Nouvel entrant dans le si concurrentiel espace metal symphonique à chant mixte, ce duo cofondé en 2023 par la chanteuse, violoniste et orchestratrice
Dawn Kadmiel et par le guitariste, bassiste et growler Ran Hameiri (DPS, Deathscrum) entend, en toute légitimité, essaimer ses riffs au-delà des frontières par trop limitatives de sa terre israëlienne natale. Un projet original, né d'une rencontre entre deux collégiens passionnés par le metal et l'univers symphonique. Bien que leurs parcours musicaux aient divergé après leurs études, les chemins des deux protagonistes se sont recroisés quelques années plus tard ; l'occasion pour nos deux acolytes de mettre à profit leurs backgrounds respectifs dans un projet metal symphonique singulier, unifiant ainsi les aspirations réciproques du moment. De cette étroite collaboration naîtra un single, «
Twilight State (the Vespertine) », un mois seulement avant la réalisation de leur premier et présent album studio, «
Desolate Soil ». Ce faisant, les huit pistes de cette auto-production constitueraient-elles un arsenal suffisamment affûté pour faire de cette jeune formation un sérieux espoir dans ce registre ?
Afin de mieux situer leur champ d'action, c'est au cœur d'un environnement metal mélodico-symphonique aux colorations prog, power, dark et folk que nous immergent nos deux compères. A la fois éminemment frondeur, rayonnant, empreint de mystère, un brin romanesque, et calé sur le schéma oratoire devenu classique de la Belle et la Bête, cet initial élan fait cohabiter des sources d'influence aussi éclectiques que
Visions Of Atlantis,
Epica,
Leaves' Eyes,
Ancient Bards,
Lyriel,
Draconian,
Xandria et
Nightwish. Pour une optimale mise en musique des 39 minutes de leur offrande, nos deux maîtres d'œuvre ont sollicité la patte experte du vocaliste Rob
Carson (Xaon, Bloodstorm), également connu pour avoir enregistré/mixé/mastérisé certains albums de Tyrmfar,
Monolyth, Assigned
Fate, entre autres. En émane une qualité d'enregistrement difficile à prendre en défaut, une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation et des finitions passées au crible. Mais embarquons sans plus attendre à bord du navire pour une première croisière en haute mer, que l'on espère ponctuée de terres d'abondance...
C'est sur une mer d'huile que démarre notre périple : en dépit de la brièveté de son message musical, « Genesis » se pose telle une poignante entame instrumentale d'inspiration cinématique, ''nightwishienne'' en l'âme, laissant par là même entrevoir des arrangements instrumentaux de bonne facture. Mais si le bal s'ouvre tout en douceur, il ne saurait s'y réduire exclusivement, loin s'en faut...
Faisant la part belle à la fibre progressive, le duo parvient alors, et sans mal, à nous prendre dans ses filets, à commencer par ses incursions en eaux limpides à la profonde agitation intérieure. Ce qu'atteste, tout d'abord, « To All the Wilds », mid/up tempo power symphonique folk aux riffs acérés, à mi-chemin entre
Leaves' Eyes,
Lyriel et
Ancient Bards. Egrainant un martelant tapping et de sensibles gammes pianistiques, investi d'un grisant coup d'archet et d'un seyant solo de guitare, jouissant parallèlement d'un couplet finement ciselé que magnifient les claires inflexions de la belle, et, par effet de contraste, d'une soudaine accélération, mise en exergue par les growls rageurs de son comparse, le grisant méfait ne se quittera qu'à regret. Dans cette dynamique, on pourra encore jeter une oreille attentive sur «
Twilight State (The Vespertine) », opératique manifeste aux relents dark gothique, au carrefour entre
Visions Of Atlantis,
Draconian et
Nightwish ; les assauts répétés, au demeurant, judicieusement positionnés et des plus glaçants du growler, comme le saisissant effet de clair-obscur de l'atmosphère ne sauraient être esquivés.
