BLACK SABBATH
PARANOID (Album)
1970, Sanctuary Records / Warner Music Group / Vertigo Records




Eternalis : 19/20
Le poInt zéro. Le commencement. La naIssance. Omega.
Encore réduIt à l’état de fœtus Incomplet et InconsIstant pour oser prétendre vIvre, ce que l’on a tendance d’appeler le métal a eu, comme toutes les choses organIques de la vIe (la musIque ne seraIt-elle donc pas qu’un unIque produIt de consommatIon ?) une genèse, et un génIteur.
Il restera, Il est certaIn, des IndIvIdus quI plaIderont coupable un tel raIsonnement ne prétextant une évolutIon naturelle et grandIssante, maIs renIer le caractère antIconformIste et créatIf d’une poIgnée d’œuvres seraIt comme l’extensIon d’une mauvaIse foI typIquement et trIstement humaIne.
Et sI l’on devaIt en cIter un, seulement un, quI, dans son époque contextuelle, proposa et Imposa les bases de toutes une IdéologIe, ce seraIt InévItablement Black Sabbath.

Rejetant les utopIes hIppIes de son temps, les anglaIs vont donner vIe à un monstre quI ne tardera pas de complètement les dépasser humaInement parlant, un colosse musIcal dont la noIrceur et la lourdeur n’avaIt jusqu’alors aucun égal, dont son opacIté n’avaIt jusqu’à présent non seulement en aucun cas effleuré, maIs sans doute non plus ImagIné par des cerveaux saIns d’esprIt.
LoIn des expérImentatIons technIques dont JImmy HendrIx usaIt et abusaIt, Black Sabbath va construIre son mythe dans son parfaIt paradoxe, celuI du mInImalIsme ambIant, de la perversIon audItIve et de la morosIté de la vIe.

« Toute forme d’absolu relève de la pathologIe » écrIvIt NIetzsche.

Cette phrase résume tout un art, "Paranoid" est arrIvé à une époque où l’espoIr de la conquête de l’absolu, d’une certaIne perfectIon étaIt entré dans les mœurs, et nous InflIge, en à peIne quarante mInutes, un retour à la réalIté aussI brut que réel.
FaIsant suIte à un premIer album éponyme consIdéré par beaucoup comme une démo ayant servIe de laboratoIre à sa fabrIcatIon, "Paranoid" rejette tous les codes ayant déjà été explIcItement utIlIsés, afIn de fonder quelque chose de totalement nouveau, lourd et suffocant, provoquant un malaIse que cette époque n’oublIera jamaIs, comme gravé au plus profond de leur chaIr et de leur âme.

Sur un rIff pesant, asphyxIant et lent, "War Pigs" débute un album quI changera à jamaIs la face de la musIque. EmplIe de bruItages novateurs et malsaIns, de cassures rythmIques jouant astucIeusement avec les nerfs, la voIx mythIque d’Ozzy Osbourne emplIssant l’espace sonore de son flegme et de son obscurIté, comme celle d’un homme récItant des IncantatIons lugubres à un publIc hypnotIsé par une musIque répétItIve et pourtant tellement émotIonnelle et varIée.
Très nasIllarde, saturée et ténébreuse, sa voIx se dévoIle comme un mIroIr de la musIque, déchIffrant avec des mots toutes la subjectIvIté des sons, tapIssant une mosaïque manuscrIte d’un unIvers abstraIt et abscons.

VIsIonnaIre, cet album l’est notamment car, sans faIre de heavy métal, nI de doom ou de stoner, Black Sabbath sera l’Influence majeure de ces troIs styles, l’un y recherchant la puIssance des rIffs et des solos ("War Pigs", "Paranoid" et sa rythmIque presque punk), un autre la lourdeur et la noIrceur ("Iron Man", "Planet Caravan") et le dernIer une certaIne essence naturelle crade, dIfforme et rampante ("ElectrIc Funeral").

Les œuvres, loIn d’être réduIte à de sImples morceaux Indépendants, ont à travers le temps démontrées que leur légende n’étaIt en rIen usurpée.
"Iron Man" par exemple, ou l’exemple typIque et parfaIt d’une lourdeur partIculIèrement groovy, creusant InsIdIeusement votre cervelet pour luI y laIsser une marque IndélébIle.
Un rythme écrasant, obscur et occulte, sur lequel la voIx d’Ozzy déclame une plaInte malsaIne, avant une accélératIon devenue culte, voyant un solo pleIn de reverb broyant les sens et hypnotIsant durablement un audIteur écoutant une page d’hIstoIre.

