Nouvelle terre pourvoyeuse en formations metal symphonique à chant féminin, l'Argentine peut s'enorgueillir de compter dans ses rangs des talents tels que
Abrasantia,
Daemon Lost, Elessâr,
Escapist ou Enigmatica, entre autres, souvent inspirés par les cadors européens du genre, tels que
Nightwish,
Epica,
Amberian Dawn ou
Xandria. Et, Aniron, jeune quintet fraîchement débarqué de
Buenos Aires n'a pas échappé à cette règle, également calé dans le sillage de ces sources d'influence pour nous livrer son premier effort, avec quelques touches de
Sirenia en substance. Prudent dans sa démarche, le combo, fondé en 2009 par le guitariste Diego Mancila, livre un humble EP auto-produit en guise de rite initiatique. C'est sur un tronçon de vingt minutes où se succèdent quatre dynamiques pistes metal symphonique gothique que nous pousse le collectif sud-américain à le suivre.
On est projeté dans une atmosphère tantôt obscure, tantôt souriante, à l'instar de ces quatre compositions de bonne facture sur le plans instrumental global et des arrangements, incluant des lignes vocales à l'agréable timbre mordoré mais axées sur des exercices convenus et quelquefois peu propices à l'accroche émotionnelle. Pour le moment, la mise en relief du propos repose sur des qualités logistiques discutables. En effet, l'enregistrement de ces pistes laisse passer nombre de notes résiduelles, dont de gênants aigus, et on perçoit sans mal un surmixage partiel des lignes de chant, faisant la part belle aux compétences de l'interprète. Qui plus est, les finitions n'ont pas bénéficié de tous les égards, signe manifeste d'un message musical encore balbutiant.
C'est dans une ambiance lugubre que le combo nous ouvre ses portes. Le tonnerre gronde et l'orage menace, préalable à l'émergence d'une diluvienne pluie synthétique s'abattant sur nous sur « The Dire Descent », titre symphonique gothique au riffing resserré et à la dense rythmique, dans la lignée d'
Escapist. Sur un cheminement mélodique crépusculaire, les impulsions lyriques octroyées par
Barbara Rossi, mezzo soprano au timbre chatoyant, avec de faux airs de
Tarja, offrent un jeu de nuances intéressant mais qui, hélas, dans cette mouvance, peine à faire illusion. Un pont inutilement techniciste et peu cohérent dans son déroulement, avec une lead guitare ne sachant plus à quel saint se vouer, ne servira pas plus la cause de cette piste aux bourbeuses harmoniques. Bref, le risque de la déroute n'est pas loin sur une plage qui aurait gagné à se dégager de ses accords malhabiles pour nous séduire.
Une autre atmosphère, à l'instar d'une énergie percussive offensive, nous est dispensée. D'une part, un orgue martial ouvre la voie à « The
Spell », fouettant instant aux riffs écorchés vif et à la rythmique massive. Sur quelques arpèges empruntés à
Amberian Dawn, le groupe évolue sur une assise instrumentale saisissante mais desservie par une ligne mélodique complexe, voire déroutante par moments. Les séries de notes contenues dans les portées auraient gagné à ne pas suivre une profusion de spectaculaires variations lorsque celles-ci nous engloutissent le pavillon dans d'inextricables méandres. D'autre part, des nappes synthétiques enveloppantes précèdent un riffing graveleux sur le véloce « Concealed », titre d'inspiration metal symphonique dans la veine de
Nightwish, première mouture, toutes proportions gardées. Les inflexions de la belle, au placement ajusté et témoignant de franches et jolies envolées, permettent de s'imprégner de l'ambiance suave des couplets et, plus encore, des refrains, à la mélodicité agréable. Mais, le schéma harmonique tend à se répéter, n'offrant que peu de variations de tonalité. Infiltré par des gammes manquant cruellement de ce sel qui aurait pu le rendre plus immersif, ce morceau rate de justesse son effet. Un break vient à point nommé mais n'évitera guère l'écueil de la désaffection tant il nous enlise dans d'inconsistantes fioritures et au sein d'un imbroglio instrumental en finalité.
Le collectif a également ralenti son tempo pour tenter de nous rallier à sa cause. Mid tempo typiquement metal symphonique, «
Awakening » nous mène à des couplets nuancés et à des refrains au tracé mélodique qu'on aurait espéré plus serein. Si la déesse use de ses inflexions avec aplomb, comme le ferait Simone Simons, elle ne parvient pas à trouver les clés pour déclencher la moindre émotion, suivant une ligne harmonique peu propice à sa mise en valeur. Aussi, malgré un pont technique de bonne facture, on reste décontenancé par la lumière blafarde de cette terre lunaire.
On comprend que les débuts du combo argentin demeurent fragiles et qu'il lui faudra faire mûrir encore son projet pour nous livrer un message musical artistiquement plus affiné, techniquement encore plus consistant, plus efficacement mis en lumière et mieux distribué entre les parties en présence. En outre, les lignes mélodiques sont friables et n'atteignent que rarement leur cible, malgré les jolies modulations vocales de l'interprète qui, d'ailleurs, n'offrent pas toujours l'effet frissonnant escompté. Il lui faudra redéfinir le concept et redessiner, de fait, ses portées pour tenter de gagner l'estime d'un auditorat de plus en plus familiarisé avec les gammes distillées par les cadors du genre. Bref, un propos encore taillé dans la roche qu'il conviendra d'épurer de toute note parasite susceptible d'entraver le plaisir de nos sens. On pourra néanmoins se laisser tenter par une écoute ou deux, afin de mesurer le potentiel et la marge de progression du groupe. Pour l'heure, laissons-lui encore le temps de peaufiner ses arpèges et probablement l'étincelle jaillira-t-elle in fine. Nous ne pouvons que le lui souhaiter...
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