Liste des groupes Black Metal Forgotten Spell Epiphaneia Phosphorus (Angel, God or Insanity)

Parmi tous les types de formations qui existent dans la scène underground actuelle, de plus en plus de projets s'acharnent à trouver le son qui les différencieraient de la masse quitte à frôler parfois l'overdose d'effets ou de devenir des parodies d'eux-même au bout de quelques productions. D'autres au contraire ne semblent vivre que pour l'art qui a enrichi leur jeunesse ou qui les a transformés et qu'ils vénéreront ad vitam aeternam quitte a en devenir de pâles copies, bien souvent sans talent apparent, dès lors qu'il s'agit de se lancer à son tour dans la création d'une oeuvre censée rendre hommage au(x) maître(s) ou profiter d'une mode.
En revanche, en dehors de cet aspect binaire et blasant (et caricatural, certes...) des choses, il subsiste, au milieu de cette effervescence de productions, certains projets ou groupuscules toujours fidèles à eux-même et qui semblent fait pour ne fonctionner que d'une seule et unique manière, la leur, développant un univers qui leur est propre de la première note à la dernière sortie qu'ils proposeront.
Vous l'aurez deviné, si l'on parle de cela c'est bien qu'Angra Malakh, tête pensante et unique membre officiel de Forgotten Spell à ce jour (en dehors de quelques musiciens session sur diverses démos), s'inscrit dans ce registre d'artiste/groupe que l'on aime ou que l'on déteste pour ce qu'ils sont et font mais qui ne laissent pas indifférent quoiqu'il arrive.

Cependant il est important de noter ceci : si Forgotten Spell fait partie de ces formations de qualités et vraiment uniques, c'est parce qu'il réunit certains atouts majeures sus-cités et ce depuis sa première démo "Necromantic Craft..." de 2003. À savoir: le son et l'ambiance à part, la pureté et la viscéralité de ses compos qui vont taper dans les racines du genre en terme de démarche spirituelle et d'atmosphère mais tout en étant le reflet des croyances et des capacités musicales d'un seul homme entièrement dévoué et possédé par sa vision du Black Metal. Si le fond et une grosse partie de la forme étaient donc bien là dès les premiers balbutiements du groupe il y a 13 ans, on notera que (et heureusement !) l'art de A.M. s'est affiné au fil des ans malgré quelques demos un peu moins intéressantes vers "The Storm of Crying Funeral Souls..." et le "Rehearsal V" comme s'il ne savait parfois pas sur quel pied danser en terme de rythme et de structuration de ses compositions. Tout cela lui permettra tout de même d'évoluer de la meilleure des manières avant de sortir les trois réalisations qui feront se propager le nom de Forgotten Spell (dans une certaine mesure...) dans la scène underground : l'intense "Desecrated, Decayed and Still Holy", "Opening the Skies of Sulphuric Paradise", peut-être le pinacle de ses démos et le split avec Nosvrolok contenant sa production la plus longue qui démontre jusqu'où la folie et la dégénérescence satanique de son Black Metal est capable d'aller. Avec autant de sortie dépassant ou frôlant l'heure d'écoute et de matériel à sa disposition, il était temps désormais de passer à l'étape de l'album et de concrétiser tout ce qui avait été accompli jusque là.

"Epiphaneia Phosphorus (Angel, God or Insanity)" voit donc le jour en août 2016 grâce au soutien de Goatowarex et force est de constater, dès le début de "Angel, God or Insanity Chapter 1", qu'il s'agit bien là d'un chapitre majeur qui s'écrit pour l'histoire de ce one-man-band.
Le déchaînement des riffs oscille constamment entre la vélocité et l'épique, sans jamais prendre parti pour l'un ou l'autre, mais en prenant le meilleur de chacun en balançant des leads poignants coupés de rythmiques tranchantes et agressives, le tout soutenu par une basse plus saturée que jamais qui saura relever d'un cran encore le rythme effréné des compositions, ou recouvrir d'une couche de noirceur supplémentaire l'ambiance oppressante et dévouée au malin que dégagent les compositions telles que "Proclaiming Satan". Certainement le morceau de l'album le plus simple dans sa forme, mais un des plus sombres et intenses à sa manière. La musique de Forgotten Spell, souvent comparée à juste titre à nos compatriote de S.V.E.S.T. pour le côté chaotique et possédé de leur art et l'ambiance de rituels médiévaux de magie noire et de messes noires justifie ici encore une fois sa réputation. Car tout ce qui prédomine durant l'écoute est le sentiment d'être enveloppé de la même chape de lumière et dans la même ambiance irréelle que la sublime illustration de Serpentine Ascent ornant l'album.

La sensation de démence, de possession, mais aussi de communion et d'enrichissement spirituel dégagé par ce maelstrom qu'est "Through Entrails Into Obnoxious Hearts Of An Famished God" et ses riffs aux mélodies malsaines et pernicieuses ou encore la construction du fantastique "Aesthetics of Necromantic Manifestation" et son break frénétique où la batterie tellement à part dans la musique de FS dépasse des records de vitesse et de chaos du début à la fin, qui donne l'impression que la grâce du diable a touché Angra Malakh lors de la composition, impression renforcée par la multiplication des voix et types de chants tout au long de l'album qui accroît la folie et le côté unique et personnel de l'oeuvre. On notera également que si la demo 2015 laissait entrapercevoir un penchant pour l'acoustique et les instrumentaux, ceux-ci sont extrêmement présents ! En effet pas loin de 5 pistes sur 11 ne seront "que" des interludes. Cependant, là où cela pourraient en énerver certains qui auraient souhaités encore plus de morceaux de la trempe de ceux sus-cités, force est de constater qu'ils ont parfaitement leur place ici pour la plupart, dans cet atmosphère éthérée où lumière et ténèbres se battent constamment, n’entachant pas vraiment la haine (omniprésente dès que Angra Malakh s'exprime avec son chant bien à lui et/ou accélère le tempo), mais renforce l'impression de transe et de voyage épique (dans le sens spirituel surtout) développé par la musique. Ainsi seul un titre comme "Along the Ocean of Funeral Sun" ne s'avère pas vraiment utile, majoritairement à cause de sa position dans la tracklist et casse un peu le rythme après une cover de Moonblood certes sympathique mais dispensable.

À l'écoute du titre final éponyme, alors que cette épreuve prend fin et que la conclusion acoustique et épique arrive, on peut se dire que Forgotten Spell livre ici une de ses œuvres les plus solides et un album excellent en toute objectivité ! On peut regretter en effet certains interludes suivant ses goûts et aussi peut-être le fait que trois des compositions pouvaient déjà être entendues sur le split sorti avec Moonblood en 2015 dans une version plus raw.
Pour le reste, Angra Malakh peut se féliciter d'avoir porté son projet à un tel niveau et d'avoir si bien synthétiser tout son savoir faire et d'être rester fidèle à son style personnel et à une forme pure et viscérale de Black Metal qu'il manque souvent !

"Man tries to find itself inside a consciousness to find hope.
Life however, in the moment of darkness, the joy becomes a fright". - Aesthetics of Necromantic Manifestation

Val'