Étrangement, l'idée de chroniquer cet album ne m'est venue que très récemment, et pour ainsi dire, j'avais presque oublié son existence, alors que je l'avais beaucoup écouté par le passé. Comme il y a eu des compilations de reprises de
Scorpions, d'Iron Maiden, ou même d'Accept, cette fois c'est au tour d'ABBA, à ceci près que ce n'est pas un groupe de
Heavy Metal qui est repris ici. Cela a donc obligé les groupes présents à redoubler d'inventivité, et donc conduit à un sacré paquet de (bonnes) surprises. Car plutôt que d'avoir pris des noms assez prestigieux comme sur les trois compilations citées précédemment, il s'agit ici en majorité de groupes peu (ou pas du tout) connus.
Notons tout de même la présence d'
At Vance,
Sinergy, et même des suédois de
Therion (qui sont d'ailleurs concentrés au début, peut-être pour ne pas déstabiliser le client). Cette compilation a aussi pour moi, et pour d'autres certainement, une grande dimension nostalgique. Je ne parle pas de la nostalgie d'ABBA, que je suppose quasi-inexistante chez les métalleux, mais de la nostalgie d'un
Sinergy encore en activité à l'époque, d'un
At Vance avec
Oliver Hartmann, d'un Andrew MacDermott (chez son ancien groupe
Sargant Fury) encore vivant ... Cependant pas de
Rough Silk avec Jan Barnett, celui-ci étant parti peu avant. Un dernier mot avant de véritablement parler musique : on remarque la vaste palette de genres auxquels les groupes appartiennent, allant du symphonique au
Thrash en passant par le power. On reste cependant tout le temps en chant clair, peut-être dans un souci de cohésion.
C'est à
Therion que revient l'honneur d'ouvrir cette compilation, avec le fascinant
Summer Night City. Ce titre, à la base relativement éloigné des tubes habituels de ABBA, convient ainsi parfaitement aux suédois, avec ces chœurs mystiques et ces ambiances arabisantes. Le fait de retrouver l'atmosphère de
Deggial, sorti peu auparavant, ou Secret of the Runes sur une chanson d'ABBA est impressionnant, mais pas dérangeant. Les suédois de
Therion s'approprient réellement l'ambiance de la chanson, y ajoutent leur patte, mais sans la dénaturer. Le difficile exercice de la reprise est ici parfaitement réussi, dans les règles de l'art.
Et ils ne seront pas les seuls dans ce cas.
Sinergy a hérité du tube planétaire Gimme, Gimme, Gimme, et s'il était difficile de faire quelque chose encore plus catchy que la version originale, les finlandais ont relevé le défi. L'entrain de la pop associé à la puissance du
Heavy Metal a créé un monstre de mélodie dévastateur, tubesque à souhait. La voix de Kimberly Goss survole le tout, démoniaque, enragée, déchaînée. Les guitares de Laiho et Latvala vrombissent, et lâchent des mélodies d'une puissance inouïe, tandis que la basse de Marco Hietala se fait lourde et rapide.
Dans un autre registre, les allemands de
Rough Silk se sont occupés de Take a Chance on Me, en s'éloignant bien de la version d'origine. La pop d'ABBA est ici accommodée à toutes sortes d'effets sonores propres au
Heavy Metal progressif de
Rough Silk. Comme sur beaucoup de titres de cette compilation, la voix a un grand rôle quand il s'agit de donner un aspect metal aux morceaux. Ici, Thomas Ludolphy fait du bon travail, en particulier lors de montées en puissance, rendant alors son chant légèrement rocailleux.
Parmi les nombreux combos de power metal invités, beaucoup ont fait un travail correct, pourtant sans grandes innovations.
Nation reprend bien l'âme originale de Waterloo, avec son power metal allemand joyeux, tandis que
Custard fait le minimum syndical avec Super Trouper. En revanche,
Tad Morose joue avec plaisir, et ça se sent, en reprenant le fameux Knowing Me, Knowing You. Le vocaliste s'en donne à cœur joie, avec des lignes de chant puissantes très typées
Heavy Metal. Quant à
At Vance, comme dit plus haut, c'est le chant power metal qui rend le morceau intéressant, avec des passage dans les aiguës bien efficaces. Ces derniers semblent d'ailleurs très attachés à ABBA, puisqu'ils ont repris d'eux deux autres chansons.
Cependant, et comme très souvent dans les compilations, on trouve plusieurs morceaux largement passables. C'est le cas de SOS, confié aux
Thrashers de
Paradox, qui n'ont effectivement pas rempli leur contrat. Si la reprise donne l'impression d'être baclée, le problème ici est surtout dû à la production, très moyenne sur ce titre. C'est d'ailleurs l'une des plus grandes difficultés de la compilation ; puisque la production est différente sur chaque titre, un son moins bon peut vraiment plomber le morceau par rapport aux autres. Le Dancing Queen de
Glow en est lui aussi victime, ce qui est dommage pour clôturer l'album.
Cet album de reprises d'ABBA est en quelque sorte un ovni, non pas par le caractère sensationnel de ce genre de compilation, mais par la diversité des idées trouvées par les groupes pour s'éloigner de la version originale. Le spectre assez large de genres musicaux représentés y est certainement pour quelque chose. De plus, on peut aussi apprécier certains morceaux comme s'ils étaient directement l'œuvre du groupe qui joue ; je pense particulièrement à Eagle, par
Sargant Fury (avec MacDermott), qui s'approprie vraiment le morceau, pour le faire coller à son univers musical. On peut aussi apprécier simplement ce disque comme un aperçu d'une scène metal européenne peu connue et pour entendre de nouveaux groupes.
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