Faire du neuf avec du vieux est une des tandances dans le metal du 21ème siècle. C'est vrai dans le deathmetal, avec des reformations de groupes, mais aussi avec des formations issues de partout, tentant avec plus ou moins de succès de faire revivre les années charnières 89-91. Ainsi fut la fin des années 80, synonyme de nouveaux sons, riffs et accordages d'une musique devenue extrême par définition sur les cendres d'un thrashmetal bientôt déclinant.
De grands albums en sont sortis, œuvres irremplaçables dans le cœur des fans, et générateurs de courants musicaux développés ensuite.
Altars Of Madness ou
Tortured Existence (
Morbid Angel,
Demolition Hammer) en sont quelques exemples, choisis ici pour situer le propos de
Derogatory et de son premier album. Sorti chez FDA-Rekotz (
Sulphur Aeon, quand même !), l'album fait suite à une démo 3 titres ayant eu grand succès aux Etats-Unis en décembre 2011.
D'une durée de 39 minutes, idéale pour ce type de musique,
Above All Else propose un deathmetal véloce et agressif, puisant ses inspirations dans des structures thrashmetal, comme aux plus beaux jours des premiers méfaits de groupes américains cités ci-dessus. Riffs rampants (quand je vous dis que le grand
Morbid Angel est passé par là), accélérations percutantes, tempi énergiques, débridés et véloces, structures à tiroirs, tout est réuni pour faire passer au deathster averti un agréable moment de remontée dans le temps. Ainsi, les terribles "Into The
Depth Of Time", "
Immortal Divine" ou "
Above All Else" abattent leur jeu implacablement, provoquant un sourire mécanique devant tant de similitudes et de dextérité instrumentale. Parfois très rapide, parfois plus subtil, souvent à l'intérieur d'un même morceau,
Derogatory déroule ses titres avec conviction, et marque les esprits avec un sens de la composition remarquable (on pourrait citer tous les morceaux). Les Californiens, amené par un esprit tout droit sorti de 1989 et avec un look approprié à ce contexte, nous font ainsi revivre une époque bénie, où chaque nouvel album allait presque devenir un classique, et définissait un son nouveau.
Néanmoins, et c'est là que le bémol pourra en rebuter certains, si le son, justement, est résolument à l'ancienne, il manque furieusement de relief et de clarté. Les instruments sont un peu noyés, et la batterie, notamment, n'est pas assez mise en relief, gâchant ainsi l'impact global des morceaux. Egalement, tant de ressemblances avec les grands anciens (le chanteur est réellement imprégné par David Vincent première période, les noms de titres de certains morceaux, certains soli, les accélérations similaires aux premières années de l'Ange Morbide, le propos général) pourra, au choix, plaire ou non, situant peut-être les limites de la propension du groupe à se développer.
Mais ne boudons pas notre plaisir.
Above All Else sera un grand pied pour les fans d'un deathmetal du siècle précédent, avec une indulgence pour un son étouffé typé Morrisound, et des albums cités. Avec un savoir-faire indéniable, et des compositions solides et fort bien structurées,
Derogatory en impose. Chaque riff semble parfaitement coller avec le précédent, formant de vrais morceaux, réellement percutants. C'est la force de ce disque, envoutant et attachant, comme un amour de jeunesse retrouvé, qui aurait vieilli de 25 ans, mais avec lequel on ferait bien une petite infidélité, histoire de passer un bon moment et de se rappeler avec béatitude les années passées.
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