Le fait-maison, ça a beaucoup d’avantages. On le réclame généralement pour son authenticité, pour son terroir. Néanmoins, il en va tout autrement en matière de réalisation d’un disque. L’autoproduction en musique est un véritable acte de bravoure, ou de dépit, quand le groupe en question tire déjà le diable par la queue au regard de ses finances, et ne souhaite pas payer en plus un professionnel pour retoucher les différentes compositions qui devront figurer sur l’ouvrage. Rien ne semble non plus avoir été retouché dans la démo éponyme du groupe « Foghorn ». C’est aussi ce qui caractérise la démo, véritable brouillon en vue de la préparation d’un volume plus solide. Difficile d’entrevoir une issue fructueuse possible à la découverte de ses quatre pistes. De l’authenticité, on va bientôt en souper.
« Foghorn » se traduit tout simplement par "corne de brume". Il en serait naturellement usage sur l’introduction. C’est là que nous prendrons conscience du long chemin à parcourir pour nos résidents de la Marne. La corne de brume est effectivement présente, mais pas du tout comme espérée. Chez de nombreuses formations pagan, elle s’entend souvent puissante, lointaine, mise en écho. A l’inverse, elle est ici en peine, affolée, comme soufflée par un enfant agité. Nous avons traditionnellement les râles qui suivent derrière, mais pas les combats qui en sont la cause. Il y a de quoi être interloqué et croire en fait qu’il s’agit là d’une farce, d’une parodie. Le combo composé de Blödorn et de
Lord prend pourtant ça très au sérieux.
«
Horde Noire » est l’occasion de jauger ce qu’ils valent musicalement. Quand on voit que le duo se réfère à des formations fédératrices comme «
Taake », «
Immortal » ou le glacial «
Helrunar », on serait tenté d’imaginer, de manière illusoire, qu’ils allieront toutes ces influences dans le but de créer une musique inédite et personnelle. L’auditeur va très vite déchanter et se rendra immédiatement compte que les garçons ne sont pas au niveau pour affronter la scène. Le black metal de « Foghorn, aux aspirations pagan mal digérées, est malhabile, dans une forme simpliste et épurée, comme on rencontrerait assez souvent dans le milieu. Certains pourront apprécier l’esprit très volontaire, le côté encaissé et rentre-dedans. Mais, s’il y a séduction, elle va s’effacer à force de grésillements et de linéarité.
« Gondolin » et « Notre Race Sera leur
Mort » offrent tous deux une entame palpitante, sujets à attention. Mais, c’est à peu de choses près ce que l’on retiendra de la démo, tellement le prolongement est fade, désarticulé et poussif. Les deux compères ne nous convainquent aucunement sur l’illusion occulte et haineuse. S’il y a chaos, il n’est que le fait de la maladresse des membres et du niveau de production au rabais. Ils tentent bien également de palier aux effets de redondance en variant le rythme. Ce serait pire quand la batterie augmente la cadence. Comme il est démontré en fin de «
Horde Noire », la guitare se trouve totalement prise de vitesse et poussée à la faute.
Il y a de quoi être pessimiste à l’écoute de ce "brouillon" de « Foghorn ». En effet, il existe déjà d’innombrables formations qui jouent d’un black metal du même acabit, sinon supérieur, rêvant de faire les premières parties d’ «
Immortal » ou de «
Mayhem ». Ceux-là pourront attendre longtemps, car les ténèbres comme les cieux sont réservés aux élus. Quant à la fibre pagan, elle est totalement à revoir. Il aurait été préférable qu’elle dégage véritablement des pistes, et pas seulement dans une introduction fort douteuse, faite semble-t-il dans des conditions très artisanales. « Là, au-dessus du cadavre déchiqueté, homme et démon s'affrontèrent sous la pâle lueur de la lune naissante, avec tous les avantages dans le camp du démon, à l'exception d'un seul. Et cet avantage-là était suffisant pour venir à bout de tous les autres. Car si une haine abstraite peut donner substance à une créature spectrale, le courage, tout aussi abstrait, ne pouvait-il pas lui aussi forger une arme concrète pour combattre ce fantôme ? » (extrait de "Solomon Kane" de Robert E. Howard)
08/20
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