Né le 1er décembre 1965 à
Sacramento dans l’état de Californie, le six-cordiste Ryan Roxie est ce que l’on peut appeler sans détour un mercenaire du music business comme il en existe beaucoup dans l’univers fascinant du hard rock américain de son âge d’or à nos jours. Non content d’assurer la lead guitar au sein du relativement obscur Dad’s Porno Mag avec lequel il sortira deux full lengths entre 1997 et 1999, Roxie s’en est allé ensuite chez
Alice Cooper avec lequel il enregistra au nez et à la barbe de Warren DeMartini (
Ratt) et de
Reb Beach (
Winger) qui souhaitaient également le job « A Fistful of Alice » (1997), «
Brutal Planet » (2000), « Dragontown » (2001), «
The Eyes of
Alice Cooper » (2003) et « Dirty Diamonds » (2005) ; posa brièvement ses valises chez
Slash’s Snakepit en remplacement de
Gilby Clarke pour « Ain’t
Life Grand » (2000), sans parler de sa participation aux quatre premiers albums solo de l’ex Guns N’ Roses
Gilby Clarke justement. Ayant également collaboré avec des artistes aussi divers et variés que les dénommés Pappo’s Blues, Tamara Champlin, Tal Bachman et autres Elegantly Wasted notamment, Ryan Roxie doit cependant être associé en premier lieu à son rôle de flamboyant guitariste chez un certain
Electric Angels avec lequel il entra à jamais dans la légende sacrée et immuable de la déesse rock n’ roll.
Electric Angels se forme en 1987 à
Los Angeles sur les cendres encore fumantes de Candy alors fronté par un certain
Gilby Clarke. Le futur remplaçant d’
Izzy Stradlin ayant jeté l’éponge pour monter
Kill For Thrills, le guitariste Ryan Roxie, le bassiste Jonathan Daniel et le batteur John
Schubert recrute le fantasque vocaliste Shane via une sex friend commune et deviennent alors les Anges Electriques avant de partir tenter leur chance à
New York City ; le quartette revendiquant non sans un certain snobisme davantage de proximité musicale avec l’
Europe et la Grosse Pomme qu’avec Hollywood l’artificielle et l’édulcorée. Assurant son tout premier gig au
Limelight de Manhattan le 31 décembre 1987 au cours d’une « New Year’s Eve Open Stage », il ne faudra que cinq autres représentations scéniques à
Electric Angels notamment en compagnie de
Circus Of Power, The Throbs, Dogs D’Amour ou encore des futurs
Pearl Jam de
Mother Love Bone pour s’attirer la convoitise d’un A&R d’
Atlantic Records. Enregistré et produit à Londres sous la houlette du mythique Tony Visconti (David Bowie, T. Rex, Iggy Pop,
Thin Lizzy, The Stranglers…), un premier album éponyme sobrement intitulé «
Electric Angels » sort dans les bacs de tous les bons disquaires estampillés hard rock en février 1990.
Electric Angels.. Franchement,
Electric Angels n’est-il pas un putain de nom de groupe qui tue ? Hyper euphonique qui plus est ? Dans le même état d’esprit de bad assitude quasi absolue, on connaissait déjà les classieux et ressemblant
Morbid Angel,
Death Angel et
Dark Angel ; également les plus sombres
Electric Boys et
Rock City Angels, mais
Electric Angels apparait véritablement comme le patronyme ultime pour un groupe de sleaze « motherfucking » rock n’ roll de la bonne époque, donnant irrémédiablement envie de se procurer les yeux fermés, sans aucune écoute préalable et aussi vite que l’éclair son premier full length d’autant plus mis en valeur par une sobre et non moins somptueuse pochette soulignant comme il se doit que les quatre éminents membres d’
Electric Angels ont bien évidemment et fort heureusement la dégaine et la tronche de l’emploi. La tronche de l’emploi, mais aussi une vision on ne peut plus intéressante et enrichie du rock n’ roll comme le souligne la courte et introductive « I Believe », morceau funky rythmé d’une slapping bass bienvenue et donc relativement original laissant présager à l’auditeur l’écoute d’un opus extraordinaire au sens premier du terme. Malgré cette agréable mise en bouche, «
Electric Angels » entame les choses sérieuses et réelles au travers de la groovy et catchy «
Live in the City » présentant à la face du monde le sleaze rock inspiré des ex Candy de L.A. emmené tambour battant et avec une classe incontestable par un Shane rappelant dans son classieux timbre vocal
Michael Monroe des mythiques et référentiels
Hanoi Rocks mais aussi
Duff McKagan que l’on découvrira quelques mois plus tard chanteur sur « Use your
Illusion II » ou encore sur son album solo « Believe in Me » de 1993. Ainsi, le son rejoint l’image et inutile de tergiverser 107 ans sur le fait que ce premier disque éponyme d’
Electric Angels semble indubitablement être marqué du sceau de la classe et du raffinement rock n’ roll comme l’illustrent entre autres avec aisance les très bons «
Head Above Water » et son refrain d’obédience gospel, «
True Love and Other Fairy Tales » et ses parties de violoncelle seyant à merveille son caractère de complainte pudique ou encore la superbe «
Whiplash » qui à défaut d’être une reprise de Metallicash constitue une petite perle de sleaze rock magnifiée de délicieuses lignes de piano rock à la
The Quireboys.
