Rien ne ressemble plus à un groupe de Stoner
Doom qu'un autre groupe de Stoner
Doom. Avec des principes de base aussi rigides, tout stratagème est bon pour sortir de la masse, au tout du moins ne pas s'endormir à faire une musique déjà entendue mille fois.
Void King, quartet américain formé en 2015 à Indianapolis, a pu compter sur un atout de taille pour se démarquer , la voix chaude et puissante à la Glenn Dantzig de son chanteur
Jason Kindred. Dans leur premier album "There is
Nothing", les riffs simplistes et monolithiques de Tommy Miller, ainsi que la section rythmique du batteur Derek Felix et du bassiste Bender Rodriguez se répétaient à l'infini, pendant que la voix faisait tout le boulot. Au point que seul le premier titre un peu plus enlevé avait réellement capté mon attention.
Ce premier LP a tout de même eu un accueil positif de la part de la critique et des fans, et le groupe a pu tourner aux USA et en
Europe, après avoir remplacé le bassiste Bender par Chris Caroll. De retour au bercail, le combo semble-t-il bénéficié d'un recul salvateur, et a décidé de travailler des compositions plus ambitieuses.
Il en résulte ce nouvel album mixé par Niko Albanese et masterisé par Dennis Pleckman (Guitariste de
Bongripper), sorti comme le précédent sur le label hollandais
Off The Record. A noter une petite bizarrerie : l'ordre des titres n'est pas le même suivant les sites de téléchargement et les sources, et du coup il est difficile de savoir lequel est l'officiel... à moins qu'il n'y en ait pas.
Il est clair que
Void King a passé un cap, surtout musicalement. Leur Stoner
Doom a pris de l'ampleur, avec des parties de guitare plus riches et variées. Si les riffs principaux privilégient toujours une simplicité écrasante, beaucoup de passages de guitare crunch, claire, ou agrémentée d'effets soignés donnent une couleur plus rock à l'ensemble. Les idées sont aussi meilleures, et collent vraiment au chant de
Jason Kindred.
Il règne une atmosphère onirique mystique sur "Crippled Chameleon", bien que quelques growls inquiétants fassent leur apparition en guise de chœurs fantomatiques à la fin du morceau. Ce procédé est aussi présent sur "Learning From the
Ashes" , et contrebalance le ton plaintif et emprunt de tristesse de
Jason.
Le chant de
Jason Kindred est plus que jamais le fil conducteur des morceaux de
Void King ; il a aussi mûri, et joue au caméléon. Selon les titres, sa couleur vocale apporte une légère teinte grunge, à la
Alice In Chains sur "A Lucid
Omega" , ou avec des lignes Cornelliennes sur "Burnt at
Both Ends". Et par moments, des accents tooliens, qui se retrouvent dans la musique, comme sur "Leftover Savages" dont la signature rythmique tarabiscotée serpente dans la fange.
Puisqu'on parle de batterie, le rythme d'ensemble est très lent et posé, sauf sur "Of
Whip and Seed" ou le tempo est un poil soutenu, tout en restant dans la lourdeur, et on se prend à headbanguer, euh… non, hocher sympatiquement du chef pendant le solo entrainant qui joue le point d'orgue du titre. C'est en ce qui me concerne le maillon faible de
Void King, le taf est fait, certes, mais le jeu de Derek Felix manque un peu de folie, et d'explosivité.
Si la production de ce "Barren
Dominion" est indubitablement plus riche, ce n'est pas la voix de
Jason qui est mise en avant, celle-ci est un peu rentrée dans le mix et évite l'écueil de phagocyter tout le reste. En revanche, le son de guitare de Tommy Miller change des canons du genre, avec une espèce de fuzz métallique et acide, au sustain interminable. C'est plus précis, mais à la longue, sur la fin de l'album, mon oreille a tendance à fatiguer d'entendre ce son de scie à métaux : varier les types d'effets de guitare saturée aurait été bienvenu.
"Barren
Dominion" est un bon deuxième album, si on peut dire, avec une évolution franche par rapport au premier, et son contenu mélodique le rend plutôt intéressant, avec ce coté grunge qui sauve
Void King de la banalité. Cependant, l'intérêt retombe un peu sur la longueur de l'album, d'autant plus que les morceaux sont assez longs, oscillant entre cinq et sept minutes la plupart du temps.
On ne peut qu'espérer une évolution du même ordre pour le prochain album, et surtout un peu plus de variété et de punch pour éviter le lent et désespérant sommeil du doom, qui guette l'adepte de la lourdeur jusqu'au bout des paupières.
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