Enième figure du metal symphonique à chant féminin, ce quintet italien fondé en 2017 à Macomer entend pourtant, et légitimement, essaimer ses riffs au-delà des frontières par trop limitatives de sa terre sarde natale. Conscient des risques courus à se lancer tout de go dans une arène foisonnant en formations de tous poils, dont quelques jeunes loups aux dents longues, le combo a pris le temps nécessaire pour millimétrer chacune de ses portées mais aussi peaufiner sa production d'ensemble eu égard à un travail de fourmi en studio. Aussi, ne réalisera-il son introductif et présent opus, «
Cult of the Ancestors », que cinq longues années plus tard. Quels seraient alors les arguments artistiques et techniques permettant au collectif transalpin de se distinguer de ses homologues générationnels, toujours plus nombreux à affluer ?
Mais avant d'aller plus loin, quelques présentations s'imposent. A bord du navire, nous accueillent : Maurizio Fois aux guitares, Nanni Carta à la basse, Diego Russo aux claviers, Daniele Fois à la batterie, sans oublier
Sara Fadda, frontwoman dont le grain de voix comme les envolées lyriques s'apparenteraient à ceux d'une certaine
Floor Jansen (
Nightwish, Star One, ex-
After Forever...), rien de moins. De cette étroite collaboration naît un set de 10 opulentes compositions d'obédience rock'n'metal mélodico symphonique aux touches heavy, progressif et cinématique, égrainées sur les quelque 55 minutes de la rondelle, dont les influences d'
After Forever, Revamp,
Epica,
Nightwish,
Xandria et
Imperia ne sauraient être démenties. Le pléthorique mouvement témoigne, en outre, d'un enregistrement de bonne facture doublé d'arrangements instrumentaux aux petits oignons et d'une belle profondeur de champ acoustique. Embarquons sans plus attendre pour une croisière au long cours, dans le secret espoir de déceler quelques terres d'abondance...
Comme à l'accoutumée dans ce registre, les premières notes plaident en faveur d'une brève entame instrumentale d'inspiration cinématique. Si, sous couvert des soyeuses et ondulantes nappes synthétiques dont se pare « Waiting for... », c'est tout en douceur et en délicatesse que s'ouvre le bal, les éléments ne sauraient tarder à se déchaîner...
Lorsque la cadence se fait vive, nos acolytes trouvent alors, et sans mal, les clés pour nous retenir plus que de raison. Ce qu'atteste, tout d'abord, « The Birth of Space and Time », mid/up tempo heavy symphonique dans la droite lignée d'
After Forever ; pourvu de saisissantes montées en régime de son corps orchestral, recelant un flamboyant solo de guitare, lui-même inscrit au sein d'un pont techniciste finement esquissé et au judicieux positionnement, et mis en exergue par les puissantes inflexions la sirène, le rayonnant effort aura peu de chances de rater sa cible. Dans cette même logique, variant ses phases rythmiques et ses schèmes d'accords à l'envi, livrant un léger mais martelant tapping, et réservant un poignant final en crescendo, le ''jamesbondien'' « The
Glory of an
Old Sea Man », quant à lui, poussera à un headbang bien senti. Difficile, par ailleurs, de se soustraire au sémillant refrain de «
Born by the
Flames », tubesque propos metal symphonique nourri d'organiques sonorités typées 70s et s'égrainant sur un sillon mélodique certes emprunté mais des plus immersifs. Enfin, pourtant en proie à quelques linéarités mélodiques, l'impulsif et ''imperien'' « Forces of
Apocalypse » ne dissémine pas moins une énergie aisément communicative.
La troupe a parallèlement opté pour d'amples plages symphonico-progressives, exercice de style des plus exigeants mais aussi des plus courus par ses pairs, et pour lequel elle ne s'est guère avérée plus malhabile, loin s'en faut. Aussi, retiendra-t-on, d'une part, le ''nightwishien'' « Mother » tant au regard des frissonnantes envolées lyriques de la diva, elles-mêmes calées sur une grisante sente mélodique, que pour la graduelle densification de son dispositif instrumental à mi-morceau. Dans la même lignée mais témoignant d'une technicité un poil plus complexe, l'opératique low/mid tempo « Coming
Home », lui, déverse ses quelque 7:38 minutes d'une enivrante traversée, où les limpides ondulations de la déesse font mouche où qu'elles se meuvent. Sur un même modus operandi, le ''xandrien'' «
Sacrifice » retiendra davantage pour la délicatesse de ses arpèges au piano et son fringant solo de guitare que pour l'inopportunité de son pont techniciste à mi-parcours. Malgré les répétitives et monocordes séries de notes dont nous abreuvent ses couplets, l'opératique et ''imperien'' «
Warmonger », enfin, aspirera le tympan par son break bien amené et des plus envoûtants.
Quand ils en viennent à feutrer leurs ambiances, nos compères nous adressent leurs mots bleus les plus sensibles, libérant par là-même une charge émotionnelle difficile à endiguer. Ce qu'illustre « Neverending
Life », ballade romantique jusqu'au bout des ongles, aux airs d'un slow qui emballe, que n'auraient probablement reniée ni
Epica ni
Nightwish. Greffé sur un infiltrant cheminement d'harmoniques, magnifié par les fluides et caressantes volutes de la maîtresse de cérémonie et pourvu d'un petit supplément d'âme, l'instant privilégié sera au rendez-vous des attentes de l'aficionado du genre intimiste.
On ressort de l'écoute du skeud gagné par l'agréable sentiment d'avoir effeuillé une œuvre à la fois éminemment rayonnante, parfois épique, un tantinet énigmatique, un chouïa romanesque, et faisant montre d'une qualité de production difficile à prendre en défaut. Diversifiée sur les plans atmosphérique et rythmique, la luxuriante offrande l'est en revanche bien moins quant à son assise oratoire, la frontwoman monopolisant le micro de bout en bout de notre parcours.
D'aucuns auraient probablement souhaité voir inscrits au cahier des charges un set de compositions un poil moins emprunté qu'il n'apparaît et/ou l'une ou l'autre prise de risque consentie par nos acolytes. Laissant entrevoir une technicité instrumentale et vocale dores et déjà éprouvée ainsi que de seyantes esquisses mélodiques, l'orgiaque opus concède néanmoins moult répétitions de séries d'accords. Cependant, sans s'avérer innovant ni même afficher un soupçon d'évolution par rapport à ses homologues, le collectif dispose-là de l'arsenal requis pour faire de lui un sérieux espoir du metal symphonique à chant féminin. Bref, un premier essai aussi solaire qu'émouvant, mais un brin tâtonnant...
Note : 14,5/20
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire