Liste des groupes Metal Moderne Arctis Arctis

Créé par cinq des membres du groupe de metal finlandais Nighon, Arctis évolue, lui, dans un espace metal moderne à chant féminin aujourd'hui en proie à une concurrence galopante. Conscient de cet état de fait, l'expérimenté combo nord-européen a savamment sculpté chacune des mesures de ses compositions et peaufiné sa production d'ensemble. Aussi, aux fins d'un minutieux travail en studio, le collectif réalise ici son premier album full length, « Arctis », signé chez Napalm Records. Cela étant, l'arsenal esthétique et technique déployé par nos cinq belligérants sera-t-il suffisamment efficace pour tenir en respect leurs homologues stylistiques, toujours plus nombreux à affluer ? Ce faisant, les 43 minutes du ruban auditif où se dispatchent les 11 pistes de la galette permettront-elles à nos compères de se hisser dès lors parmi les sérieux espoirs de cet environnement musical ?

A bord du navire, nous accueillent : Alva Sandström, chanteuse aux claires et puissantes inflexions, Michael Mikander et Björn Johansson aux guitares, Mats Ödahl à la basse, et Mika Paananen derrière les fûts. De cette collaboration de longue date émane un propos metal mélodique moderne aux relents pop-rock à la fois volontiers pulsionnel, souvent enjoué et des plus enivrants, où les sources d'inspiration seraient à chercher dans le patrimoine compositionnel de Volturian, Amaranthe, Metalite, Ad Infinitum et Delain. Laissant entrevoir un réel potentiel technique, au demeurant judicieusement exploité, et des mélodies finement sculptées et d'une redoutable efficacité, l'introductive rondelle jouit parallèlement d'arrangements instrumentaux de fort bonne facture.

Pour l'optimale mise en musique de ce set de partitions, la troupe s'est montrée particulièrement méticuleuse : cet album éponyme bénéficie d'un mixage relevant de la patte experte de Stefan Glaumann (Rammstein, Samael, Apocalyptica, Within Temptation...), doublé d'un mastering réalisé au Chartmakers à Helsinki par son propriétaire, l'ingénieur Svante Forsbäck (Rammstein, Amberian Dawn, Amorphis, Delain, Dark Sarah, Sonata Arctica...) ; en découlent une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation, des finitions passées au crible ainsi qu'une belle profondeur de champ acoustique. Autant d'indices révélateurs d'une sérieuse envie d'en découdre de la part de nos corsaires, qui sont autant de raisons de ne plus tarder à les suivre dans leurs pérégrinations en eaux profondes...

C'est sur une terre de lave en fusion que nos acolytes se plaisent à nous projeter, avec pour effet de nous aspirer dans la tourmente sans avoir à forcer le trait. Ce qu'attestent, en premier lieu, les organiques « I'll Give You Hell » et « Tell Me Why » tout comme les tonitruants « Fire » et « When the Lights Go Out ». Ces étourdissants up tempi metal moderne aux riffs acérés à la confluence de Ad Infinitum et Amaranthe livrent chacun un refrain catchy mis en exergue par les toniques impulsions de la sirène ; n'ayant de cesse de nous asséner de virulents coups de boutoir tout en sauvegardant des lignes mélodiques, certes, convenues mais des plus impactantes, ces ''tubesques'' offrandes ne se quitteront qu'à regret. On ne saurait davantage éluder la reprise ''metalisée'' de « Bimbo », hit pop du groupe de rock suédois Lambretta, actif entre 1993 et 2005 ; eu égard à la ferveur de ses riffs crochetés et à un break à mi-morceau à la fois troublant et des plus inattendus – contrastant alors avec le pont sautillant proposé par le combo suédois –, cette originale relecture apporte une seconde jeunesse à un titre ne manquant ni d'allant ni d'emphase.

Quand la cadence de leurs frappes se fait un tantinet plus mesurée, nos compères trouvent à nouveau les clés pour nous retenir plus que de raison. Ce que prouve, tout d'abord, « Remedy », entraînant mid tempo aux riffs acérés à la croisée des chemins entre Amaranthe, Volturian et Delain ; pourvu de couplets bien customisés, relayés chacun d'un entêtant refrain mis en habits de lumière par les claires et fluides oscillations de la déesse, le grisant méfait poussera assurément à une remise en selle sitôt l'ultime mesure envolée. Dans cette même dynamique, on pourra non moins retenir l'engageant et ''metalitien'' « WWM » tant pour ses enchaînements intra piste ultra sécurisés et son énergie aisément communicative que pour ses sémillants arpèges d'accords. Au regard d'un refrain immersif à souhait porté par les magnétiques modulations de la belle, le ''delainien'' mid/up tempo « Child of the Night » pourra, à son tour, se jouer de toute tentative de résistance à son assimilation. Enfin, c'est d'un battement d'ailes que le félin et ''volturien'' « No Slave » et l'''amaranthien'' « Theatre of Tragedy » imposeront leur seyant paysage de notes comme leurs truculents harmoniques.

Lorsque l'ambiance se fait plus feutrée, la troupe en profite pour nous adresser ses mots bleus les plus sensibles, non sans parvenir à déclencher la petite larme au coin de l'oeil. Ainsi, « Frozen Swan » se pose telle une ballade romantique jusqu'au bout des ongles, que n'auraient sans doute reniée ni Delain ni Ad Infinitum. Au regard de l'infiltrant cheminement d'harmoniques qu'il nous invite à suivre, qu'empruntent les angéliques ondulations de la maîtresse de cérémonie, de son insoupçonné changement de tonalité et de son fringant solo de guitare, l'instant privilégié comblera à n'en pas douter les plus exigeantes des attentes de l'aficionado de moments intimistes.

A la lumière d'un propos ne manquant ni d'énergie ni d'efficacité, n'accusant pas l'once d'un bémol susceptible d'affadir l'attention du chaland et reposant sur une ingénierie du son rutilante, le quintet finlandais s'en sort honorablement. Cependant, variant davantage leurs phases rythmiques que leurs ambiances ou encore leurs lignes de chant – la belle monopolisant le micro de bout en bout de leur parcours –, nos acolytes n'ont, par ailleurs, consenti que de bien rares prises de risques. Il leur faudra également diversifier plus encore leurs exercices de style et s'affranchir de l'empreinte de leurs sources d'inspiration afin de conférer davantage d'épaisseur artistique à leur projet. Affichant néanmoins un réel potentiel technique, faisant montre d'une féconde inspiration mélodique et témoignant d'une signature vocale aisément identifiable, la troupe nord-européenne disposerait dores et déjà d'armes suffisamment effilées pour espérer guerroyer sereinement parmi les sérieux espoirs de son espace metal d'affiliation. Bref, premières mesures et première incursion en terre d'abondance...