Il n’existe sûrement pas de genre plus dépressif qu’un
Doom Funéraire bien exécuté si ce n'est le Black dépressif, comme son nom l'indique. Beaucoup de groupes ont en effet centré leur musique afin de pousser l’auditeur dans les profondeurs du désespoir tel
Funeral (dont notre groupe s’est grandement inspiré notamment au niveau du chant), voire même jusqu’au suicide (
Carpathian Forest et leur terrible
Nostalgia). Le
Funeral Doom est caractérisé par une lenteur hypnotique, une ambiance froide, angoissante, rêveuse, et un son souvent lourd. Voilà donc ce que l’on doit attendre d’un groupe de ce genre, et ainsi de ce Step Into the Waters of Forgetfulness.
L’artwork de ce premier album de
Woe Unto Me nous amène justement vers la possible présence de la mort : le vieux portrait (comme on peut en trouver dans les vieilles montres du XVIIIème siècle) d’un homme qui, d’après sa joyeuse expression faciale, doit se préparer pour un enterrement. La mort doit donc occuper une place importante dans l’album, et se ressentir dans la musique elle-même.
Et les sept membres du groupe nous abreuvent de toute une gamme d’artifices afin de nous faire plonger le plus loin possible dans cet abîme, cette obscurité. En premier lieu, les claviers atmosphériques, cœur même des compositions, créent une sorte d’hypnose (comme le font ceux de Shape of
Despair et notamment dans "
Illusion’s Play") et rendent ainsi les productions planantes comme dans un rêve éveillé (le long instrumental F4 en est un bon exemple). La basse, immense, surpuissante, nous happe complètement. Nous sommes pris au piège dans ces lenteurs insupportables, englués dans ces riffs d’une lourdeur désespérante. Le désespoir est renforcé par la présence de quelques violons (Slaugh of
Despond) dressant un tableau inquiétant à la
Skepticism. Ajoutés à cela quelques sonnâtes de cloches, des orgues, des murmures inquiétants et un temps pluvieux (The Gospel Reading, F4), la peinture de la mort est omniprésente et totale.
Le chant, lui aussi, est une pièce maîtresse des compositions et de l’album en général. D’une part, Artyom Serdyuk nous offre une voix puissante, profonde et désincarnée pouvant rappeler celle de Gregor Mackintosh (
Vallenfyre), tandis que Sergey Puchok se targue d’une voix plus claire, lyrique mais tout aussi sombre. Les deux vocalistes instaurent une sorte de dialogue (Angels To
Die), et on pourrait penser à une discussion entre un spectre et une autre personne en pleine confrontation (directe ou non) avec la mort dans un enterrement, par exemple. Julia Shimanovskaya apporte un chœur féminin, tel que l’avait fait
Funeral avec son premier album également (Tragedies), nous plongeant dans une sorte de messe remplie de tristesse (
Stillborn Hope). Les solos, justement placés, viennent jouer avec nos émotions et renforcent ce sentiment de désespoir apporté par le chant et le reste de l'instrumentation, mais donnent paradoxalement une dimension planante à l'album.
Woe Unto Me nous abreuve donc d’une mélancolie et d’une tristesse incommensurable. La longueur de l’album (55 minutes pour 5 titres), la forte complémentarité des titres (The Gospel Reading et
Stillborn Hope pourraient ne faire qu’un, et F4 n’est qu’un préambule à Angels to
Die) et la majesté des compositions nous transportent bien plus loin que les frontières du Ciel. Nous ressortons complètement vidés et ébahis de cette écoute, et mesurons à quel point nous pouvons être heureux...d’être en vie !
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