plongent nos acolytes, où les sources d'influence seraient à puiser dans le patrimoine compositionnel de leurs compatriotes de
Temperance,
Frozen Crown,
Walk In Darkness et
Ancient Bards, notamment. Se dessine alors une œuvre à la fois volontiers sanguine sans être corrosive, souvent enjouée, voire solaire, un brin romantique, où une technicité instrumentale parfaitement huilée mais nullement ostentatoire a pour corolaire des lignes mélodiques finement sculptées, certes, déjà courues mais des plus enivrantes. Avec le concours, pour l'occasion, de l'expérimenté vocaliste et claviériste Michele Luppi (
Whitesnake, ex-
Secret Sphere, ex-
Vision Divine...) au chant, sur l'une des pistes de la rondelle, cet opus pourrait bien relever le défi de nous rallier, et sans ambages, à sa cause...
Eu égard aux exigences propres du collectif transalpin en la matière, les 48 minutes de la galette ont fait l'objet d'une attention particulière quant à leur mise en musique. C'est dire que ce set de 11 compositions repose sur une production d'ensemble de fort bonne facture : produit et mixé tout comme pour Alterium,
Kalidia ou encore
Victorius, par le guitariste de
Freedom Call, Lars Rettkowitz, et bénéficiant d'un mastering relevant de la patte experte de l'ingénieur du son Maor Appelbaum (
Annihilator,
Angra,
Do Or Die,
Nightfall,
Oceans Of Slumber,
Rhapsody Of Fire,
Sabaton, Voivod...), la galette ne concède pas l'once d'une sonorité résiduelle au moment même où elle nous octroie une saisissante profondeur de champ acoustique. Tous les voyants seraient donc au vert pour qu'une croisière des plus sécurisées et, probablement, des plus palpitantes, nous soit promise dans cette mer à la profonde agitation intérieure...
A la lecture de ses plages les plus abrasives, le combo italien saura, à n'en pas douter, se jouer de toute tentative de résistance à l'assimilation de ses vibes. Ainsi, se plaisant à nous lacérer de ses virulents coups de boutoir tout en nous livrant un refrain catchy mis en exergue par les magnétiques oscillations de la déesse, le frondeur et ''kalidien'' «
Eternal Rising » poussera assurément à une remise en selle sitôt l'ultime mesure envolée. Dans cette dynamique, et non sans rappeler
Ancient Bards, l'enfiévré « Pandoras's Box », lui, interpellera tant par la soudaineté de ses accélérations et ses sémillants arpèges d'accords que par son fringant legato à la lead guitare. Enfin, dans le sillage de
Frozen Crown se placent l'offensif « To the
Endless Sea » comme le tortueux « The Glorious
Fight » ; bien que moins directement inscriptibles dans les charts, ces deux magmatiques efforts ne généreront pas moins un headbang bien senti et quasi ininterrompu.
Lorsqu'elle en vient à varier ses phases rythmiques à l'envi, la troupe parvient, là encore, à nous retenir, un peu malgré nous. Ainsi, dans l'ombre de
Frozen Crown se glisse le mid/up tempo « Before the River of
Fire » ; pourvu de riffs en tirs en rafale ne cédant de terrain qu'en de fugaces instants, on comprend que ce pulsionnel méfait ne relâchera pas son étreinte d'un iota. Un poil moins éruptif, et non sans renvoyer simultanément à Alterium et à
Temperance, les polyrythmiques et engageants « A New Beginning » et « Scilla and Cariddi », pour leur part, délivrent tous deux un entêtant refrain mis en habits de lumière par les angéliques modulations de la princesse. Et la sauce prend, là encore, sans tarder. Dans cette énergie, les ''orientalisantes'' senteurs exhalant des entrailles de l'énigmatique « Shahrazad » pourront à leur tour nous aspirer dans la tourmente sans avoir à forcer le trait.
Quand la cadence de la caravelle se fait moins vive, nos acolytes ne trouvent pas moins les clés pour nous prendre dans leurs filets. Ce qu'atteste, d'une part, « Barbarossa », mid tempo aux riffs épais à la confluence de
Temperance et de
Walk In Darkness. Pourvu d'un léger tapping, d'une sente mélodique des plus enveloppantes sur laquelle se calent les fluides ondulations de la sirène, et nous gratifiant en prime d'un flamboyant solo de guitare, le ''tubesque'' effort ne se quittera qu'à regret. On pourra non moins se sentir porté par les vibes enchanteresses émanant du romantique «
Equinox » ; fortement chargée en émotions, pétrie d'élégance, et mise en habits de soie par un duo mixte en voix claires unissant les empreintes vocales de la maîtresse de cérémonie et de Michele Luppi, cette somptueuse ballade atmosphérique et progressive comblera assurément les plus exigeantes des attentes de l'aficionado de moments intimistes.
Malgré ses louables qualités, cet opus accuse toutefois un bémol susceptible d'affadir l'attention du chaland. Ainsi, eu égard à une ligne mélodique en proie à quelque linéarité et à des séries d'accords, certes avenantes mais en proie à de tenaces répétitions. le mid/up tempo «
Burning Within » ne saurait prétendre à une inconditionnelle adhésion.
Résultat des courses : le quartet italien nous plonge dans un bain bouillonnant duquel on ressort avec l'irrépressible désir d'y revenir, histoire de plonger à nouveau dans cette ronde de saveurs exquises. Variant judicieusement ses ambiances comme ses phases rythmiques, et reposant sur une ingénierie du son de premier ordre et sur de louables qualités interprétatives, nombreuses sont les armes pour asseoir la défense de cet opus. D'aucuns auraient cependant souhaité des exercices de style plus diversifiés, instrumentaux et fresques manquant quelque peu à l'appel. Il conviendra également que nos acolytes s'affranchissent de l'empreinte de leurs maîtres inspirateurs afin de conférer davantage d'épaisseur artistique à un projet, au demeurant, solidement échafaudé quant à sa technicité instrumentale et témoignant de sillons mélodiques délicatement esquissés et, le plus souvent, avenants. Bref, un premier essai aussi enivrant qu' éruptif susceptible de placer dès lors le combo transalpin parmi les sérieux espoirs de cet espace metal. Affaire à suivre, donc...
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