Indiscutablement la musique des frères Young aura établi de nouvelles règles référentes dans le microcosme de la scène
Hard Rock. Incontestablement elle aura donné aussi toutes ses lettres de noblesse à ce mouvement en devenir. Mais indiscutablement elle aura également pesé lourdement sur quantités de vocations annihilant toute volonté créative propre de nombre d’artistes se contentant de reproduire, le plus fidèlement possible, cette nouvelle expression artistique et tous ces codes les plus symptomatiques. Ainsi une horde de faussaires, au savoir-faire plus ou moins avéré, envahirent l’espace culturel et médiatique au plus grand bonheur de ceux qui louaient ce style dont, il faut bien le reconnaître, l’aspect festif communicatif demeurait séduisant. Le temps passant, l’avènement de nouvelle tendance et, entre autres, l’inexorable évolution ralentirent quelque peu cette pandémie avant d’en inverser inévitablement la contagion. Mais les modes sont cycliques et remettent au gout du jour les causes de nos émois d’antan. Ainsi, en ce début de troisième millénaire, voit-on revenir en force un nouvel engouement pour le genre.
De même que les Australiens d’
Airbourne ; les Suédois de
Bullet se formèrent en 2001. Mais les similitudes de ce parallèle ne cessent pas là, puisque ces fils de viking ont décidé, eux aussi, d’inscrire scrupuleusement leur démarche, fort de cette résurgence nostalgique, dans celle de la reproduction exacte, diront les observateurs les plus polémistes, et dans celle de la réplique fortement inspirée, dirons les spectateurs les moins exigeants. Car ici, encore une fois, nous avons à faire à la duplication exacte du propos d’AC/DC.
Difficile de ne pas admettre qu’il se dégage, et heureusement, à l’écoute de ce
Bite the Bullet une certaine désinvolture caricaturale amusée, et parodique, dont on peut espérer qu’elle soit voulue. Si cette légèreté demeure immédiatement distrayante et plaisante au premier degré, il n’est pas évident qu’en analysant plus sérieusement la démarche artistique sous-jacente, l’amusement demeure. Passé, en effet, les délicieuses satisfactions d’une première réaction épidermique, le doute s’installe. Quel intérêt, si ce n’est celui d’un plaisir immédiat, peut avoir un tel concept ?
Bien évidemment il y a certains attraits qui viennent plaider en faveur de ce
Hard Rock aux riffs australiens, aux rythmes caractéristiques et aux voix aigues écorchées, rencontre improbable entre Brian Johnson et Udo
Dirkschneider. Evoquons tout d’abord une certaine exaltation communicative qui, si elle n’est ni neuve, ni même totalement convaincante, est bel et bien présente et demeure sympathique (Pay the Price,
Bite the Bullet,
Dusk til
Dawn, ou encore, par exemple,
Nailed to the
Ground). Parlons ensuite de ce dessein, volontaire espérons-le, de proposer quelques morceaux s’éloignant quelques peu de ces stigmates de la musique des plus illustres, du sixième continent, tant idolâtré. Ainsi peut-on entendre quelques titres plus enlevés, plus prompts et plus entrainants (
Nailed to the
Ground, Rock us Tonight). Pourtant malgré ces efforts, et ces quelques rares qualités ; et à cause de ce fort sentiment de linéarité né d’une musique déjà entendue, ce
Bite the Bullet reste décevant.
D’autant plus qu’à ce saisissant sentiment désagréable de voyage en terre vaguement connue, s’ajoute celui plus concret de paysage similaire. Ainsi certains riffs, ou breaks, ne sont pas simplement cousins mais parfois presque frères de ceux produits par d’autres, et pas nécessairement de ceux que l’on imagine. Ainsi peut-on citer le break final de Pay the Price qui n’est pas sans nous rappeler celui de
Wild Child de
WASP ou encore dans celui ultime de Roadking dont l’atmosphère, caricaturale s’il en est, avec ses vrombissements de motos n’est pas sans nous évoquer le même morceau de la bande à Blackie
Lawless mais aussi, par exemple, dans
Nailed to the
Ground dont on jurerait que certains passages sont issus de l’excellent Whole Lotta Rosie d’AC/DC.
Bite the Bullet nous propose donc une musique très actuelle, pour laquelle il ne serait pas honteux de ressentir un certain plaisir si tant est que l'on puisse se satisfaire, uniquement, du contentement immédiat d’une première impression, mais pour laquelle il serait difficile de louer le concept artistique tant il est ténu. Chacun, suivant son positionnement, se fera son propre avis. Pour ma part je reste dubitatif face à aussi peu de renouvellement créatif.
Quant à savoir qui d’
Airbourne ou de
Bullet est le plus captivant ? La réponse demeure, toujours encore, AC/DC, bien évidemment.
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