Liste des groupes Metal Symphonique Silent Utopia Embrace the Shadows

Encore un énième groupe metal symphonique à chant féminin voué comme tant d'autres à une disparition prématurée, me direz-vous, et vous auriez raison...à quelques nuances près toutefois ! Influencé par Nightwish, Xandria, Delain et consorts, ce jeune quartet belge a néanmoins cherché à apposer son sceau esthétique et technique sur son œuvre, lui conférant ainsi un parfum d'authenticité et un brin d'originalité. Aussi, c'est sans complexe mais non sans une certaine prudence que se lance le combo, et ce, dans une arène où la concurrence reste vive depuis plus de deux décennies déjà. Quels seraient alors les atouts de cette verte formation susceptibles de la démarquer de ses homologues et qui entretiendrait le légitime espoir de la voir, à terme, tenir tête aux Elvellon, Beyond The Black, Once, Sleeping Romance et autres Metalwings ?

Ce faisant, la frontwoman Meggy Meyer, le guitariste Ignazio Di Salvo, le bassiste Bo Watershoot et le batteur Jonas Sanders (Age Of Torment, Dark Sensation, Emptiness, Pro-Pain...) nous livrent un modeste mais seyant EP 5 titres dénommé « Embrace the Shadows » en guise d'introductif message musical ; auto-production à l'ingénierie du son plutôt soignée, où s'égrainent quelque 22 minutes d'un voyage à la fois émoustillant, enchanteur, et fort en émotions. Cette laconique galette jouit déjà d'une belle profondeur de champ acoustique, d'un mixage bien équilibré entre lignes de chant et instrumentation, tout en n'accusant que fort peu de sonorités résiduelles. Indices révélateurs d'une sérieuse envie d'en découdre de la part de nos quatre mousquetaires...

C'est à l'aune d'une classique mais rayonnante entame instrumentale d'obédience metal symphonico-progressif et cinématique que s'ouvrent les hostilités. Evoluant sur d'enveloppantes et ''nightwishiennes'' nappes synthétiques doublées d'une violoneuse assiste et d'une saisissante gradation du corps orchestral, « Embrace the Shadow » se cale également sur des arrangements de bon aloi et une captatrice sente mélodique. Finissant crescendo sur fond d'ensorcelantes modulations oratoires féminines, le fringant propos ne manque ni de charisme ni de panache. Mais il ne s'agit-là que d'une mise en bouche...

Lorsque le combo lâche les chevaux, il nous mène en de magmatiques espaces d'expression aptes à laisser quelques traces indélébiles dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le pavillon. D'une part, à l'aune du ''xandrien'' et tempétueux « Nightfall », des riffs crochetés s'adossent à une rythmique sanglante et à une démoniaque force de frappe du dispositif percussif. Cela étant, l'ensemble évolue sur une ligne mélodique des plus avenantes, mais nullement simpliste, tout en nous octroyant d'insoupçonnés changements de tonalité, nous réservant, en prime, un flamboyant solo de guitare. Et comment échapper à la vague de submersion qui va s'abattre sur nous à la lumière du galvanisant et ''delainien'' up tempo « Sheltered from the Rain » ? Doté de refrains catchy relayant des couplets aux-mêmes bien customisés, l'enjoué propos se voit enjolivé par les claires inflexions de la belle. Bref, un hit un puissance concocté par le collectif belge qui, assurément, aspirera d'un claquement de doigts le tympan du chaland.

La valeureuse troupe a également veillé à ralentir d'un cran la cadence de ses frappes, avec, pour effet, de parvenir à nous retenir plus que de raison, in fine. Ce qu'illustre précisément « The 10 Strategies », vibrant mid tempo syncopé aux allures d'un Nightwish première mouture, pourvu d'une basse délicieusement vrombissante, d'un subtil legato à la lead guitare et d'un cheminement d'harmoniques des plus infiltrants. Voguant sur un grisant sillon mélodique, livrant un refrain immersif à souhait et mis en exergue par les cristallines et puissantes impulsions de la déesse, le frondeur message musical ne manque ni de pep ni de charme ni même d'un soupçon d'originalité quant à ses enchaînements instrumentaux. On n'éludera pas davantage l'élégant et néanmoins pulsionnel « One Moment » au regard de ses riffs en tirs en rafale, de sa dévorante section rythmique et de ses accrocheuses séries d'accords. Dans cette tourmente, on ne pourra que malaisément se soustraire à l'appel de la sirène eu égard à ses enivrantes volutes, et ce, sur une piste aisément inscriptible dans les charts. Peut-être bien l'une des pépites de la menue rondelle.

A la lumière de cette menue mais prégnante et proprette rondelle, le combo belge révèle une rare aptitude à concocter et restituer ces harmoniques qui, prestement, resteront gravées dans le disque dur du chaland. En outre, un sérieux potentiel technique et mélodique s'esquisse déjà, à étoffer toutefois pour espérer l'emporter, ou, du moins, élargir le champ de leur auditorat. Par ailleurs, on aurait souhaité une offre moins frileuse en matière d'exercices de style, à commencer par l'une ou l'autre ballade et/ou fresque, et un zeste de distanciation supplémentaire par rapport à leurs sources d'influence pour rendre le propos encore plus singulier qu'il n'apparaît. De plus, on regrettera l'absence de joutes oratoires et/ou de choeurs qu'aurait permis un tel registre, la belle monopolisant le micro tout au long de notre parcours. Mais le fringant quartet a encore le temps d'affûter ses gammes et de faire évoluer son art. Quoi qu'il en soit, ce prometteur essai laisse augurer d'une aventure au long cours pour la formation belge...

Note : 14,5/20