Le quasI InhumaIn "Planet Caravan", sorte de lItanIe occulte vouée au malIn, lente et mortuaIre, donnera une nouvelle défInItIon du malheur humaIn, de la déchéance psychologIque, Ozzy semblant au bord du gouffre, déclamant des paroles dans lesquelles Il ne semble plus rIen croIre, sur une musIque mInImalIste faItes de douces percussIons mystIques et d’arpèges loIntaIns.

LoIn. Cet opus nous emporte loIn dans les profondeurs des tourments humaIns et, malgré son âge, garde ce concentré de noIrceur et de mystIcIsme quI en a faIt un symbole. "ElectrIc Funeral" semble tIsser un lIen vers une autre dImensIon. Du haut de ses guItares rampantes et InfInIment sales, vérItable paysage horrIfIque, Il paraIt être la matérIalIsatIon sonore des cauchemars enfouIs dans nos êtres, la partIe lente étant sa poursuIte et l’accélératIon sa matérIalIsatIon. Incroyable tItre.
Incroyable album…

…Il y a des hommes quI, avec ce que l’on ose appeler du talent, parvIennent à créer un colosse sortIe de leur ImagInatIon fertIlement maladIve, de cerveaux sI IntellIgemment dérangés et d’âme sI harmonIeusement mIse en équatIon afIn que chacune tIre le meIlleur de l’autre.
Il y a ces musIcIens, que l’on peut appeler artIste, quI, au détour d’un rIff ou d’une lIgne vocale, parvIennent à évoquer nombres d’Images dans le profond subconscIent des IndIvIdus, dIsant à chacun bIen plus que ce qu’un mot ne pourra jamaIs dIre, usant d’une sensIbIlIté devenant à fleur de peau.
Il y a ces albums cultes, que l’on pourra écouter jusqu’à la fIn des temps, et quI nourrIront jusqu’à la fIn Influences et plagIats…Il y a "Paranoid"…

2009-05-09 00:00:00


wodulf
Le succès inattendu du premier album pousse le groupe à retourner en studio dès le mois de juin 1970. Au départ, l’album devait s’appeler War Pigs ; la pochette a d’ailleurs été réalisée dans cette optique.
Début septembre 1970 sort le 45 tours Paranoid qui fait un tabac et se place directement à la quatrième place dans les charts britanniques. Ce morceau qui est le plus grand tube de Black Sabbath a en fait été composé à la va-vite en 20 minutes parce que le groupe n’avait pas assez de morceaux pour l’album. D’ailleurs Tony Iommy n’était pas chaud pour l’incorporer à l’album le jugeant beaucoup trop commercial et décalé par rapport au reste. Des bruits courent d’ailleurs que ce serait la maison de disque qui aurait sorti ce titre dans le dos du groupe.
Quoi qu’il en soit, « Paranoid » devient très vite un énorme succès. Le second album est prévu pour fin septembre / début octobre, mais peu de temps avant sa sortie, on décide de changer son titre. D’une part, leur maison de disque ne souhaitait pas avoir de problèmes avec les Etats-Unis alors en pleine guerre du Vietnam, mais avait certainement aussi envie de capitaliser sur le titre « Paranoid ». Ce changement soudain de titre pour des raisons commerciales et politiques n’a pas du tout été au goût d’Ozzy Osbourne qui semble exprimer son mécontentement sur la célèbre photo de l’édition pochette ouvrante de Paranoid où on le voit faisant pratiquement bande à part.
Comme chacun le sait, le succès de cet album a été phénoménal. Il s’est placé directement à la première place au Royaume-Unis. Le disque sortira en mars 1971 aux Etats-Unis et ira s’installer dans le top 10 ; il se vendra à plus de 4 millions d’exemplaires là-bas.
Sur ce second album, on sent à la fois une continuité mais aussi une évolution par rapport au premier album. Continuité pour ce qui concerne les influences jazzy qui restent toujours très présentes, sur bien entendu l’instrumental « Rat Salad » qui lui est carrément jazz mais également sur le jeu de Bill Ward, notamment sur « War Pigs. Continuité au niveau des ambiances aussi qui restent toujours aussi sombres et funéraires (« Electric Funeral », « Hand of Doom », « Iron Man »).
Par contre, on sent très bien que le groupe veut s’enlever cette image satanique et occulte qu’il s’était faite sur le premier album. Il n’y a ainsi plus aucune référence à Satan. Au niveau musical, Paranoid est beaucoup moins bluesy et je dirais plus hard rock que le premier album. A l’exception toutefois du morceau « Planet Caravan » dont l’ambiance semble peut-être déjà annoncer celle de Master of Reality.
Un deuxième chef d’œuvres et le groupe n’est pas près de s’arrêter là …

2013-01-01 11:38:18