La première fois que j'ai découvert le gros metalcore à chant féminin tirant vers l'électro de Future
Palace, je le confesse, j'ai cru entendre un simple émule de
Jinjer. A ceci près qu'en lieu et place de ses imposantes consoeurs Tatiana Schmayluk ou Lena Scissorhands, on trouve le frêle petit bout de femme Maria Lessing. Mais il faut reconnaître qu'en allant plus loin dans les extraits dévoilés, rien moins que cinq singles emballés dans des vidéos soignées et duement pimpées qui ont tout pour accrocher l'oreille, cela m'a donné l'envie d'en découvrir plus.
Ce combo originaire de Berlin est composé de Maria Lessing au chant, Manuel Kohlert à la guitare, et Johannes Frenzel à batterie. Leur formule est aussi un trio sans bassiste, car ils fonctionnent bien comme cela, et préfèrent ne pas rompre cet équilibre. C'est donc Manuel qui enregistre la basse en studio, ainsi que tous les autres instruments excepté la batterie. Maria et le guitariste Manuel prennent en charge ensemble toute la composition et l'enregistrement des morceaux. C'est leur guitariste qui écrit la plupart de la musique de son côté avant de la proposer au groupe. La chanteuse s'implique aussi beaucoup dans l'aspect relationnel et visuel, y compris pour leurs vidéos, et leur batteur Johannes remplit en outre la fonction de manager.
Après avoir glané une certaine reconnaissance critique et un bon nombre de fans avec son deuxième LP "Run", Maria et ses comparses se sont trouvés devant la troisième marche de leur carrière : après les débuts, puis l'éclosion, voici le temps de la confirmation, synonyme d'attentes au tournant. Maria Lessing était aussi à la croisée des chemins quand à son expression vocale : étant autodidacte et sans véritable bagage technique, les screams usaient tellement ses cordes vocales en tournée qu'elle a songé sérieusement à les abandonner pour se réserver au chant clair. Seulement voilà, les compos imaginées par Manuel étaient encore plus heavy que celles de "Run"...
Si le titre de l'album, "Distorsion", confirme la direction prise et illustre bien son contenu musical, il fait référence à la distorsion de la réalité que l'esprit humain opère, qui est le thème central des textes écrits par Maria, en se servant de ses expériences personnelles et de son regard sur le monde. L'album a été produit par Julian Breucker et Christoph Wieczorek (
Annisokay,
Beyond The Black,
Smash Into Pieces,...), et est paru le 6 septembre 2024 chez Arising
Empire.
La première chose que j'ai remarquée, c'est que la voix de Maria Lessing est mixée en avant, et il y a de quoi tant c'est le point fort du groupe. La frontwoman a pris ses problèmes à bras le corps, avec des cours et du coaching pour renforcer ses screams et ses growls, sans blesser ses cordes vocales. Et quels résultats ! Elle a démultiplié son registre agressif, propulsant son scream de manière punchy, il n'y a qu'à entendre le grit impressionnant qu'elle met en hurlant "again, and again, and agaaaain !" sur "Uncontrolled", qui met bien les poils. Vocalement, elle repousse par accoups les limites de la performance, et ça vire à la battle furibarde avec Charlie Rolfe (As Everything Unfolds) en invitée sur "The
Echoes of Disparity". Son chant clair est toujours aussi brillant et m'évoque un mélange entre Gwen Stefani de No Doubt , et Hayley Williams de Paramore.
Les guitares ont un son monstrueux, un peu en retrait, un peu comme un mur qui arrive pour vous percuter, repoussant une onde de choc devant lui. Les riffs, largement sous accordés, sont simples et efficaces, mélangeant djent et néo, et dispensent quelques breakdowns heavy à souhait. Les synthés tiennent une part importante, pour ne pas dire omniprésente, posant le décor des intros, pointillant des mélodies entêtantes par dessus les guitares. Avec parfois des rythmiques binaires comme sur le refrain de "Decarabia" on se retrouve avec du gros dance métal chromé jusqu'au bout des ongles. Je vais dire une grosse connerie, mais c'est comme si Electric Callboy arrêtait de faire les marioles et se mettait à écrire de bonnes chansons.
Et lorsque Future
Palace éclate la boule à facettes et éteint les lumières, il se révèle étonnamment sombre et méchant ("A Fool on
Devil's
Ruins", "They Take What They Want"). D'ailleurs, après avoir écouté l'entièreté du disque, ce qui reste et me donne envie d'y revenir, c'est clairement le Future
Palace heavy, noir et désespéré.
Au rayon des (petites ) réserves, il y a quelques pistes que j'ai trouvé plus quelconques comme "In Too Deep" - qui n'est pas une reprise d'Adèle - ou "Rays of Light", qui rentrent dans le rang des groupes de metalcore à chant féminin. Aussi, tout est tellement chiadé et bien produit que l'ensemble peut donner un côté un peu aseptisé, alors que l'aspect émotionnel est bien là, débordant de partout.
Future
Palace poursuit le durcissement amorcé sur son précédent album "Run", en étant s'élevant d'un cran dans tous les domaines : plus violent, plus sombre, plus mature... et mieux composé. La chanteuse Maria a aussi une présence bien plus affirmée, qui contraste avec son apparence fluette et fragile. Autant dire que je ne les attendais pas à un niveau pareil, et c'est mine de rien une des bonnes surprises de cette rentrée, et un outsider de taille pour des groupes comme
Jinjer et
Infected Rain.
Merci beaucoup pour la chronique.
De mon côté, je n'arrive malheureusement toujours pas à accrocher. Pourtant, le groupe a tout pour me plaire et la comparaison avec Jinjer est très pertinente car on y voit pas mal de similitudes. Et j'ai beau aimé Jinjer, Future Palace possède un aspect pop, notamment sur les refrains/chant clair (et dans une moindre mesure sur la structure des morceaux), qui ne me plait pas. Je trouve que ça dénature totalement les compositions et le caractère tranchant de la formation. Mais il en faut pour tous les goûts, je pense simplement que je ne suis pas le public visé :(
Groaw : Moi, c'est pareil pour Jinjer, j' accroche pas alors que tout est là ! Le côté pop de Future Palace me rebutait sur les deux premiers LPs, mais sur celui-la ça passe bien, je trouve
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