Liste des groupes Metal Expérimental Yuck Do it Yourself

Parmi les projets les plus déjantés et originaux que comporte la scène rouennaise il existe un groupe discret mais néanmoins pétri de talent: YUCK (what the fuck ?!).

Formée en 1999, la formation articulée autour de Julien (guitariste de formation classique diplômé du conservatoire de Rouen) s’enrichit de l’arrivée de Stéphane G. - bassiste multi-instrumentiste notoirement atteint de priapisme musical tant ses projets sont nombreux - et propose rapidement son premier LP en 2009 via l’atypique label PostGhost Recordings habitué des sorties musicales inclassables.

Le combo normand propose une improbable fusion de black metal, metal moderne et de rock poisseux, le tout enrobé d’une bonne couche de maladie mentale. Au rayon des influences ça ratisse large, Satyricon, Dodheimsgard, Soundgarden, Nirvana (toutes proportions gardées hein !) et l’ensemble me fait penser à Phazm et Djerv mais dans une version masculine sous mezcaline.

Si l’assise musicale est foncièrement black-metal à l’écoute de l’hypnotique et angoissant « The Smell of Cold », du furieux « Denying the 3 » ou de l’épique « Hermitt », elle se colore d’influences plus rock dans un juste dosage, constant et maîtrisé, grâce à des compositions fichtrement bien foutues et un niveau technique au-dessus de la moyenne comme sur les syncopés « Virus » et « Nunc Umbra, Mox Gloria » dont les multiples breaks surprendront l’auditeur non-averti par leur variété. Le riffing est donc inspiré et vicieux à l’image du jeu développé sur « Fury Rise », parfois pesant et rampant à l’image de « Mine is Bigger » et plus poignant comme sur les arpèges de « Decline » et les mesures qui suivent. D’ailleurs « Decline » recèle en son sein plus de facettes que je ne saurais le décrire, tour à tour extrême, rock et moderne.

La section rythmique discrète mais présente organise parfaitement ce qui pourrait vite dégénérer en fourre-tout sonore incohérent sans réelle trame en faisant office de fil d’Ariane musical, permettant ainsi aux deux fortes personnalités que sont le guitariste et le crooner normand d’explorer divers horizons sans se perdre à jamais .

L’un des points forts de l’album reste la prestation schizophrénique de Jeremy dont les incessants changements de registres vocaux (hurlés, growlés, scandés et parfois susurrés) matérialisent pleinement cette profusion, que dis-je, cette débauche instrumentale toujours canalisée mais jamais bridée. Passant allégrement d’un registre à un autre notre bruyant ami s’en donne à cœur joie sans jamais faiblir sur les 11 titres qui constituent cette surprenante galette. On jurerait entendre Kurt « headshot » Kobain sur certains passages de « Mine is Bigger » ou Robb « bandana » Flynn sur certaines mesures de « Ab Irato » et « The Right to Live ».

Pour clore cette chronique je m’attarderai sur le dernier titre de l’album : « To Redemption ». Pièce intimiste, aux tons rock/folk, entièrement acoustique, dotée d’une charge émotionnelle sans pareil par la présence au micro de Carol-Ann Croft (bien connue des amateurs de rock Rouennais pour avoir officié dans Pimento) dont la voix, marquée par la vie et les épreuves, sublime cette composition par son charisme incroyable. Elle décèdera durant son combat contre la maladie, un 22 novembre 2009. RIP.

Un disque que je conseille aux amateurs de musique personnelle et immersive, originale mais jamais hermétique.