Dans la mémoire sélective et pas nécessairement infaillible, loin s'en faut, de votre modeste serviteur,
Malediction et
Manigance furent les principaux responsables des prémices de la fabuleuse recrudescence, pour ne pas dire résurrection, que le Heavy hexagonale chanté dans la langue de Molière connut d'abord timidement au début des années 2000 et ensuite plus franchement quelque temps après. Bien évidemment, la nostalgie de ceux qui vécurent avec bonheur quelques-uns de ces faits-d'armes perpétrée en ces époques révolues par les Adx,
Vulcain,
Trust ou
H-Bomb, n'est, elle non plus, pas étrangère à cette renaissance. Tout comme participa à ce regain, dès 2007, le retour de certains festivals uniquement consacrés aux groupes français et pour lesquels, certains d'entre eux, se réunirent même exceptionnellement.
Mais revenons donc à ce qui constitue, peu ou prou, le contexte précédant la genèse de ce formidable mouvement. En 1997, Didier Delseaux (ex-Crazy
Hammer, ex-
Blind Panther), François Merle (ex-
Killers) et Vince Mouyen (ex-
Jumper Lace) sortent, avec quelques autres camarades, un premier EP, "Signe de Vie", dans une indifférence quasi générale (il faudra attendre 2002 et l'opus "Ange ou Démon" pour que la formation aquitaine connaisse enfin un succès mérité).
Vulcain s'est tu terrassé par la lassitude de ce combat vain. Quant au vaillant Bruno Dolheguy, aidé de ses camarades de
Killers, il continue seul, ou presque, sur ce chemin de croix qui est le sien.
A la même époque, Sylvain Mollard, François Fallempin, Olivier Messaoui et Nicolas Mollard fonde
Malediction bien décidé à perpétuer la tradition de ce Heavy
Metal là et bien conscient de la difficulté de l'entreprise. En 1999 François abandonne l'aventure pour rejoindre
Yyrkoon. Il est remplacé par Mathieu Poulain avant la sortie d'une première démo éponyme composé de cinq titres. Deux ans après un album baptisé "
Condamnés" sort. Le disque connaît un certain retentissement qui permet au groupe de s'atteler à un second album, "Esclaves du
Vice", publié en 2004. Celui là même auquel nous allons nous intéresser dès à présent.
Pour l'analyse de ce plaidoyer, établissons une analogie entre les deux frères d'armes,
Manigance et
Malediction. Et ce même si, au-delà des ressemblances qui les lie, il y aura, aussi, beaucoup de différences entre ces deux formations. Et notamment musicales puisque l'un privilégiera la simplicité alors que l'autre aura quelques velléités Progressives rendant son art plus complexe.
Une autre divergence concerne la conception artistique des deux et là où le premier s'inscrit davantage dans une évolution du legs de ces groupes du passé, le second, quant à lui, cultive directement cet héritage. Il y a ici, en effet, beaucoup de ces parfums subtils qui nous évoqueront immanquablement le Heavy
Metal des Sortilège,
Blaspheme et consorts. D'abord, au-delà du choix de la langue commune à toutes ces formations, par ces textes qui, a contrario de ceux souvent plus contemporains du groupe palois, seront ici plutôt historiques, fantasmagoriques et, en un sens, plus poétiques. Comme autrefois en somme. Et ensuite, aussi, par ces similitudes vocales qui indéniablement nous évoquent le meilleur de naguère.
Il y aussi dans l'art de ces musiciens quelques stigmates Heavy Speed
Metal et Thrash (Sylvain n'ayant jamais caché son admiration pour Dave Mustaine)notamment mis en exergue par ces guitares parfois très agressives. Cependant ces cicatrices seront amoindries essentiellement grâce aux vocaux qui, quant à eux, resteront très marqués du sceau des groupes déjà évoqués auparavant.
L'inspiration du quatuor picard prend donc sa source en divers genres mais surtout en un autrefois délectable. Ce collectif n'a cependant pas consenti à s'enfermer exclusivement dans un passéisme handicapant qui l'aurait condamné à s'adresser uniquement à ce microcosme nostalgique. Pour ce faire, à l'inverse de son premier opus, il a pourvu ce nouvel effort d'une production bien plus moderne et ambitieuse. Il a également soigné la pochette de ce manifeste qui est plus travaillé, s'éloignant de l'aspect très connoté de celle de son prédécesseur.
En outre de toutes ces considérations, très vite une évidence s'impose dès les premières notes d'un remarquable "Dans sa Mémoire" :
Malediction ne se sera pas simplement contenté d'intentions louables, mais les aura transcendés pour atteindre une délicieuse excellence. " "Absynthe", "
Justice Assassine", ou encore, par exemple, un "
Martyr" très subtil aux passages acoustiques superbes, sont autant de chansons participant à cette perfection. Mais tout comme d'autres d'ailleurs puisque ce disque est d'une étonnante homogénéité.
Toutefois parlons encore du morceau "Esclaves du
Vice" qui est admirable avec ce refrain exceptionnel et de "Au Royaume d'
Hades" qui, quant à lui, est inspiré par l'un des thèmes entendu dans la série animé franco-japonaise Ulysse 31 scénarisé, notamment, par le fameux Jean Chalopin pour lequel les quarantenaires gardent un indéfectible respect puisqu'il fut l'auteur de quelques-uns des dessins-animés qui bercèrent leur jeunesse (Inspecteur
Gadget, Les Mystérieuses Cités d'Or, Jayce et les Conquérants de la Lumière,
Mask...).
"Esclaves du
Vice" est donc une œuvre maîtrisée de bout en bout qui confirme magnifiquement le talent de ces artistes.
Malediction est une véritable bénédiction en somme.
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