De la poussière d'un garage de punk hardcore à l'antichambre des charts, il peut n'y avoir qu'un pas, pour un groupe de l'acabit de Scowl. Derrière l'indétrônable arena rock hardcore de Paramore, ce quintet de
Santa Cruz emmené par la pétillante
Kat Moss (et non, aucun rapport avec La Kate
Moss) s'est quelque peu fait remarquer. Jusqu'à avoir l'occasion de traverser l'Atlantique et de secouer la scène au Hellfest en 2024. Il y a avait le Scowl d'avant, brut de décoffrage et DIY, et celui d'aujourd'hui est bien différent.
L'histoire a débuté en 2019, avec la chanteuse
Kat Moss, le guitariste
Malachi Greene, et le batteur Cole Gilbert, qui ont ensuite trouvé un bassiste : Bailey Lupo. La formation a sorti trois EPs, et un premier LP lapidaire en 2021, "
How Flowers Grow" (dix titres de punk hardcore en près de 18 minutes, quand même), où la musique et la voix hargneuse de
Kat Moss étaient à l'aune du patronyme du groupe, qui veut dire "mine renfrognée". Elle décrivait celà comme "frapper un mur de briques", encore et encore, et le groupe l'a fait en multipliant les concerts, tournant sans relâche. Depuis 2022, le guitariste Michael Bifolco a complété le line-up.
A entendre les singles sortis depuis quelques semaines, je me demandais ce qui avait bien pu arriver au groupe pour se transformer à ce point, comme une vile citrouille changée en carosse qui roule sur les princes charmants.
Le changement était en cours, avec l'EP "
Psychic Dance Routine" en 2023, qui annonçait déjà le virage pop, qui serait radical intentionnel. De son côté, l'ingénue aux vocaux cyclothymiques explique avoir voulu se challenger à exprimer des choses de manière plus mélodique, alors que les autres membres ont aussi grandi en tant que musiciens.
"
Are We All Angels" est sorti le 4 avril 2025 sur le label
Dead Oceans.
Le pop hardcore de Scowl serait comme la réunion des Breeders, Green Day et
Nirvana, en laissant les contrastes jouer à fond. La voix de reste le plus souvent suave et vaporeuse barbapapa, explosant en screams suraigus et déchirés qui surgissent de manière incontrôlable comme des éruptions de syndrome de La Tourette.
Les compositions sont simples comme pouvaient l'être celles de
Nirvana, avec un minutage serré en dessous de trois minutes trente, et sont articulées autour de quelques idées. Cela permet des variations à l'infini sur le même format à base couplet/refrain: un riff moteur de gros lâchers de power chords punk avec le chant acidulé, un refrain addictif et entraînant, sur un rythme soutenu qui brûle d'écraser la pédale d'accélérateur. Les guitares sont grosses avec des larsens et harmoniques qui dépassent du cabas. La section rythmique brutalise le métronome, et sort parfois des rails sur des cavalcades de toms, où marque des breaks en tapant chaque note le plus fort possible.
Chaque titre a un ou deux hooks malicieux et bien trouvés qui réveillent l'intérêt : ce bend Nirvanesque sur le thème de "Fantasy", ces "Ouhouhou" dans "B.A.B.E" qui surnagent comme une blague de bébé content d'avoir trouvé un truc pour faire rigoler l'assistance, ou ce cri rauque comme un critters dans une salle de bains qui fait irruption dans le refrain de l'interrogatif "Fleshed
Out".
L'album se termine de manière chaotique sur "Are We All' Angels", semblant se dissoudre avec des riffs qui partent dans tous les sens, mais ce sont quelques mots doux et apaisés qui y mettent un point final.
Le Scowl brutassier des debuts a laissé place à un groupe de pop punk hardcore presque trop lisse pour être honnête, diront les mauvaises langues, mais diablement accrocheur sur ce deuxième album. En définitive, chaque morceau de ce "
Are We All Angels" aurait pu être choisi comme single tant la qualité est homogène avec toujours une capacité à être accrocheur sans avoir l'air d'y toucher. Le genre de disque qu'on voudrait détester mais qu'on se remet une fois pour la route.
Je suis complètement fan de cet album de mon côté. Par contre, je ne te rejoins pas sur cette phrase : 'A entendre les singles sortis depuis quelques semaines, on se demande ce qui est arrivé au groupe pour se transformer à ce point". En effet, il y a eu entre temps l'excellent EP "Psychic Dance Routine" qui annonçait clairement la transition musicale puisqu'on y retrouvait des titres purement Hardcore, des titres purement Pop et des titres mixant les 2. Du coup, aucune surprise de voir la direction prise par Scowl, même s'ils risquent évidemment de perdre des fans de la première heure.
Un grand merci pour la chronique
Chab: Effectivement, j'avais pas vu cet EP, qui est sur une autre page bandcamp du groupe, et c'est vrai que le virage est bien amorcé, c'est vraiment entre les deux. Je vais faire un petit raccord à la chronique, merci à toi pour le commentaire !
Pas de soucis :) Oui cet EP fait vraiment le raccord et, tant qu'à faire, il est excellent ;)
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