Croyez-moi, malgré un patronyme un rien barbare et difficile à prononcer, je vous assure qu’
Ofdrykkja vous veut du bien. Déjà, de par la signification de ce nom étrange, qui semblerait être une incitation à arrêter de boire (merci les gars !) et ensuite, malgré un premier album gentiment dépressif marchant sur les plate bandes des Livelover et autres
Vanhelga (intitulé
A Life Worth Losing, ça ne s’invente pas !), car la musique du trio suédois évolue lentement vers quelque chose de plus apaisé et lumineux depuis ses débuts en
2012.
Pour le coup, il semblerait que
The Calm After the Storm, qui porte décidément bien son nom, soit l’aboutissement de cette lente mutation : c’est un fait, la vie évolue, et avec elle, l’art du trio, qui se veut la libération cathartique des émotions de leurs géniteurs ; si l’on en croit la musique, on peut affirmer que l’existence est moins pourrie depuis quelques années pour The Associate, Drabbad et Pessimisten qui ont visiblement laissé leurs lames de rasoir et autres cordes de chanvre au placard : ici, pas de distorsion, de lyrics maladifs ou de hurlements vibrants de détresse et de dégout de soi, ces 31 minutes baignent du début à la fin dans cette atmosphère fragile, belle et vaporeuse à l’image de la pochette qui illustre magnifiquement ce quatrième album, et tout respire la sérénité et la contemplation.
Pour ceux qui connaissent déjà le groupe, la continuité avec
Irrfärd est évidente (rien qu’à comparer les deux artworks, on a des indices tangibles), et on retrouvera de nombreuses mélodies du deuxième full length épurées et magnifiées par cette sensibilité acoustique qui nous caresse comme un souffle : ainsi, le morceau éponyme, merveille de langueur et d’émotions qui nous bercent, avec ces doux arpèges et les vocaux angéliques de Miranda Samuelsson qui semblent vouloir nous guider au milieu de cette pluie d’embruns, reprend le thème d’introduction d’
Irrfärd, tandis que les arpèges forestiers de
Beyond the Belt of
Orion, qui se répètent en une boucle entêtante pendant 8 minutes, chuchotant à notre oreille comme la brise d’un vent d’automne, ne sont qu’une réinterprétation un peu plus lente, solennelle et frissonnante de l’ouverture d’En Vandrares Börda.
La voix de Samuelsson, d’une pureté cristalline, et épousant parfaitement les intonations mélancoliques d’Ahlström et Jansson (le très beau The Mære, le sublime morceau éponyme aux parties de chant qui nous hantent encore longtemps après que les dernières notes de
Beyond the Belt of
Orion se soient perdues dans le silence), aidée par ces notes de guitare évanescentes, enveloppe l’ensemble de ces sept titres dans une sorte de brume onirique qui nous plonge dans un état de recueillement proche du sacré.
Soyons clairs, aucun élément black metal ici, seulement 31 minutes d’une folk intimiste et poignante qui n’a pas besoin d’en faire trop pour imposer sa magie, et si les instruments tels la harpe, le violon ou les percussions sont bien présents, ils restent discrets, feutrés, sans exubérance, toujours au service d’une musique à fleur de peau d’une justesse et d’une beauté bouleversantes (The Light, avec ces accords de guitare placides, le violon langoureux qui fait tanguer la fin de
The Cleansing).
Ofdrykkja n'hésite pas à faire quelques timides incursions dans des contrées post rock ou dark pop mais reste toujours étonnamment cohérent, et le maître mot de ce quatrième album restent atmosphère et émotions.
After the Storm est donc une sorte d’ode authentique, sobre et touchante qui nous prend par la main et étale sous ses arpèges intemporels la majesté immaculée de la nature scandinave, nous offrant une communion spirituelle avec les dieux d’
Asgard.
Le seul reproche que l’on peut faire à cette musique divine, c’est qu’elle s’arrête trop vite, et il faut bien avouer que les Suédois ont été un peu avares sur ce coup-là... Qu’à cela ne tienne, si tous les calmes après la tempête devaient ressembler à celui-là, je vous assure que je serais prêt à essuyer bien des bourraques…
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