Nouvelle figure du metal symphonique à chant féminin, ce trio suédois originaire de Norrbotten est né d'une idée originale de l'expérimenté guitariste/vocaliste Johan Karlsson (Toxic
Crypt, ex-
Lapis Lazuli...), consistant à fusionner la puissance percussive et rythmique du metal et l'élégance mélodique et les lignes vocales de la pop. S'étant alors mis en quête d'une chanteuse, le maître d'oeuvre posta une annonce à laquelle répondit favorablement Alice Hartvig, chanteuse aguerrie mais novice en matière de metal. Après un concluant galop d'essai, cette dernière fut prestement intronisée. De cette fraîche collaboration sortira de terre We Are To Blame. Mais c'est avec le concours du prolifique guitariste Urban Granbacke (Era Of Ephemeris, Heroes Of Vallentor, ex-
Gates Of Ishtar, ex-
The Duskfall...) que le combo nord-européen accouchera finalement de ses premières compositions. Vers quels horizons se tournent alors nos trois valeureux gladiateurs ?
Conscient des risques et des enjeux qu'implique un tel investissement dans un registre metal en proie à une féroce concurrence, le trio ne chercha nullement à précipiter les événements, loin s'en faut. Mû par un soudain élan d'inspiration, celui-ci réalisera tout d'abord trois singles («
Losing Rhythm » ; « All I Want to Say », avec la participation de l'éminent vocaliste Tom S. Englund (
Evergrey,
Redemption,
Silent Skies) ; «
Breathe »), soit trois des six pistes de son premier et présent EP, «
Duality I ». Sortie quelques mois suite à ces trois vibrantes offrandes, cette auto-production généreuse de ses 35 minutes nous immerge au sein d'un univers pop metal mélodico-symphonique et moderne. Ce faisant, le message musical délivré se fait à la fois rayonnant, fringant, énigmatique et fortement chargé en émotion, où l'ombre de
Delain, Volturian,
Lacuna Coil,
Amaranthe et
Draconian plane sur nombre de ses arpèges d'accords. Cet effort bénéficiant, par ailleurs, d'une belle profondeur de champ acoustique et de finitions passées au crible, c'est sans ambages que le chaland ira au terme du voyage. Il ne nous reste plus qu'à lever l'ancre et voguer sur cette mer limpide à la profonde agitation intérieure en quête de quelques terres d'abondance...
Si le plus clair de la traversée s'effectue en eaux tumultueuses, l'embarcation ne tiendra pas moins le cap, notre équipage parvenant alors à nous assigner à résidence la plupart du temps. Ainsi, c'est d'un battement de cils que le refrain catchy exhalant des entrailles de «
Breathe » happera le pavillon du quidam. Glissant le long d'une radieuse rivière mélodique sur laquelle se calent les chatoyantes inflexions de la sirène, nourri de truculentes rampes synthétiques et recelant un flamboyant solo de guitare, ce frondeur méfait à mi-chemin entre
Delain et Volturian joue dans la catégorie des hits en puissance, que l'on ne quittera que pour mieux y revenir, histoire de plonger à nouveau dans cet océan de félicité. Dans cette mouvance, on pourra également retenir « My Release », pulsionnel et organique effort dans le sillage coalisé de
Lacuna Coil et
Amaranthe, tant pour son infiltrant cheminement d'harmoniques que pour son refrain immersif à souhait mis en exergue par les serpes oratoires d'une interprète bien habitée.
Dans une même énergie mais moins directement orientés vers les charts, d'autres espaces d'expression tireront également leur épingle du jeu. Ce qu'atteste, d'une part, le tonique et ''lacunacoilesque'' «
Losing Rhythm » ; nourri de riffs épais adossés à une rageuse rythmique, laissant parallèlement entrevoir des growls caverneux venus en contre-point des envoûtantes ondulations de la déesse, et ne relâchant son étreinte qu'en de rares instants, le saillant manifeste poussera assurément à un headbang bien senti. Et ce, même si l'on pourra regretter la tenace répétibilité de ses schèmes d'harmoniques en bout de course. On ne pourra davantage esquiver les riffs en tirs en rafale ni les enivrants couplets de l'invitant « The Change » ; un sanguin propos metal gothico-symphonique aux relents metal moderne, au carrefour entre
Amaranthe, Volturian et
Lacuna Coil, incitatif au réenclenchement de la touche play du lecteur cd.
Quand il ralentit la cadence d'un cheveu, le collectif trouve à nouveau les clés pour nous retenir, un peu malgré nous. Ce qu'illustre le mid tempo syncopé « Falling
Down » eu égard à son entêtant refrain et à son insoupçonnée et délectable coloration dark gothique. A la confluence de
Lacuna Coil, Metalite et
Draconian, cet énigmatique et synthétique manifeste livre un poignant face à face entre les growls ombrageux d'une bête grincheuse et les angéliques impulsions de la belle. Et la sauce prend, là encore, sans tarder. Mais le masterpiece ne nous sera révélé qu'à la sixième piste, à l'aune de la power ballade « All I Want to Say » ; une véritable invitation au voyage en d'oniriques contrées 8 minutes durant, en somme. Magnifié par le tandem Alice Hartvig/Tom S. Englund, alors en parfaite osmose, greffé sur un sillon mélodique des plus enveloppants, et se chargeant graduellement en émotion au fil de sa progression, l'instant privilégié ne saurait être éludé par l'aficionado du genre intimiste.
Pour son premier vol, force est d'observer que l'escadron suédois exécute un looping parfaitement contrôlé. Nous livrant un message musical à la fois volontiers vitaminé, empreint de mystère, enjoué, un brin romantique, témoignant d'une ingénierie du son plutôt soignée mais nullement aseptisée, la troupe aurait de sérieux atouts pour emporter l'adhésion. Pour se sustenter, on aurait néanmoins espéré un propos plus varié sur le plan atmosphérique et des exercices de style plus diversifiés qu'ils n'apparaissent. Si les prises de risque sont peau de chagrin, les qualités techniques, mélodiques et interprétatives comme l'heureuse fusion de styles ne sauraient empêcher le trio nord-européen de se hisser dores et déjà parmi les sérieux espoirs de ce registre metal. Alors pourquoi ne pas se laisser porter par les vibes de ce premier mouvement cristallisant une sémillante, énigmatique et poignante entrée en matière...
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