Dans une même orientation stylistique, mais évoluant sur une mer un tantinet plus houleuse, d'autres passages se joueront non moins de toute tentative de résistance à leur assimilation. Ce que démontre, d'une part, le polyrythmique et tourmenté « Omens (The
Trial of
Doom) » qui, au regard des galvanisantes montées en puissance de son corps orchestral, au sein desquelles se positionne un pont propice à l'apaisement de nos sens, et de son anxiogène colorature dark symphonique, interpellera celui qui y aura plongé le pavillon. Tout aussi offensifs et libertaires, «
Rain into the
Hollow » comme « Journeys upon Great
Gaia » se posent, eux, tels de théâtraux et gorgonesques efforts mis en relief par les growls caverneux du maître de cérémonie. Et, dans un cas comme dans l'autre, la sauce prend, in fine.
Quand le convoi instrumental se fait un poil plus alerte, le propos aspirera, à son tour, le tympan du chaland. Si elle ne relâche que rarement son étreinte, c'est cheveux au vent que l'on parcourra « Passing Tales », une piste symphonico-atmosphérique et folk à la confluence de
Xandria et de
Leaves' Eyes. Ce faisant, on ne saurait résister à la force d'attractivité de l'infiltrant cheminement d'harmoniques que nous invite à suivre ce chavirant essai. Investi d'un prégnant face à face entre le fin legato du lead guitariste et les troublantes oscillations de la violoniste, et mis à l'honneur par les angéliques patines d'une interprète bien habitée, l'entraînant élan poussera assurément à y revenir, histoire de plonger à nouveau dans cet océan de félicité.
Lorsque les lumières se font plus tamisées, toute tension s'évanouira d'un coup d'un seul ; nos compères nous adressant par là même leurs mots bleus les plus sensibles, sans doute la petite larme au coin de l'œil perlera-t-elle sur la joue de celui qui y aura goûté. Ce qu'illustre « Skeleton of a
Tree », ballade progressive aux riffs délicieusement émoussés, infiltrée d'arpèges au piano d'une infinie délicatesse et glissant le long d'une radieuse rivière mélodique. Mise en habits de lumière par les cristallines modulations de la déesse, au sein desquelles se lovent les impulsions, caressantes, cette fois, de son acolyte, se chargeant parallèlement en émotion au fil de sa progression, la ''xandrienne'' aubade ne saurait être éludée par l'aficionado de moments intimistes. Et ce n'est pas le fringant solo de guitare décoché en bout de course qui nous déboutera davantage de l'instant privilégié, tant s'en faut.
C'est donc au cœur d'un environnement aussi chatoyant qu'énigmatique, un brin ténébreux, que l'on pénètre, avec, pour effet, de nous pousser peu ou prou à une remise en selle sitôt l'ultime mesure envolée. Diversifiant ses exercices de style, ses phases rythmiques, ses atmosphères comme ses joutes oratoires à l'envi, l'inspiré duo se fait, par ailleurs, des plus émouvants. Cela étant, si les prises de risques consenties pourraient laisser quelques traces dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le pavillon, il manque cependant un soupçon d'originalité au propos ainsi qu'une digestion plus rapide des vibes de leurs maîtres inspirateurs pour se sustenter. De relatives carences compensées à la fois par une production d'ensemble de bonne facture, une technicité vocale et oratoire dores et déjà maîtrisée et des lignes mélodiques finement sculptées, des plus engageantes, parfois. Bref, un mouvement aussi seyant qu'audacieux en guise de message de bienvenue, susceptible de permettre à nos deux gladiateurs de se hisser parmi les sérieux espoirs de leur espace metal d'affiliation. L'avenir seul nous le dira...
Il faudra que je jette une oreille attentive à cela! Mais le peu que j'ai entendu à présent me plait!
Merci pour la chronique et la découverte (une fois de plus)
Merci pour ton retour! Personnellement, j'ai été assez rapidement conquis par ce 1er set de compositions dispensé par ce (rare) groupe israëlien! Un beau potentiel se dessine déjà, et j'ai comme le sentiment que l'inspiré duo n'en restera pas là, du moins, je ne peux que l'espérer...
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire