Cela fait maintenant de nombreuses années que
Novelists a passé le stade d'espoir français dans le domaine du metalcore/djent, en témoignent ses signatures successives sur les labels Arising
Empire, Out Of Line Music et maintenant Ackor Music. Leur mélange de modernité, de froide brutalité technique avec quelques fulgurances mélodiques boisées en soli rendaient le groupe unique et remarquable, et riche en surprises.
Après le départ de son chanteur historique Matteo Gelsomino, le groupe, à la recherche de stabilité, a ensuite opté pour Tobias Rische (ex-
Alaska) qui a officié sur "C'est la Vie" et "Déjà Vu - première partie" avant de s'en séparer en 2023, l'alchimie n'étant pas suffisante.
Des circonstances heureuses ont voulu que Camille Contreras, chanteuse nantie d'une formation musicale classique, puis passée par le punk hardcore et la pop, et a eu l'occasion de faire des harmonies sur l'album "C'est la Vie" ainsi qu'un featuring pour le morceau-titre. Quelques années plus tard, lorsque le micro fût vacant, elle fût choisie pour être là nouvelle chanteuse de
Novelists, après des essais formels et patients.
Comme on n'est jamais aussi bien servi que par soi-même, c'est leur guitariste Pierre Danel qui a mixé l'album. Après avoir préparé le terrain et les esgourdes depuis quelques mois avec plusieurs singles, "
Coda" est enfin sorti, le 16 mai 2025 chez ACKOR Music.
Leur précédent long format "Déjà vu - première partie" présentait une grosse évolution au niveau du style, plus épuré et de la production, beaucoup plus moderne, voire même cybernétique, et au premier abord, "
Coda" pourrait apparaître comme une deuxième partie de celui-ci: il se situe musicalement dans sa continuité. Cependant, l'arrivée de Camille Contreras au chant rebat les cartes, et d'ailleurs "
Coda" désigné en musique la fin d'un mouvement. C'est une toute nouvelle version de
Novelists qui apparaît, ayant perdu du passage le suffixe FR. Le premier qui me sort "
Novelists 2.0" sort et va au coin avec un bonnet d'âne.
L'âme du groupe, et son expression ont changé, au point qu'on serait maintenant tenté de ranger les français dans une autre catégorie : dans la même course que se livrent
Jinjer, Spiritbox,
Infected Rain ou Future
Palace, combos djentiformes à chant féminin qui ont le bon goût d'avoir chacun leur spécificité musicale, et une frontwoman au charisme singulier.
La production est dans l'esprit de l'album précédent : une gangue ouateuse d'infra-basses unit le kick et la basse de Nicolas Delestrade, un écrin confortable pour écouter la voix de Camille. Du coup, les guitares de Pierre Danel et Florestan Durand sont intégrées à ce mur pulsant de basses, oui, je sais, j'ai encore dit basse.
La batterie d'Amael Durand est épurée, dans un mode groove, avec une caisse claire là encore très moderne dans son impact, tout cela fait ressortir des tricks intéressants dans les espaces libres, comme cette double croche au charley qui finit à contre temps sur "Say My Name", où ces deux coups judicieux de grosse caisse qui syncopent des passages du morceau "
Coda".
Les soli comme ceux de "
All for Nothing" ou de "Say My Name" ont comme un son de stratocaster, presque bluesy, et amènent une émotion plus humaine dans un emballage sonore presque trop parfait.
Novelists vise en effet parfois un peu trop le juste milieu, perdant un peu en personnalité sur des titres comme "
Sleepless Nights" ou "KO".
Chaque chanson a son propre univers, sa tonalité, dominé par la voix si versatile de Camille. C'est plus encore le cas sur des morceaux plus éthérés comme "78 rue..." où toute la chanson est construite sur sa voix en symbiose avec l'ambiance tissée par les synthés. Ce dernier titre, plutôt trip hop voire R n' B, semble quant à lui sorti d'un autre album, avec une production calibrée autour un beat discret et du chant et détonne, même s'il ne surprend pas car Camille y semble encore plus à l'aise qu'avec les autres univers qu'elle aborde sur ce disque. Son point fort est indéniablement le chant clair où elle arrive à faire passer toutes les émotions et à délivrer des lignes de chant mémorables. Elle n'est pas en reste sur les screams, très viscéraux, qui semblent pourtant sortir comme une douce vapeur de cigarette quand on la voit au micro. Cependant il est un peu dommage que le chant agressif soit ponctuel, et peu utilisé dans la longueur.
De gros riffs purement djent côtoient des effets électro modernistes, un mélange de
Periphery, Skrillex et Paramore, ("
Coda") : tout ce qui est badass et punchy est aggloméré pour coller à l'oreille du chaland ("
All for Nothing", "Say My Name"). Le chant de Camille s'égare sur "Maldicion de la Bruja" avec du rappé en espagnol aux relents de Nicki Minaj, et des "Hey" pop qui me rappellent à mon corps défendant ... les Spice Girls, alors que derrière, les riffs creusent à la pelleteuse du high gain ! Bref, j'ai l'impression que ça teste à droite et à gauche toutes les nouvelles capacités du groupe. J'ai trouvé que c'est lorsque
Novelists plonge dans le métal plus direct limite industriel / néo sur "Adam and Eve" ou encore un "CRC" dont le riff méchamment tordu aurait pu sortir des doigts de Wes Borland, qu'il déploie sa pleine puissance, dégage quelque chose de plus, avec des guitares plus frontales.
Avec "
Coda",
Novelists est parvenu à se réinventer avec sa nouvelle vocaliste, sur des morceaux où elle prend sa place avec assurance et candeur. Même si c'est un album de transition, tout est abouti, maîtrisé, dosé, à sa place, au point qu'on aimerait que ça pète un peu les plombs sans cette mainmise du contrôle, à chaque instant. Ce qui arrivera, on peut l'espérer avec les concerts qui vont se succéder, notamment le Hellfest dans un tout petit mois...
Merci pour la chronique !
J'ai laissé une petite chance à ce dernier Novelists et sans foncièrement le trouver mauvais, il ne m'a pas marqué plus que cela malheureusement. C'est déjà un peu l'impression que j'ai eu un live en première partie de Northlane où Camille souffre beaucoup sur le screaming. Sur l'album studio, ça se ressent tout autant et je la sens bien plus limitée que d'autres vocalistes féminines. C'est sur ces instants que Tobias ou Mattheo manquent beaucoup à la formation car même si instrumentalement parlant c'était moins élaboré, les vocaux étaient bien plus riches.
Même en mettant de côté mes attentes vocales, l'univers du groupe ne semble très abstrait : parfois on tombe clairement sur la pop/rock avant d'un coup tomber sur un gros riffing typé djent sans que la transition se fasse naturellement et je finis par me perdre totalement. Alors il est certain que le quintet expérimente et tente beaucoup et j'applaudis la prise de risques mais j'ai presque envie de dire qu'il y en a de trop, à tel point que l'on semble avoir affaire à un tout nouveau collectif.
Je le réécouterai sans nul doute pour voir si mon avis évoluera avec le temps mais pour le moment, ce n'est clairement pas le grand amour ...
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