« When
Life turns to a nightmare, darkness overtakes... » voici les seuls mots qui accompagnent cet album. Une phrase de désespoir semblant résumer les pensées, la vie de Lu. Musicien originaire de Tai'an (comme les géniaux
Deep Mountains), durement affecté par la mort d'un proche, Lu se réfugie dans les deux projets qu'il a créés, Vergissmeinicht et
Heartless, pour y exprimer sa mélancolie, sa douleur, son mal être. Tandis que Vergissmeinicht, avec sa guitare acoustique solitaire et ses mélodies cristallines semble davantage exprimer un désespoir lumineux, une mélancolie touchée par la grâce,
Heartless représente le côté le plus sombre et torturé du musicien solitaire.
Après quelques démos et un split au milieu des années 2000,
Heartless signe sur le label
Pest Productions et sort en 2008 un premier album intitulé
Suicidal Engagement, oeuvre noire et crue, presqu'en même temps que le premier album de Vergissmeinicht. 3 ans plus tard, Lu remet le couvert et sort à quelques semaines d'intervalles et comme pour mieux témoigner de sa personnalité malade, le second album de Vergissmeinicht et donc cet
Anaesthetization de
Heartless.
Si
Suicidal Engagement se voulait assez cru et primaire, malgré des passages atmosphériques et mélodiques de fort bonne facture,
Anaesthetization semble privilégier le développement des atmosphères. Les compositions sont longues (45 minutes de musique pour 4 morceaux et une intro), les riffs répétés longuement pour imprimer le côté aliènant de la musique et laisser se développer les ambiances mortuaires du disque. Les rythmes sont pour la plupart lent. A son Black
Metal originel
Heartless ajoute des éléments
Doom pour amplifier la monotonie et le désespoir d'une musique qui n'en demandait pas tant.
Entre mélodies et arpèges désespérés, riffs
Doom/Thrash ou typiquement Black
Metal, les guitares se superposent à merveille et offrent des ambiances travaillées. Les morceaux évoluent sans que l'auditeur ne s'en apercoive. La batterie martèle avec une rigueur implacable des rythmes froids et volontairement simples, se permettant à un seul moment une accélération de désespoir (
Conspiracy) en blastant sur un riff mélancolique.
Le chant se résume à de longs soupirs dans lesquels on semblerait percevoir des hurlements, comme des soupirs d'agonie. Fini les hurlements survoltés d'enfant épileptiques (dont on ne saurait dire s'ils étaient finalement dérangeant et ridicules) qui gâchaient quelque peu,
Suicidal Engagement. Les sussurements macabres et hurlements étouffés font ici froid dans le dos. Ecoutez l'introduction de Falsehood, seul, en marchant dans la nuit, flippant! Et au milieu de tout ce mal être, semblent jaillir, comme de brefs moments de lumière, les arpèges mélodiques et réverbérés de Lu (
Anxiety,
Illusion). Inquiétantes accalmies, nous rappelant que ce que nous écoutons est bien humain et servant à mieux nous replonger dans les méandres insondables de tristesse que sont les morceaux de cet album.
La production est, quant à elle, exceptionnelle (une constante chez
Pest Productions) et permet de conserver le côté sale, obscur et granuleux de la musique tout en restituant le travail mélodique accompli sur les riffs (le travail mélodique réalisé sur la basse est parfaitement audible). Oeuvre noire et torturée,
Anaesthetization se révèle au fil des écoutes, dévoile ses subtilités et se pare d'une troublante beauté qui le rend dangereusement addictif. Un coup de maître!
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