Nous ayant laissés sur une impression mitigée à l'aune de leur introductif EP éponyme et demeurant absent des studios durant près de cinq ans, nul n'aurait parié sur un quelconque retour du sextet suédois sur le devant de la scène. Déjouant tout pronostic, le combo nord-européen revient plus déterminé que jamais, doté, cette fois, d'un album full length généreux de ses 50 minutes où s'enchaînent dix pistes inédites. C'est dire que Catalina Leonte et ses acolytes caressent désormais le légitime espoir d'élargir le champ encore restreint de leur auditorat. Jouissant d'arrangements de fort bon aloi et d'enchaînements plus sereins aujourd'hui qu'hier, cette plantureuse rondelle leur autorisera-t-elle l'accès au rang de valeur montante du metal symphonique à chant féminin ?
Le groupe suédois continue d'officier dans un metal symphonique gothique et progressif aussi vitaminé qu'énigmatique, nous faisant penser tour à tour à
Lacuna Coil,
Evanescence,
Gwyllion,
Asylum Pyre. Si l'influence de ses sources ne saurait être éludée, la troupe a à nouveau apposé son sceau sur chacune de ses compositions, notamment à la lumière de ses arrangements instrumentaux et d'un jeu d'écriture articulé, cette fois, autour de thèmes aussi fondamentaux que la vie et la mort, le paradis et l'enfer. En outre, enregistrée par le groupe lui-même et judicieusement mixée par David Castillo, l'opulente galette n'accuse que peu de sonorités parasites et d'effets de compression de l'espace sonore. Album qui, par ailleurs, recèle un agencement somme toute classique de ses pistes. Aussi, passée la cinématique et dispensable entame instrumentale, «
Another Day... », le spectacle peut enfin commencer...
Quand les fûts s'ensanglantent et que la rythmique se montre des plus offensives, c'est à un véritable déluge auquel le combo suédois nous convie, avec quelques perles à la clé. Ainsi, dans la lignée de
Lacuna Coil, l'oppressant up tempo «
Silent Cry » ne nous laissera que peu de temps pour reprendre notre souffle. Nous octroyant également un flamboyant solo de guitare à mi-parcours, nos compères ne rateront pas leur effet. Dans cette mouvance, on retiendra le tempétueux «
Indicium » qui, dans la veine de
We Are The Fallen, dissémine des couplets bien customisés relayés par des refrains immersifs à souhait, et ce, tout en réservant de sidérantes montées en puissance du corps orchestral.
S'il lui vient à l'idée de multiplier ses séquences rythmiques, le collectif nord-européen n'aura pas davantage tari d'inspiration, réservant même quelques moments de pure jouissance auditive. Ainsi, dans l'ombre d'un
Evanescence des premiers émois, le mid tempo progressif et syncopé «
Beneath the Bridge » distille une énergie aisément communicative, ses riffs epais et cadencés, tout en nous calant sur ligne mélodique des plus savoureuses. Bref, un hit en puissance poussant irrémédiablement à une remise du couvert.
Parfois, le propos se fait techniquement plus complexe, se plaisant alors à nous bringuebaler pour mieux nous retenir. Ce qu'illustre, d'une part, «
Resistance Is Futile », trépident effort faisant claquer sa basse tout en développant un subtil legato à la lead guitare. Si le caractère enjoué de l'offrande ne saurait être mis à mal, la sente mélodique, quant à elle, accuse de gênantes linéarités et l'exercice n'est pas exempt de ponts technicistes qui ne s'imposaient pas. Le magmatique «
Rebellious Angel », pour sa part, imposera à la fois ses riffs en tirs en rafale, sa bondissante reprise sur la crête d'un bien grisant refrain et surtout la virile et magnétique empreinte vocale de Björn
Strid (
Soilwork, Nightflight Orchestra).
Par ailleurs, et pour la première fois, nos acolytes se sont adonnés à de pléthoriques pièces en actes, dispensant, par là-même, de saisissants effets de contraste rythmique. Ce qu'ils nous prouvent déjà à l'aune des 8 minutes de la fresque « Rise of Isolash », épique méfait où un gracieux picking à la guitare acoustique alterne avec des riffs corrosifs adossés à une sanguine rythmique.
Plus encore, et non sans rappeler
Gwyllion, le foisonnant «
...in the Waiting Room of Death » dissémine ses 11 minutes d'un parcours abondant en effets de surprise. En dépit de la durée de la piste et de quelques longueurs, et en raison de ses nombreux coups de théâtre, ce dantesque manifeste parviendra néanmoins à générer un maintien constant de l'attention.
Lorsqu'il se fait caressant, le combo nous livre de frissonnants instants aptes à nous retenir plus que de raison. Ainsi, l'accroche s'opérera d'un battement de cils sur « Desolé », délicieuse ballade romantique, sensible jusqu'au bout des ongles, que n'auraient reniée ni
Gwyllion ni
Autumn. Dans ce bain orchestral aux doux remous évoluent les sinueuses et hypnotiques inflexions de la belle. Bref, un moment privilégié, fortement chargé en émotion, que l'on ne quittera qu'à regret.
A la lecture de cette livraison, force est de reconnaître que les progrès logistiques et techniques réalisés par le combo suédois sont réels. De plus, le sextet a veillé à étoffer son offre, nous octroyant dès lors un message musical diversifié sur le plan rythmique et vocal, riche en arrangements, et plus abouti que son aîné quant à l'élaboration de ses harmoniques et à la précision de ses lignes mélodiques. Est-ce à dire que nos compères auraient désormais atteint le quasi sans-faute ?
Pas tout à fait. En effet, pourtant doté de fringantes montées en régime et d'un seyant solo de guitare, le mordant « In Your
Eyes » demeure en proie à une bien palote mélodicité tout en abondant en d'inutiles phases technicistes. Aussi, s'ils ne signent pas là une œuvre majeure, nos gladiateurs démontrent toutefois qu'ils ont élevé d'un cran le niveau de leurs exigences quant à la production d'ensemble et qu'un brin de maturité supplémentaire imprègne dorénavant chacune des portées de leurs compositions. Décollage amorcé pour le groupe suédois, donc...
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