Dis-moi, tu connais les Philippines ? Ah oui ce pays asiatique insulaire de 100 millions d'habitants avec un président fou qui veut tuer tous ceux qui ont un lien avec le trafic de drogues ? Euh… Oui, entre autres, mais je voulais surtout parler musique, et plus précisément du groupe
Sagrado. Un groupe de brutal death originaire de la banlieue de Manille formé en 2009, et qui, en l'année 2015, avait réalisé son deuxième album qui l'a vraiment propulsé sur la scène internationale.
Bon, tout d'abord, la pochette est trompeuse puisque celle-ci est principalement dans un registre de science-fiction alors qu'au niveau des paroles, on est surtout dans un registre morbide voire même scatophile. Il suffit de voir des titres comme "Cervix and Pee
Hole Soldering" pour s'en rendre compte. enfin, ça ne change rien à la musique qui, d'entrée de jeu, va s'annoncer brutale.
Lorsque commence le premier titre "Death Discrepancy" avec en guise d'introduction un extrait du jeu vidéo extrêmement controversé "
Hatred" où l'on incarne un tueur en série, puis arrivent les guitares et la batterie qui écrasent tout sur leur passage avec un hurleur porcin qui accompagne le tout pour nous accueillir dans cet abattoir de viande humaine. Rien qu'au son, on sent déjà l'odeur putride d'une montagne de cadavres empilés les uns sur les autres et dont chacun d'entre eux avait subi de son vivant mille et une tortures, putridité renforcée par la chaleur tropicale des Philippines. Seulement, il y a comme un hic dans tout ça.
Sagrado a beau vouloir jouer la carte de la brutalité à fond les manettes, il y a malgré tout un petit côté incomplet à la musique, comme s'il manquait une âme à l'ensemble. Il suffit d'écouter les rythmiques sur "Upon the Bloody
Altar of the
Bitch Godess" pour se rendre compte que malgré la brutalité ambiante, celle-ci est plus là pour faire joli que pour apporter quelque chose à l'ensemble. Certes, les musiciens connaissent leurs instruments et savent frapper là où ça fait mal, comme sur "Bukkake
Onslaught", mais un peu comme un boxeur qui frappe dans le vide, ça rajoute plus des longueurs qu'autre chose. On a l'impression d'entendre un
Aborted Fetus qui n'a pas appris de ses erreurs et qui cherche vraiment à en faire trop pour prouver qu'il maîtrise son sujet.
A cela doit s'ajouter le chant qui manque clairement de conviction : le simple hurlement peine à convaincre tant la justesse n'y est pas, comme sur "Your Throat Is My Natural Aphrodisiac", ou encore les
Pig Squeal à la ''
Prostitute Disfigurement" qui, en plus d'être un peu ratés, peinent à séduire, comme sur "Swallowing Is Her
Birth Control". Puis, dernièrement, une production un peu trop limpide qui enlève tout le côté poisseux de l'album, lui faisant perdre un peu de sa brutalité.
Est-ce que pour autant tout est à jeter ? Non heureusement, ce "
Bastardized by the Decrepit Whorebeast" reste tout de même cohérent dans sa structure : on ne saute pas du coq à l'âne avec des cassures rythmiques trop soudaines et arrivant comme un cheveu sur la soupe. Au niveau instrumental, on reste dans une certaine lourdeur, comme si l'on était écrasé par un éléphant. Et plutôt que de partir à 100 à l'heure pour tout détruire sans chercher à viser, le groupe sait alterner entre les vitesses pour aérer un minimum les chansons. Donc oui, les Philippins sont capables de faire passer un bon moment à un auditeur amateur de grognements et de riffs privilégiant l'efficacité à l'originalité ; mais soyons certains que ce ne sera pas ce disque qui révolutionnera le style ; sa seule originalité à la limite serait son origine philippine, et encore. Donc bref, un disque pas extraordinaire mais bien fait malgré tout.
12/20
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