Liste des groupes Metal Progressif Paradigm Shift Coalescence

Il était question il y a quelques semaines de la découverte du groupe de rock-metal progressif Coshish, et aujourd'hui c'est de leurs compatriotes Paradigm Shift dont je vais parler. Originaires de Mumbay eux aussi, ces derniers ont sorti leur premier album, Coalescence, en 2012. Autre point commun entre les deux groupes : la langue ; en effet, ils s'expriment tous deux en hindi, ce qui rajoute une bonne dose d'exotisme pour nous européens. Mais Paradigm Shift est allé plus loin dans l'originalité que ses compatriotes, ayant intégré un violon au line-up. Le violon sert à se rapprocher de la musique traditionnelle indienne ; et, de même que le violon dans Myrath sonne oriental, le violon dans Paradigm Shift sonne typiquement indien.

Contrairement à leurs compatriotes de Coshish, Paradigm Shift ont été contraints de sortir leur album de début en autoproduction, aucune maison de disque ne les ayant remarqué à l'époque. Cette tendance pourrait bien s'inverser, car avec un album de cette qualité, nos indiens pourraient se présenter la tête haute chez n'importe quel label. De plus, ils ont très bien réussi à se passer du soutien d'une maison de disque, puisque l'album, enregistré chez le chanteur, s'en sort avec une bonne production, donnant un son limpide qui fait bien ressortir chaque instrument.

Le premier titre, Khwabon Mein Teri, donne le ton et impose la couleur. Les rythmiques aériennes aux sons saturés côtoient des airs plus calmes et tranquilles. Le violon est omniprésent, même s'il subit une féroce concurrence de la part de la guitare. Le chant en hindi passe très bien, et ses intonations exotiques (pour nous) font voyager. Arrive un long passage instrumental laissant tous les instruments donner le meilleur. Cela aboutit à un metal progressif moderne comparable à celui joué par leurs compatriotes de Skyharbor, auquel on ajoute bien sûr ce fameux violon. Le titre se termine sur un petit solo de guitare bien sympathique, toujours avec un esprit très "prog".

La suite continue globalement dans la même direction, avec une musique mélangeant toujours allègrement le rock, le metal et la musique traditionnelle indienne, d'où l'aspect très progressif de l'ensemble. Cependant, certains titres sont composés sans aucun élément metal, ce qui donne une musique très calme, sans une once d'agressivité. Cela pourrait rebuter le métalleux lambda, mais ravira toute personne ouverte aux musiques plus douces. C'est de Sapna que je veux parler ici, long morceau de sept minutes, qui mise essentiellement sur le chant. Si tout est sympathique et de bonne qualité (notamment la prestation du chanteur - impressionnant de justesse), l'ennui peut tout de même pointer son nez. En effet, ce titre subit sa longueur et peut-être une trop grande répétition de refrains. On notera en revanche un bon solo de guitare électrique en milieu, parfaitement en accord avec l'ambiance générale.

Le niveau remontera sensiblement avec un excellent Dhuaan, très bon compromis entre le heavy metal et les instruments traditionnels, un peu comme le ferais RockStrata dans un pays voisin, le Bangladesh (et oui, vu de France, il y a des similitudes). La musique est cette fois plus lourde, et la production donne une puissance et une profondeur impressionnante pour un album oscillant entre rock et metal progressif à la base. Le riff est costaud, et il n'y a que ce violon fou pour apporter un peu de fraîcheur à cette atmosphère d'un coup plus sombre. La fin du morceau verra un surprenant solo de chant (si on peut appeler ça comme ça !), où le vocaliste dévoile des techniques inconnues dans le metal, accompagné toujours de ce violon décidément très surprenant.

Les indiens tentent aussi leur chance avec un morceau quasiment instrumental, qui est le morceau éponyme. Celui-ci offre de belles et douces mélodies à la guitare sèche durant la première moitié, et la suite correspond toujours à ce mélange original de violon oriental et de guitare électrique, qui se fend ici d'un bon et long solo, chose assez rare sur ce disque.
Tere Liye est pour moi, et de loin, le meilleur titre de cette galette. Ce n'est pas un titre qui apporte réellement quelque chose de nouveau par rapport aux autres, mais il est juste extrêmement bien ficelé, et le chant est encore meilleur, avec quelques montées dans les aiguës.
L'opus se conclut enfin avec Batlaado, qui rempli correctement le contrat, mais sans en faire beaucoup plus. C'est un morceau solide, mais qui manque un peu de mélodie, si l'on excepte le solo de violon en milieu. Des growls feront leur apparition, et même si l'idée n'est en soi guère mauvaise, leur présence est un peu incongrue.

On en est sûr depuis maintenant quelques années, le metal est un genre de fusions et de mélanges. Force est de constater que l'alchimie a fonctionné à merveille avec Paradigm Shift. Heavy metal, rock progressif et musique traditionnelle indienne se complètent étrangement bien, et donnent un son lourd et chaleureux. La qualité de la musique doit beaucoup au vocaliste et au violoniste, qui se sont taillé la part du lion. La dernière partie de Dhuuan est le manifeste de ce qu'ils peuvent faire ensemble. On aurait peut-être voulu en général entendre un peu plus la basse et la batterie, légèrement en retrait.
Cette révolution conceptuelle qu'est Coalescence se révèle finalement pleine de fraîcheur et d'originalité. Le quintette de Mumbay, malgré sa jeune expérience, prouve qu'il est capable à la fois d'innover et de créer une musique agréable et accessible. Cependant, je ne pense pas que cette musique ait été créée selon de savants calculs pour bien doser le mélange. Non, à mon avis, c'est une musique qui a été créée naturellement, et qui découle simplement des multiples cultures qui s'expriment chez ce groupe. Une histoire de naturel ...