Né de la rencontre entre Léo Watremez (France) et Marius Elfstedt (Norvège), Mirar est un duo instrumental qui repousse les frontières du metal contemporain. Leur univers repose sur une hybridation audacieuse entre la lourdeur du djent/thall, les textures électroniques et l’héritage de la musique classique. Cette approche à la fois expérimentale et raffinée place les deux musiciens parmi les projets les plus novateurs de la scène progressive actuelle.
Plus qu’un simple groupe de metal, Mirar explore une forme d’imaginaire sonore où chaque composition nous emmène dans un monde rempli d’émotions parfois contradictoires et dans une ressemblance souvent trompeuse avec
Vildhjarta et Humanity’s
Last Breath.
Avec
Mare, leur premier EP sorti en 2024, nos deux compères posent les fondations de leur vision ultramoderne. Les morceaux y marient des structures polyrythmiques et une intensité organique avec des citations directes de compositeurs tels que Rachmaninov, Bach ou Rameau. Ce choix risqué ne relève pas de la simple démonstration technique mais reflète une volonté d’abolir les frontières entre musique classique et metal extrême. La production, assurée par Léo Watremez, accentue cette tension entre agressivité et élégance et offre à l’ensemble une identité unique. Bien plus qu’un premier jet, cette esquisse dévoile une déclaration d’intention artistique et affirme que le metal peut être à la fois brutal et visionnaire.
C’est un an après cette entreprenante ébauche que le duo franco-norvégien présente son premier album complet
Ascension. Là où l’EP avait posé les bases d’une identité singulière, l’album tente d’aller plus loin en élargissant encore le spectre sonore. On y retrouve la marque de fabrique du duo à savoir des guitares saturées et des structures polyrythmiques. Mais cette fois-ci, les deux artistes y intègrent également des textures électroniques empruntées au dubstep et au breakcore qui sont contrebalancées par des touches classiques et jazz. L’ambition est manifeste et Mirar cherche à dépasser l’image du djent traditionnel pour construire une œuvre totale où la violence des riffs côtoie l’élégance d’un piano ou la froideur mécanique d’un drop électronique. Les morceaux oscillent ainsi entre déflagrations massives et instants de suspension plus contemplatifs dans une tension permanente entre chaos et légèreté.
Mais cette insatiabilité de la part de la formation dépasse quelques fois la cohérence. Dès l’ouverture avec Couronne, l’introduction pourtant prometteuse entre cette guitare acoustique délicate et nappes synthétiques cède rapidement le pas à une explosion sonore trop brutale qui instaure une rupture presque risible et témoigne d’un manque de retenue. L’ensemble du disque confirme ce sentiment où les riffs tonitruants, de grincements excessifs et d’harmonies discordantes freinent la densité émotionnelle. Failles témoigne entre autres de cette absence de sensibilité, la faute à un « bruit pur » caractérisé par un riff répétitif sans la moindre variation.
Pourtant, certains titres tirent leur épingle du jeu à l’instar de
Charnier ou Epreuve grâce à leurs magnifiques passages mélodiques, des parenthèses salvatrices bien rares au milieu de ce capharnaüm. Il en sera de même avec la captivante transition entre les morceaux Faux-Amis et Présage : dans la première mélodie, les guitares imposent leur gravité avant que des arpèges de clavecin ne prennent le relais dans la seconde. Ce « mélange » produit une sensation presque cinématographique, où la tension électronique fait place à une pureté classique tel un instant suspendu au cœur d'un tumulte quasi constant. Dans un ressenti général, la production est à nouveau exemplaire, des guitares qui hurlent avec une férocité parfaitement contrôlée, des programmations rythmiques qui frappent avec puissance et un mixage d’une densité presque tangible.
Ascension illustre parfaitement le dessein et l’innovation de Mirar qui ose fusionner djent/thall, électronique et musique classique avec une audace rare. Pourtant, cette démesure sonore se heurte parfois à ses propres limites entre riffs redondants, saturations excessives et passages confus qui freinent l’émotion et l’homogénéité de l’album. Malgré tout, certains titres révèlent une sensibilité et une finesse indéniables et offrent de véritables instants de grâce au cœur de toute cette agitation. En somme, ce premier opus est un disque sophistiqué mais inégal, où brillent à la fois le potentiel inventif du duo et les excès qui rendent l’écoute parfois éprouvante. L’ouvrage marque une étape essentielle dans la trajectoire de nos musiciens et augure d’un avenir prometteur s’ils parviennent à canaliser leur fougue créative.
Ah ça fait plaisir de les voir chroniquer ici. Pourtant ce genre n'est pas vraiment ma tasse de thé, mais Mare m'avait mis une sacré claque. Celui-ci, je le trouve plus inégal, trop long au final (ironique, alors qu'à la fin de Mare j'en veux encore plus).
En tout cas un groupe qui malgré le genre très codifié, arrive à se démarquer. Hâte de voir vers où ils vont aller par la suite.
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