Je sais que je suis un peu seul dans ce cas-là, mais la mode de la réédition en vinyle à tout crin dans le but de racler le plus de thunes à des chevelus persuadés d'être du coup des vrais rebelles parce qu'ils achètent le 'seul vrai format Underground' (comme tous les hipsters et bobos, hein) à des tarifs nécessitant un revenu de dealer de crack pour arriver à suivre toutes les sorties... Et bien cette mode me gonfle. Et c'est marrant de revoir du coup voir revenir la cassette, avec plein de gens qui disent que ouais finalement c'est le 'seul vrai format Underground'... Mais non, c'est pas un effet de mode, voyons qu'allez-vous penser là ?
Parenthèse terminée, cette mode de la réédition en LP permet donc à des albums qui n'avaient pas connus l'honneur du format à sa sortie de bénéficier d'une deuxième jeunesse. Dans le cas de
Warhorse, il faut bien reconnaître aussi que cela va permettre de trouver l'unique album du groupe (sorti en 2001 à l'origine) à un tarif plus correct que ce que vous aller payer sur Internet (pour info : à l'instant où je rédige cette chronique, le moins cher dispo sur Discogs est à 30 €...). Et comme le groupe était signé chez Southern
Lord Recordings, la réédition est un beau double LP comprenant en bonus le EP "I Am
Dying".
Concrètement,
Warhorse c'est quoi ?
Pas vraiment du Stoner, comme l'a écrit mon collègue chroniqueur précédemment, ni vraiment du
Sludge d'ailleurs. Plutôt un croisement assez bâtard entre le
Doom à l'américaine (il y a un groove qui rappelle pas mal la scène du Maryland), mais en bien plus lourd et ralenti. C'est sans doute là que peut se trouver l'analogie avec le Stoner (l'effet créé est assez similaire à faire un trip dans une chambre sans aération lors d'une journée de canicule estivale) et le
Sludge (c'est poisseux et nihiliste,
Warhorse ayant été à son époque l'un des très rares groupes ouvertement anti-chrétien dans le
Doom).
L'épaisseur des riffs est impressionnante, au point de créer un effet curieux donnant l'impression que l'on peut littéralement toucher la musique avec ses doigts. On peut presque parler d'un son titanesque, tant l'atmosphère créée se révèle physiquement écrasante. Définitivement une musique déconseillée aux asthmatiques. Et malgré celà,
Warhorse arrive à torcher un groove venimeux auquel il est particulièrement difficile de résister : que vous le vouliez ou non, l'écoute d'un morceau comme "
Doom's
Bride" entraînera systématiquement un mouvement de votre tête de bas en haut au rythme de la musique.
Décrit comme çà, on aurait l'impression que
Warhorse n'est qu'un clone de plus de
Electric Wizard. Sur certains points, ce n'est pas forcément faux ("Scrape" sonne comme un morceau rejeté des magiciens du Dorsetshire au sommet de leur art) et il est évident à l'écoute que "
Dopethrone" a été une influence certaine sur ce "As
Heaven Turns to
Ash". Mais à l'époque,
Electric Wizard n'était pas encore devenu aussi incontournable qu'aujourd'hui (et à entendre leurs derniers albums, on se demande bien pourquoi) et si
Warhorse fût influencé, les musiciens pouvaient garder la tête haute en se disant qu'ils avaient été parmi les premiers. A d'autres moments, les riffs bluesy en down tempo trahissent l'évidente influence des incontournables
Black Sabbath (notamment dans le jeu de basse, comme sur "Black
Acid Prophecy"), mais quel groupe de
Doom peut prétendre n'avoir JAMAIS été influencé par
Black Sabbath ? Surtout,
Warhorse était sérieux dans leur message.
Pas de trips inspirés par des films de séries B ou Z ici : juste un bon vieil athéisme de derrière les fagots, mélangé à diverses réflexions sur la drogue et la
Mort.
14 ans après sa sortie, cet album devenu rapidement culte au sein de la scène
Doom bénéficie donc d'une réédition. Bien que limitée à seulement 1000 exemplaires, c'est quand même une occasion unique pour ceux qui souhaiteraient enfin l'acquérir à un prix correct de se procurer ce qui est sans doute l'un des meilleurs albums de
Doom sorti dans les années 2000. Une séance de rattrapage à ne rater sous aucun prétexte.
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