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Dis chéri, c’est quoi ce bruit ? C'est le jardinier qui passe la tondeuse ou la femme de ménage qui vient de lancer une machine ? A moins que ce ne soit encore un de ces maudits avions qui passe juste au-dessus de la maison ? Regarde, les murs tremblent et la baie vitrée du salon vibre !
- Mais non chérie, c’est le petit qui vient de recevoir sa dernière commande de chez Horror
Pain Gore Death Productions ! Je crois qu’il est en train de s’enfiler le premier full length de
Monnier...
Bon, vous l’aurez compris à cette petite intro déso(pi)lante, aujourd’hui on ne parlera pas de metal symphonique à chanteuse mais bel et bien de grind sauvage et destructeur. Le duo belgo japonais doit son nom à Blanche
Monnier, qui, à la fin du 19eme siècle, fut séquestrée par sa mère et resta enfermée pas moins de 25 ans dans une minuscule cellule sans jamais voir la lumière du jour. Voilà qui plante le décor. Alors oui, c’est vrai, le logo du groupe n’est pas extrêmement engageant et la pochette n’est pas très ragoûtante non plus, mais bon, en musique, on s’intéresse plus au contenu qu’au contenant, pas vrai ? Et à ce niveau-là, rassurez-vous, cette
Compilation éponyme des deux premiers EP du groupe décape méchamment les conduits auditifs : si vous aimez le grind ultra violent des
Nasum,
Insect Warfare et autres
Wormrot,
Monnier saura sûrement toucher votre côté sensible et fleur bleue.
On commence direct avec
The Abyss, larsen sifflant, mur de guitares compact et massif qui envoie du gros riff à toute berzingue, batterie épileptique, un Donald Duck criard bien vénère donnant la réplique à un gros grizzly enroué : on a en 1,24 petite minute tout l’arsenal du grind le plus extrême et efficace qui soit, un parfait concentré du genre, brut, explosif et décapant. D’une manière générale, les titres tournent autour des 1,30 minutes et alternant un riffing parfaitement audible composé tantôt de saccades lourdes et groovy à se démonter les cervicales, tantôt d’un conglomérat un peu plus déstructuré et bruitiste, un peu à la manière d’un
Pig Destroyer (
Doomsday,
Burning Disgrace) même si la musique de
Monnier reste plus facile d’accès que celle des Américains.
Quelques passages plus lents, pesants et gras, parfois à la limite du sludge, permettent de reprendre son souffle entre deux salves d’hystérie supersoniques complètement ravageuses (l’entame de Unwritten Letters, la fin de Depletion, l’enchaînement entre la fin de
Doomsday et le début de Dim Light) et les titres s’enchaînent sans temps mort ni coupure nette entre les deux EP, le propos musical étant peu ou prou identique sur les deux parties de la compil (même si l’EP japonais sonne un peu plus traditionnel dans l’approche, comprenez plus death et moins noisy au niveau du riffing, décidément excellent, qui n’est parfois pas sans rappeler
Cannibal Corpse, notamment sur les tricotages de manche de 仄暗い光 ou 冷たく湿った壁).
Les deux compères savent jouer, affichant un niveau technique plus que respectable pour un style qui se résume parfois à un chaos sonore plus qu’approximatif, et l’ensemble de ces 16 titres jouit d’un excellent traitement sonore, avec un mix équilibré qui laisse chaque instrument s’exprimer librement.
La seule petite faute de goût à déplorer à mon sens sont ces quelques passages narrés en japonais débités sur un ton monotone et nasillard et qui n’apportent strictement rien au schmilblick (Write in
Agony, Dim Light), cassant un peu la dynamique et l’hyperviolence de l’ensemble. Certains pourront aussi reprocher une durée franchement courte avec 26 petites minutes seulement au compteur, mais soyons honnête, vu le style pratiqué, on n'a pas besoin de plus, et de toutes façons vous n’auriez pas survécu au double puisqu’après trois titres, vous êtes déjà à genoux en train de ramasser vos dents.
Monnier est donc un parfait album de genre à l’intensité incroyable qui parvient à rester relativement accessible et aéré pour du grind brutal, grâce notamment à un riffing intelligible qui n’hésite pas à groover et à une judicieuse alternance des rythmes, même si l’ensemble reste bien évidemment très brutal et rapide. Un défouloir idéal après une journée de merde au boulot, plus efficace qu’un tabassage de hipsters, une séance de crossfit, un gros joint de beuh ou une poignée d’anxiolytiques. A écouter au volume maximum avec une camisole de force et dans une pièce vide aux parois entièrement matelassées de préférence, histoire de ne rien se péter et de ne pas être tenté de se fracasser la tête contre les murs... Uuuuuurgh !
Une bonne chronique bien nerveuse et barrée ! Encore du son à écouter...
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