Malgré constituer le remarquable premier effort d’un combo de hard rock sleaze à la fois distingué et enthousiaste comme le soulignent respectivement l’harmonieuse « Rattlesnake Kisses » et son tempo modéré ponctué de cuivres mais aussi «
Dangerous Drug » et son riffing jouissif signé le futur six-cordiste d’
Alice Cooper Ryan Roxie, «
Electric Angels » présente le paradoxe particulièrement intéressant de trahir d’une manière un peu trop palpable peut être les influences du quartette californew-yorkais. Effectivement, outre les vocalises de Shane rappelant assez ostensiblement avouons-le le godfather finlandais du sleaze bitchreaming rock n’ roll Matti Fagerholm alias
Michael Monroe, impossible de ne pas se remémorer avec plaisir les indispensables « Oriental Beat » et autres « Back to
Mystery City » des
Hanoi Rocks à l’écoute de «
Home Sweet
Homicide » et de son feeling roots accentué par un jeu de Gretsch White
Falcon d’un Roxie qui précisons-le, tend alors à cultiver à la scène comme à la ville un look outrageusement inspiré par le génial et intoxiqué Andy McCoy. Si la très sympathique « Last
Girl on
Earth » tend à posséder ci et là un feeling ou plutôt des bribes d’élégance gothico-british à la Sisters of
Mercy, la fausse ballade « All the
Money » voit son riff principal avoir été pompé sur celui de « Satisfaction » des Rolling Stones, donnant ainsi on ne peut plus de véracité à la maxime «
Plus c’est gros, plus ça passe. » Hallucinant ! Dès lors, l’auditeur stupéfait ne pourra qu’expérimenter le sentiment relativement étrange et jusqu’alors inconnu d’avoir affaire à un groupe à deux visages, équitablement partagé entre un
Electric Angels racé et classieux à souhaits tant dans l’image que dans le son et un
Electric Angels s’étant honteusement contenté de piquer les meilleurs idées du rock n’ roll et de les avoir habilement mixé pour donner naissance à un premier album efficace et des plus recherchés musicalement parlant. Indiscutablement charmé par l’ensemble et ravi de savoir qu’il était encore possible de mettre la main sur des galettes de si bonne facture peu de temps avant le fatidique 24 septembre 1991, il conviendra de donner à
Electric Angels le bénéfice du doute et de garder son incommensurable mépris pour l’anti rock n’ roll dégénéré et ses exécrables représentants de Seattle. Enfin, l’auditeur convaincu ne manquera pas de louer l’ultime et festive « The Drinking Song » et sa putain de vibe rock n’ roll old school, titre sarcastique mais si vrai pouvant trouver un semblant de vérité dans le vécu de chacun (« I never really loved you, I just drank too much »).
Malgré quelques très bonnes mais peut être trop perceptibles influences, «
Electric Angels » constitue un disque de facture admirable mettant en scène un sleaze rock particulièrement efficace et bien senti ne pouvant que s’attirer le suffrage de tout fanatique du genre souhaitant donner sa chance à un groupe culte au succès quasi nul méritant une bonne fois pour toute de sortir de l’ombre et d’être définitivement réhabilité comme un groupe ayant contribué en son temps à prolonger le rêve. Aussi percutant dans son visuel que dans sa pratique d’un rock n’ roll raffiné estampillé roots sans néanmoins jamais se départir d’une énergie vitale et salvatrice, «
Electric Angels » s’avère incontestablement être un modèle de classe et de distinction décibellisée qui flattera sans aucun doute l’âme des esthètes que nous sommes tous ou presque. Un album à découvrir au plus vite dont on prendra soin d’apprécier la substance intrinsèque en version vinyle si possible avec une cigarette au bec et entouré d’une femme et d’une bonne bouteille de bourbon whiskey.
Un disque au feeling Rock'N'Roll désuet qui sent le club miteux, la came coupée et le coup de trois minutes entre deux portes; un disque au succès commercial quasiment inenvisageable, un disque sur lequel on sent effectivement l'influence européenne réinvestie par des cowboys, un disque secret qui ne pouvait être remis à l'honneur que par Adrien. You rule man.
J'ai remarqué que tous les morceaux étaient écrits par le bassiste Jonathan Daniel, et que Ryan Roxie était donc encore une fois arrivé avec sa gratte pour apposer au disque ce putain de feeling inimitable.
Zaz, cool si cette galette te plait. Electric Angels, définitivement un groupe de hard rock n' roll hautement classieux et raffiné. En parlant de Jonathan Daniel, j'avais d'ailleurs lu une de ses interviews pour préparer la chro, et une phrase m'avait marqué : à la question si il préférait Pizza Hut ou Dominos Pizza, il avait répondu que vivant à New York, il ne lui viendrait jamais à l'idée d'aller bouffer une pizza dans l'une ou l'autre chaine de "restaurant". Anecdotiquement significatif.
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