Il est souvent difficile d’abattre les murs étouffants dans lesquels les esprits étroits de certains intransigeants aiment à s’enfermer. Les sensations connues, qui ne laissent place à aucune pérégrinations musicales empreintes de curiosité, sont souvent le socle rassurant de convictions aussi ineptes que fausses. Combien de fois avons-nous pu lire, voir, entendre les réactions haineuses et disproportionnés de fans outrés face aux attitudes inacceptables de certains groupes se laissant aller à enrichir leurs travaux en s’inspirant de celui d’autres, souvent totalement différents et parfois même opposés ? Pourtant la musique ne sort elle pas grandit se nourrissant, avec talent, d’influences diverses ? D’unions curieuses ? D’idées insensées ?
Lorsque Stefan Hertrich, chanteur du groupe
Darkseed, aidé de son compagnon de route Harald Winkler, et de Christian Bystron, donne vie à ce rêve ambitieux qu’est
Betray My Secrets, lorsqu’il enfante ce métissage ethnique et musical unique, composant un mélange habile et subtil de musique aux riffs sombres et basiques empruntant ces inspirations dans un Heavy
Metal assez classique, mais qui, mêlées aux psalmodies orientales, véritables chants rituels, aux voix Black, aux rythmes souvent lents, conférant à l’ensemble une ambiance
Doom/Death voir Gothique; avec, parfois, quelques légères touches Indus ; s’imagine-t-il vraiment qu’il vient de mettre au monde une œuvre captivante à bien des égards ? Œuvre qui ne restera pourtant qu’une voix inaudible au milieu de la cacophonie ambiante, bouillie sonore négligeable, de certains autres.
Néanmoins
Betray My Secrets est un véritable voyage intérieur où la richesse de composantes culturelles emporte nos sens vers une plénitude qui va bien au-delà du simple plaisir de l’écoute. Dès les premières mesures d’un « Shamanic Dreams » à l’intro envoutante, aux refrains où les hurlements gutturaux se mêlent aux litanies dans une supplique évidente, on ressent toute l’intensité d’une belle et forte émotion qui nous propulse d’emblée vers d’autres lieux. Enivré par ces premières impressions chaque morceau vient alors s’imposer à nous comme un nouveau paysage. Certaines chansons nous font voyagées aux milieux de montagnes abruptes, violentes, escarpées, alors que d’autres ne sont que douces promenades au sein de plate vallées convenues. Ainsi après un excellent « Shamanic Dreams », un «
Ever Expanding
Eternity » entêtant et un exaltant «
God And Me » ; «
Oh Great Spirit » parait fade et, avec ses chants clairs banals, ses flûtes anecdotiques, et ses chœurs moins orientaux qu'auparavant, semble n’avoir qu’à nous offrir les vertes plaines d’un morne pays ; c’est d’autant plus frustrant que le voyage était ébouriffant jusqu’alors. Difficile de se contenter d’un talus, aussi beau soit-il, lorsqu’on a gouté au sommet Himalayens. Heureusement que l’escale suivante, « Of Things Not Seen », reprends de la hauteur et nous ramène, nous tenant par la main et les sentiments, vers de plus vaste satisfaction. « Forgive
Them » est, quant à lui, le seul morceau dénué de tout samples, dénué aussi de tout intérêt, puisque nous ramenant vers un
Doom des plus classique qui n’est pas vraiment le propos de cet opus. Expirant un long soupir, les esprits s’échappent de nos bouches et nos narines, les visions deviennent confuses, moins belles, moins prenantes, moins troublantes, et il faut attendre jusqu’à « Little Wanderer », et ses parties de batterie martiales, pour retrouver la vue, l’odeur de l’encens et du bien-être. «
Save My Belief » amorce très délicatement sur une ambiance douce, alternant voix clair/gutturale et sample/synthé, la fin du périple qui se termine mourant dans une lente et délicieuse agonie avec deux instrumentaux.
Betray My Secrets signe avec cet album éponyme un ouvrage de grande qualité, totalement passé inaperçu, totalement oublié, dont seul quelques initiés purent goûter aux charmes et au dépaysement.
Merci pour ton commentaire très constructif.
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