Respecté par ses pairs et reconnu par les critiques, peu suivi par les masses malgré des concerts souvent qualifiés de mémorables depuis le milieu des années 80,
Fishbone est l’archétype du groupe culte.
Depuis l’album éponyme en 1985, contenant le fameux «Party at
Ground Zero», l’hymne fusion ska-rock définitif, chaque œuvre du combo apportera sa pierre à l’édifice Fusion avec un talent et une facilité désarmants.
Trois ans après le varié et excellent «Give a Monkey a Brain …»,
Fishbone, largué par Sony Music, revient en 1996 gonflé à bloc et nous délivre ce Chim Chim’s Badass
Revenge décapant.
Après un discours introductif, les premières notes arabisantes du titre éponyme se font entendre. La rythmique groovy endiablée, le mur heavy des guitares en arrière-plan (que l'on retrouve tout au long de l’album), les éructations primaires de Moore et de son thérémine, ne sont calmés que par un refrain déconcertant de mélodie et de fluidité.
Fishbone veut en découdre et ça s’entend. «In the
Cube» enchaîne dans la foulée, plus calme, une sorte de ska progressif, avec une utilisation des voix et chœurs subtile, colorant à merveille un titre superbement écrit. Le calme avant la tempête en somme… Car «Beergut», lui, ne fait pas dans la dentelle ! Punk speedé, chœurs envoûtants sur les couplets, un Moore intenable et les cuivres qui enveloppent le tout. Ouf !
Après le premier «Interlude», on découvre le presque heavy-rock «Psychologically
Overcast», sur lequel s’invite Busta Rhymes, rapant sur fond de guitares wha. Vient alors le fameux «Alcoholic», hymne reggae/ska ultra-efficace, délirante comptine sur les affres de l’alcool et remède absolu contre la morosité. Avec «Love…
Hate», le rythme se ralentit pour une pièce orientée ska, très mélodique, où les chœurs ont une nouvelle fois leur importance. Après le second «Interlude», déboulent deux missiles absolument indispensables (à l’instar de «Beergut») : «
Riot», 56 secondes de fureur punk et «Monkey Dick», une sorte d’ovni ska-core avec des cuivres surnageant au-dessus de l'épaisse masse rythmique. Terrible !
«Sourpuss», morceau calme et délicat, a dû être délibérément conçu pour nous apaiser avant le furieux «Rock Star», le second ovni, le titre punk-core de l’album, dans lequel tous les musiciens se lâchent dans une furie libératrice contre la ségrégation artistique. Et pour clore les 70 minutes de l’album, «Pre Nut» prépare en douceur le terrain pour «Nutmeg», final somptueux et charismatique, pièce heavy et hypnotique, se déployant sur plus de 10 minutes, rappelant presque dans son impact et sa grandeur le Kashmir de
Led Zeppelin.
Avec une production typée live signée Dallas Austin (Madonna, Mickael Jackson, Gwen Stefani, ... !), Chim Chim’s Badass
Revenge est sans conteste l’album le plus homogène et abouti de
Fishbone, gorgé d’une musique riche, dense, généreuse, usant et abusant des chœurs, et même souvent proche des jam-sessions. La voix de ce diable d'
Angelo Moore est bien mise en avant, apportant sa folie et son énergie à des lignes mélodiques imparables et techniquement irréprochables.
Et si certains osent encore comparer
Fishbone à
Red Hot Chili Peppers, on pourra seulement leur rétorquer que ces derniers ont perdu d’avance,
Fishbone et son intégrité enterrant absolument n’importe qui dans leur domaine. CQFD.
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