Au sein d'une scène metal symphonique à chant féminin sud-américaine aujourd'hui en constante évolution, c'est sans complexe que ce jeune et talentueux quintet chilien originaire de Santiago vient à son tour tenter sa chance. A l'image de Elessär,
Daemon Lost,
Vandroya,
Abrasantia ou
Lyria, le discret combo officie dans un rock'n'metal mélodico-symphonique progressif plutôt avenant, voire pimpant, un poil grandiloquent mais techniquement non ostentatoire, d'une fringante mélodicité, dans la droite lignée de
Nightwish,
Xandria,
Amberian Dawn,
Dark Sarah et consorts. Quels seraient alors les arguments de cette nouvelle recrue pour espérer nous retenir plus que de raison et nous faire, par là-même, oublier l'empreinte de ses illustres maîtres inspirateurs ?
Née en 2011 sous l'appellation Quimera, ce n'est qu'en 2015 que cette formation prendra le nom de Halekin ; le temps pour nos valeureux acolytes de peaufiner leurs harmoniques, de sculpter chacune de leurs paroles et d'asseoir leur logistique sur des bases solides. Dans ce dessein, une étroite et fructueuse collaboration s'est esquissée entre le batteur et ingénieur du son Serious
Pyro, le bassiste, vocaliste et compositeur Mauricio Moya, le claviériste, arrangeur et compositeur Alberto Peña, le guitariste Daniel Espinosa et la parolière et frontwoman Fuza (dont la tessiture n'est pas sans renvoyer à celle d'une certaine
Tarja à ses débuts). D'un intense et minutieux travail d'équipe naît, un an plus tard, leur introductif album full length répondant au nom de «
Circus Dream » ; auto-production modeste de ses 37 minutes sur lesquelles ne s'enchaînent guère plus de 8 pistes, jouissant chacune d'un mixage bien équilibré, signé Cristián Olivares (Studio Audiocustom), doublé d'une belle profondeur de champ acoustique.
Comme souvent dans ce registre, l'opus s'ouvre sur un instrumental d'obédience metal symphonico-progressif à orientation cinématique. Cela étant, contrairement à nombre de ses homologues, le combo chilien a conféré à l'éponyme et substantielle entame «
Circus Dream » une saisissante gradation du corps instrumental, de sémillantes rampes synthétiques sous couvert d'arrangements ''nightwishiens'' d'excellente facture ainsi que des finitions passées au peigne fin. Une manière plus qu'engageante d'ouvrir le bal...
Lorsqu'il évolue sur des charbons ardents, le combo nous mène en de luxuriants paysages de notes, le plus souvent propices à un inconditionnel enivrement de nos sens. Ce qu'illustre notamment le ''xandrien'' « The Price of
Heaven », grisant up tempo aux riffs épais adossés à une sanglante rythmique et aux truculents gimmicks guitaristiques. Mis en habits de lumière par les cristallines volutes de la déesse, couplets finement ciselés et refrains catchy de ce hit en puissance glissent avec célérité dans nos tympans alanguis. On ne résistera pas davantage à l'appel de la sirène sur « Madness », galvanisant mid tempo power symphonique oscillant entre
Diabulus In Musica, eu égard à son ensorcelant cheminement mélodique, et
Ancient Bards, quant à l'intarissable pugnacité de ses frappes. Pourvu de gracieuses séries de notes exhalant d'un clavecin samplé et d'un tapping headbangant, l'efficace méfait saura nous pousser dans nos derniers retranchements.
Parfois, le propos se fait techniquement plus complexe, réservant alors d'insoupçonnés coups de théâtre. Ainsi, feignant de nous désarçonner, le polyrythmique et ''nightwishien'' « Ephemeral » tout comme l'échevelant «
Corrupted » trouveront les ressources pour aspirer le pavillon, à l'instar de leur basse résolument claquante et de leurs inlassables roulements de tambour. Jouant à plein sur les effets de contrastes atmosphériques et rythmiques, le premier méfait nous octroie un pont techniciste difficile à prendre en défaut et opportunément positionné, où un magnétique legato à la lead guitare se trouve au corps à corps avec de troublants arpèges au piano ; le second effort, quant à lui, a opté pour une frondeuse rythmique en face à face avec un orgue que rien ni personne ne semble pouvoir enrayer la progression. Mais là ne s'arrête pas la ronde des saveurs...
Nos compères recèlent encore d'autres pièces de nature à nous happer sans avoir à forcer le trait. Aussi, lorsqu'ils rétractent leurs griffes, ils nous conduisent en de non moins enveloppantes séries d'accords, comme l'atteste « Voyage », chatoyant mid tempo syncopé aux accents latino, dans le sillage atmosphérique de
Fortaleza, avec une touche de
Stream Of Passion quant à la délicatesse de ses modulations mélodiques. Mis en exergue par les hypnotiques inflexions de la diva, cet enchanteur manifeste vogue sur de radieuses gammes au piano inscrites dans un bain orchestral aux doux remous. Et comment ne pas succomber aux rayonnantes portées insufflées par le tubesque mid tempo « The
Dark Host » ? Un classique du genre, à mi-chemin entre un
Nightwish de la première heure et
Dark Sarah, où abondent les changements de tonalité, et où les envolées lyriques de la mezzo-soprano font mouche où qu'elles se meuvent.
Enfin, quand il nous immerge au cœur d'intimistes moments, le collectif sud-américain se mue en véritable bourreau des cœurs. Ainsi, l'aficionado du genre sera-t-il naturellement aspiré par «
Absentia », ballade éminemment romantique aux airs d'un slow qui emballe, à la délicieuse touche latina, à la confluence entre
Abrasantia et Elessär. Mis en habits de soie par les caressantes patines de la maîtresse de cérémonie et doté d'un vibrant solo de guitare, l'instant privilégié se pare également d'un refrain à la forte charge émotionnelle, que n'auraient renié ni
Nightwish ni
Amberian Dawn. Bref, une piste d'une sensibilité à fleur de peau, propice à une écoute ininterrompue.
On l'aura compris, à la lumière de cette seyante et palpitante ogive, nos cinq gladiateurs disposeraient déjà d'armes suffisamment affûtées pour opposer une farouche résistance à la galopante concurrence locale. Ayant beaucoup appris de ses sources d'inspiration, sans pour autant les avoir totalement digérées pour les faire siennes, le combo sud-américain a toutefois apposé son sceau latino et quelques sonorités alternatives sur la majeure partie des partitions de l'opus. Si l'architecture de la galette demeure somme toute classique et si les prises de risques restent aux abonnés absents, la troupe nous livre cependant un message musical à la fois propret, diablement énergisant et ensorcelant. Exigeants mélodistes, fins techniciens, nos compères témoignent d'un potentiel qui ne demande qu'à être davantage exploité qu'il ne l'est. Quoi qu'il en soit, c'est sous les meilleurs auspices que démarre l'aventure...
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